Les Écoles du Manitoba Par Lionel Groulx - Les Québécois, le clergé catholique et l'affaire des écoles du Manitoba / Quebecers, the Catholic Clergy and the Manitoba School Question, 1890-1916 - Quebec History


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Last revised:
23 August 2000


Les Qu饕馗ois, le clerg? catholique et l'affaire des 馗oles du Manitoba / Quebecers, the Catholic Clergy and the Manitoba School Question, 1890-1916

Les ノcoles du Manitoba Par Lionel Groulx

[Note de l'馘iteur : L'analyse qui suit a 騁? r馘ig馥, en 1933, par Lionel Groulx [1878-1967]. Groulx fut le pionnier de l'histoire, en tant que discipline acad駑ique, au Canada fran軋is. Apr鑚 avoir enseign? cette discipline au Coll鑒e de Valleyfield, il fut nomm? professeur d'histoire du Canada ? l'Universit? de Montr饌l en 1915. Il occupa la chaire d'histoire du Canada ? cette universit? jusqu'en 1949. En 1947, il fonda la Revue d'histoire de l'Am駻ique fran軋ise qui continue d'黎re, encore aujourd'hui, la principale revue traitant de l'histoire du Qu饕ec.

Groulx fut aussi le nationaliste canadien-fran軋is dominant de la p駻iode de 1920 ? 1950. Il n'est pas de notre propos de faire ici l'analyse de sa pens馥 nationaliste. Il suffit, pour l'intelligence du texte qui suit, de rappeler que tout chez Groulx devait contribuer ? solidifier ォ l'essence fran軋ise サ de la nation, de telle mani鑽e qu'en demeurant fid鑞e aux origines et traditions fran軋ises la nation continue d'黎re catholique. C'騁ait l? son 馗helle des valeurs. L'histoire du Canada fran軋is 騁ait une longue r駸istance ? l'assimilation, un d駸ir constant d'affirmer son existence et une progression continue vers une autonomie de plus en plus large. On retrouve tous ces th鑪es dans le texte qui suit.

Dans l'œuvre historique de Groulx, il y a donc un d駸ir de faire un travail scientifique d'une part, mais aussi, d'autre part, de contribuer ? solidifier et d馭endre la nation. Le livre de Groulx sur L'enseignement fran軋is au Canada, d'o? est tir? le long chapitre sur les 馗oles du Manitoba, est s?rement la meilleure œuvre historique de l'auteur. On y trouve une discussion magistrale, parmi les plus fouill馥s sur la question, m麥e encore aujourd'hui. Le sujet a inspir? l'auteur parce qu'il cadre bien dans ses pr駮ccupations historiques et nationalistes. Au moment o? il r馘ige L'enseignement fran軋is, Groulx pratique d駛? l'histoire ? plein temps depuis pr鑚 de vingt ans; il a eu le temps de poursuivre des recherches, de se monter une biblioth鑷ue, de d騅elopper une technique et une conception de l'histoire, de l'int馮rer ? son univers nationaliste, de rafiner son talent d'馗rivain.

L'origine du texte est dans une s駻ie de neuf conf駻ences que Groulx pronon軋 ? Paris, ? la Sorbonne, et qui fut publi馥 chez Delagrave en 1932 sous le titre de Le Fran軋is au Canada. Il le remania, fit des additions substantielles, particuli鑽ement par l'ajout de renvois bibliographiques 駘abor駸. Non seulement le sujet a bien inspir? Groulx, mais il est ma?tre de son dossier. Il est rarement pris en faux. Son chapitre sur le Manitoba est bas? sur une vaste documentation, dont une bonne partie est in馘ite. Sur cette question, il fut le premier ? faire des recherches s駻ieuses dans les archives, principalement les archives 駱iscopales, qui fourmillent de documentation sur le sujet.

