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"Rien n'a été concluant": déménagement, choix de vie... cinq ans après le premier confinement, ils ont fait machine arrière

Des cartons de déménagement entreposés devant une maison verdoyante (Photo d'illustration).

Des cartons de déménagement entreposés devant une maison verdoyante (Photo d'illustration). - Flickr - CC Commons - Kath Hala

Le 17 mars 2020 débutait le premier confinement lié à l'épidémie de Covid-19. Une période qui a poussé des Français à repenser leur vie: déménager, changer de métier ou adopter un nouveau mode de vie. Cinq ans plus tard, certains réalisent que leurs rêves de transformation n'ont pas été aussi idylliques qu'ils l'avaient imaginé. Ils partagent avec BFMTV.com leurs désillusions liées à ces changements de vie.

Lorsqu'ils ont décidé de quitter l'Île-de-France à l'issue de la crise Covid, Marie et Bastien sont partis plein d'optimisme, persuadés qu'ils retrouveraient une certaine sérénité en s'installant en Charente, au terme d'un an de voyages au bout du monde. Le jeune couple de 22 et 23 ans, qui avait un train de vie "ultra stable" pendant la pandémie, a soudain ressenti le besoin de changer de vie.

"Le Covid, on l'a vécu comme une pause dans le temps qui nous a permis de nous poser et de réfléchir. C'est à ce moment-là que nous avons décidé de quitter nos emplois et de déménager. Nous souhaitions changer d'environnement: comme un retour aux sources, un besoin de proximité avec l’océan, une vie simple et tranquille", raconte Marie, aujourd'hui âgée de 27 ans.

La désillusion après "un nouveau départ" au vert

La jeune femme explique qu'après cette période troublée, elle et son compagnon aspiraient à un nouveau départ. "C'est comme si tout à coup, on s'était rendu compte de la valeur de la vie. Nos jobs nous convenaient mais on avait peur de ne pas assez profiter. Il a fallu être au bord de ce gouffre pour se rappeler de l’importance du quotidien, que le temps passait vite".

Mais cinq ans après le début de la pandémie et des confinements successifs, Marie et Bastien ont été contraints de réévaluer leurs projets. À défaut d'avoir trouvé du travail dans leur nouvelle région, le couple compte se réinstaller dans sa Seine-et-Marne d'origine début avril. "Rien n'a été concluant. Quelle déception! Nous étions certains de retrouver du travail rapidement, mais on s'est vite rendu compte qu'on ne recevait quasi aucune réponse à nos nombreuses candidatures...", souffle-t-elle aujourd'hui.

"Impossible de trouver un emploi stable et durable pour se projeter", déplore Marie, qui s'attelle à refaire ses cartons pour Fontainebleau. "Il s’avère que la région ne vit quasiment que de la vente et production de spiritueux (Cognac) et que celle-ci est en baisse depuis quelques mois. Des commerces ferment par manque de fréquentation etc... Au fur et à mesure des mois qui passaient nous nous sommes rendu compte de la situation et que celle-ci était la même pour tous les habitants ici"

"Je vois différemment les choses désormais, mon expérience en Charente m’a permis de voir à quel point nous étions extrêmement bien lotis en Île-de-France. Pas mal de job s’obtiennent sur piston en Charente car tout le monde se connaît, nous aurions eu d’extrêmes difficultés si nous avions encore persisté".

Des changements de vie dictés par l'impulsion

Kelly Simon, cofondatrice de Paris je te quitte, un média dédié aux Franciliens souhaitant s’installer hors de la région parisienne, affirme qu’après la pandémie, le trafic de son site a bondi de 86%, tandis que les dépôts de CV sur la plateforme ont triplé. Cinq ans plus tard, elle observe toutefois un retour à des projets de mobilité plus mûrement réfléchis, moins dictés par l’urgence. Selon elle, les aspirations et les choix de destination ont également évolué.