Dans le texte, Groulx a un parti pris 騅ident : la loi manitobaine est le produit du fanatisme ォ anglo-saxon サ, de son d駸ir de domination, de sa haine et de ses pr駛ug駸 contre les catholiques et les francophones. S?r de bien conna?tre l'origine de la question dans ces sentiments, il n'explore presque pas d'autres avenues d'explications, telle la conception de l'馘ucation, et de son r?le dans le d騅eloppement du civisme, qui pr騅aut en Am駻ique du Nord ? l'駱oque. Bien que Groulx note, en passant, l'existence de cœurs 駘ev駸 chez les anglo-protestants (Luxton, Ewart, Tupper) qui ont cherch? justice pour leurs compatriotes, il est clair que la minorit? ne peut compter que sur elle-m麥e. Elle ne peut particuli鑽ement pas compter sur les politiciens qui, ? quelques exceptions pr鑚, abandonneront la minorit?. Sur ce dernier point, on rejoint une autre constante de l'œuvre de Groulx o? les politiciens jouent presque invariablement un mauvais r?le et sont une de ses cibles pr馭駻馥s. Dans l'ensemble, l'analyse de Groulx n'est pas fausse mais elle est incompl鑼e et elle m駻iterait d'黎re plus d騁ach馥. Ainsi, par exemple, Groulx nous pr駸ente la minorit? comme une minorit? franco-catholique. La question des 馗oles du Manitoba est pr駸ent馥 comme une 騁ape importante dans la lutte s馗ulaire des francophones dans leur r駸istance ? l'assimilation. Cela n'est pas faux. Mais cette vision cache aussi le fait que la minorit? agress馥 au Manitoba 騁ait la minorit? catholique dont une proportion substantielle 騁ait anglophone, ou non francophone.

Comme il se doit, dans le texte qui suit, il est beaucoup question du Manitoba et de la politique f馘駻ale ? ce sujet. Cependant, de fa輟n surprenante, il est trop peu question du Qu饕ec et du r?le que les Qu饕馗ois ont jou?, ou aurait d? jouer, dans cette affaire. Groulx pr駸ente aussi la r饌ction catholique envers la loi rem馘iatrice comme 騁ant unanime; les longues h駸itations de Mgr Langevin sur cette loi, d駑ontrent clairement que telle n'騁ait pas n馗essairement la situation.

Groulx a aussi tendance ? rejeter les rem鐡es politiques et judiciaires pour les remplacer par la morale, l'histoire et la solidarit? ethnique. Ces sch鑪es sont typiques de son univers mental et sont d馭endables. N饌nmoins, les faits ne justifient pas toujours ces sentiments. On voit souvent dans l'histoire ce qu'on veut bien y voir. Dans le cas de l'affaire des 馗oles du Manitoba, avec la d馗ision Brophy, et celui du r鑒lement 17 avec la d馗ision Ottawa Corporation, les cours de justice ont prot馮? les droits de la minorit?. Rappelons aussi que la Cour supr麥e a 騁? unanime dans le cas Barrett. Les cours de justice n'ont pu aller plus loin parce que les textes l馮islatifs n'allaient pas assez loin. Groulx en aurait attribu? le bl穃e ? l'inconscience des P鑽es de la Conf馘駻ation, ce qui m駻iterait discussion appropri馥. Admettons, tout de m麥e, que Groulx pouvait facilement se justifier envers les politiciens avec la question des 馗oles du Manitoba et qu'il pourrait se d馭endre sur les cours de justice avec la d馗ision du Conseil priv? dans l'arr黎 Barrett.

Ces nuances exprim馥s, il reste n饌nmoins au texte de Groulx une grande valeur. Avec connaissance, force et passion, Groulx nous a donn? un chapitre qui m駻ite r馭lexion. Comment n'黎re pas d'accord avec l'une de ses conclusions o?, apr鑚 avoir d駑ontr? l'abandon par le gouvernement f馘駻al de la minorit?, abandon par lequel ce gouvernement reniait ses obligations constitutionnelles, Groulx conclut: ォ un article fondamental de la charte de 1867 venait d'黎re frapp? pour jamais de caducit?. サ.]

Le fait dominant de la vie fran軋ise d'Am駻ique, au cours du si鐵le dernier, c'est, sans doute, sa dispersion. Le Canada fran軋is ne saurait plus se d馭inir comme une expression g駮graphique limit馥 aux fronti鑽es qu饕馗oises. La race prolifique a essaim?, mais par essaims irr馮uliers et capricieux. Loin d'op駻er dans le voisinage de la ruche-m鑽e, l'essaimage ne s'est arr黎?, h駘as! ni ? la fronti鑽e am駻icaine, ni ? la fronti鑽e voisine de l'Ontario. Il n'a voulu conna?tre d'autre loi que l'esprit d'aventure ou la pouss馥 de la faim. Quand, par l'un ou l'autre des transcontinentaux, le voyageur traverse le Canada d'est en ouest, ? l'extr麥e nord de l'Ontario habit? et du lac Sup駻ieur, et sur un parcours de 200 milles de chemin de fer, le pays prend insensiblement l'aspect d'une zone d駸ertique et d駸ol馥. La carapace de granit du plateau laurentien affleure, carapace tourment馥, creus馥 en entonnoirs ou h駻iss馥 de maigres v馮騁ations. Tout ? coup, par un de ces contrastes violents dont la nature canadienne est assez coutumi鑽e, la carapace granitique se d駻obe; le sol s'aplanit, les r駸ervoirs d'eau se multiplient, la v馮騁ation grandit. Encore quelques milles et, voici l'espace uniforme, l'immense prairie centrale d'Am駻ique, la patrie des grands bl駸. Avant m麥e l'arriv馥 ? Winnipeg, portique de ce nouveau monde, la prairie est d駛? apparue, mais encore partiellement envahie par la for黎 laurentienne. Le voyageur veut-il s'offrir le spectacle en son int馮rit?? Il n'aura qu'? sortir de la capitalemanitobaine: d鑚 les limites de la ville-champignon, au bout de sa grande avenue du Portage, l'immense paysage se d駱loiera devant lui, uni comme la main, sol pur, sans une pierre, sans le plus petit gravier, ? peine mouchet? 軋 et l? de graciles bosquets, de la fleur blanche d'une ferme, de la rotonde d'une grainerie, d'une silhouette d'駘騅ateur. Variant de couleur selon les saisons, noir comme l'encre apr鑚 les labours, vert sous les bl駸 en pousse, blond sous les bl駸 m?rs, drap? l'hiver en son grand silence blanc, le paysage uniforme se d駱loie, se prolonge ind馭iniment, jusqu'au mirage o? flottent, entre ciel et terre, des habitations de r黐e, des bosquets extatiques. Bien au-del? de la puissance des yeux, la prairie occidentale 騁end sa m麥e surface, ondul馥 parfois, courant de l'est ? l'ouest, jusqu'aux pieds des Rocheuses, soit une longueur de 600 milles et une largeur presque 馮ale.

La prairie n'est pourtant pas un d駸ert. En ce vaste espace coiff? au nord de la for黎 subartique et qui mesure 357 millions d'acres, le gouvernement f馘駻al a taill? trois provinces, le Manitoba, la Saskatchewan, l'Alberta, toutes trois, par l'ensemble de leurs richesses agricoles, mini鑽es et hydrauliques, formidables puissances en gestation, si鑒es futurs, au nord de l'Am駻ique, de grands Etats.

Disons-le: ce n'est pas sans un peu de m駘ancolie que le voyageur fran軋is embrasse les horizons de ce pays fabuleux. Il songe que des aventuriers de sa race, Pierre-Esprit Radisson, natif de Paris, M馘ard Chouart, dit Desgroseilliers, originaire de Touraine, les premiers parmi les Blancs, atteignaient, vers le milieu du dix-septi鑪e si鐵le, ces lointaines r馮ions. A l'esprit d'entreprise de ces coureurs de continent la c駘鐫re Compagnie de la Baie d'Hudson devra m麥e, pour une part, sa fondation. N'est-ce pas encore un des plus nobles fils de la race fran軋ise, n? aux Trois-Rivi鑽es d'un p鑽e fran軋is et d'une m鑽e canadienne, Pierre Gaultier de Varennes de la V駻endrye, qui, le premier, en 1731, entreprendra, pour le compte de la France, l'exploration m騁hodique et l'organisation commerciale de ces pays d'ouest? Lui encore qui, en 1742, enverra le chevalier, son fils, ? des d馗ouvertes qui l'am鈩eront au barrage altier des Montagnes rocheuses? D駸ormais la prise de possession fran軋ise est accomplie; elle ne fera plus que s'騁endre et se fortifier avec Charles-J. de Noyelle, Jacques-R. Le Gardeur de Saint-Pierre, le chevalier Saint-Luc de la Corne, lequel ne sera rappel? de l'ouest, en 1755, que pour venir assister ? l'agonie de la Nouvelle-France.