Tous les projets lancés pendant le Covid n'ont en effet pas résisté à l'épreuve du temps. Kaïna Medroub, par exemple, a dû faire marche arrière vis-à-vis de ce qu'elle a entrepris tête baissée pendant cette période troublée. Cette femme de 33 ans, initialement consultante indépendante, a lancé son entreprise spécialisée dans le financement de la rénovation énergétique en plein confinement, en mai 2020, depuis chez elle.

Dans un premier temps, la start-up de Kaïna Medroub a grandi à toute vitesse, portée par la demande accrue dans le secteur de la rénovation énergétique pendant le Covid. À l'époque, la jeune femme se souvient avoir eu le sentiment de se retrouver face à "un boulevard d'opportunités professionnelles", en raison des bouleversements du secteur pendant la crise sanitaire .

"Il y a eu une demande massive du jour au lendemain: j'étais sans cesse sollicitée", ce qui a provoqué un changement radical de vie. "Je suis passée de deux mois seule chez moi devant mon ordinateur à devoir gérer une entreprise en pleine expansion", confie-t-elle.

"La spirale infernale" de la création d'entreprise

Comme de nombreux entrepreneurs ayant changé de vie pendant le Covid, elle a été rattrapée par le poids d’une activité intense. "Une fois le Covid terminé, de nouveaux concurrents sont arrivés sur le marché, le secteur est revenu à la normale et ça nous a énormément desservis", explique-t-elle. "Cela a engendré une pression salariale insupportable et a transformé la gestion de l'entreprise en une course effrénée: il fallait chercher du travail, trouver des clients, chercher de l'argent sans cesse."

Le rythme était "intense et non-stop", avec des journées de travail qui s’étendaient de 6h à 22h, sept jours sur sept. "J'étais à 150 appels par jour", raconte cette jeune cheffe d'entreprise, qui explique avoir dû "recruter à tour de bras", à tel point que l'équipe est est passée à 17 salariés en seulement deux ans.

"Une spirale infernale" qui l'a menée au burn-out: "Sur la fin je n'arrivais plus à me lever le matin", confie Kaïna Medroub. "J'avais la boule au ventre en allant travailler, l'angoisse du téléphone qui ne cesse de sonner. Ce n’était plus seulement le travail, c’était la vie en général, la gestion des relations, des amis... Tout devenait difficile à gérer."

Après une lente descente aux enfers de plusieurs années, elle n'a eu d'autre choix que de déposer le bilan de son entreprise il y a quelques semaines, au terme d'une liquidation judiciaire et d'un burn-out. "Une longue décadence après beaucoup, beaucoup de larmes, de stress et de cheveux blancs", pour reprendre ses mots.

"La période Covid m'a rendue tête brûlée"

"Aujourd'hui, le rêve de 'la start-up nation', j'en suis revenue. Mais à ce moment-là j'étais jeune et je crois que c'est le côté exceptionnel de la période Covid qui m'a rendue tête brûlée."

Cinq ans après lorsqu'elle fait la rétrospective, Kaïna Medroub est absolument persuadée que sans le Covid, elle n'aurait jamais fait tout ça, elle qui se décrut comme quelqu'un "plutôt de nature peureuse d'un point de vue financier". La trentenaire est également convaincue "que cette espèce de frein dans le temps (lui) a fait perdre toute notion de réalité".

"Pendant le Covid, on n’avait rien d’autre à faire que de travailler, travailler, travailler, finalement. Il n’y avait plus de barrières et tout semblait permis", analyse-t-elle aujourd’hui.

Depuis novembre dernier, cette Parisienne et mère de trois enfants savoure le confort du salariat, après avoir retrouvé un poste en CDI dans son secteur en région parisienne. Avec du recul, elle admet que, en se jetant tête baissée dans le travail, elle "cherchait probablement à combler le vide ambiant", un vide qu’elle espère désormais combler autrement, en recherchant un autre équilibre de vie.

Jeanne Bulant Journaliste BFMTV

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