En ces r馮ions o?, comme disait Chateaubriand, un nouvel univers recommence, que reste-t-il du pass? fran軋is? Y peut-on retracer d'autres vestiges que des noms g駮graphiques de consonance fran軋ise, quelques plaques de plomb aux armes de France, perdues dans l'herbe? Le joyeux 騁onnement du voyageur sera bien de d馗ouvrir tout ? coup, ? plus de 300 milles du dernier 騁ablissement fran軋is de l'Ontario, et ? plus de 1,000 milles quelquefois de Montr饌l, des r馮ions enti鑽es o? il entend r駸onner sa langue, v駻itables miniatures du vieux Qu饕ec reconstruites l?-bas par le g駭ie de la m麥e race. Dans les trois provinces de l'Ouest, l'on compte aujourd'hui pr鑚 de 150,000 Canadiens de langue fran軋ise, quelquefois 駱arpill駸, le plus souvent group駸. Et, dans cette bigarrure d'immigr駸 de tous pays et de toutes races, press駸 de se fondre dans le monochrome anglo-saxon, l'un des ph駭om鈩es de la vie sociale et politique au Canada, c'est bien le spectacle de ces fils du Qu饕ec, ent黎駸 dans leur individualit? fran軋ise, autour de leurs clochers latins.

Mais ces Fran軋is, depuis quel temps sont-ils l?? Et, par quel miracle, en cette mosa?que de peuples, ont-ils gard? leur personnalit? originelle?

- I -

En 1867 la Conf馘駻ation canadienne s'騁ait form馥 par l'alliance politique de quatre provinces: l'Ontario, le Qu饕ec, le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Ecosse: tout le Canada oriental actuel, moins l'ホle du Prince-Edouard. D鑚 lors n饌nmoins de futurs et vastes agrandissements sont projet駸 par la jeune Puissance. L'article 146 de la Charte f馘駻ative fixe m麥e les proc馘ures qui lui permettront l'annexion des territoires de l'Ouest. Pour assurer au Canada des titres indiscutables ? la possession de ces vastes terres, il est m麥e pr騅u que la Couronne d'Angleterre se chargera de les acqu駻ir de la Compagnie de la Baie d'Hudson. C'est pourquoi, le 31 juillet 1868, Sa Majest? britannique sanctionnait une loi (ch. 105 de 31-32 Vic.) qui l'autorisait ? n馮ocier l'acquisition des territoires. Le 19 novembre 1869 la Compagnie de la Baie d'Hudson faisait cession de ses droits de propri騁aire. Sept mois plus tard, le 22 juin 1870, Sa Majest? acceptait la cession. Le lendemain, 23 juin, une proclamation royale fixait au 15 juillet 1870 l'admission de la Terre de Rupert et du Territoire du Nord-Ouest dans la Puissance du Canada. A partir du jour sus-dit, 騁ait-il express駑ent stipul?, ォ le Parlement du Canada aura plein pouvoir de l馮if駻er pour le bien-黎re et le bon gouvernement futurs du dit territoire. サ (1)

Retenons ces dates; elles ont leur importance. (2) Elles nous apprennent, entre autres choses, qu'avant le 15 juillet 1870, le gouvernement canadien ne poss鐡e ni droit ni juridiction d'aucune sorte sur ces domaines. Or voici pourtant ce qui arrive. D鑚 1868 le gouvernement canadien traite les Territoires comme sa propri騁?. En vue de l'annexion prochaine et pour porter secours ? la population alors en proie ? la famine, il y fait commencer des travaux de voirie, entre le lac des Bois et Sainte-Anne-des-Ch麩es. Presque aussit?t ses arpenteurs entrent en sc鈩e; ils se mettent ? bouleverser les anciennes propri騁駸 des bords de la Rivi鑽e-Rouge, se donnent l'air quelquefois de les attribuer ? de nouveaux propri騁aires. Poussant plus loin la maladresse, ils se lient par trop visiblement ? un parti des plus suspects dans la r馮ion: nous voulons dire le ォ parti canadien サ, 駘駑ent turbulent et ambitieux, venu surtout de l'Ontario et farouchement hostile ? la population native. Ce clan se livre ? l'accaparement du sol comme ? une orgie, (3) bat campagne pour une prompte annexion des Territoires ? la Conf馘駻ation canadienne, et, comme les choses ne vont pas ? son gr?, il pousse l'insubordination jusqu'? 駻iger une r駱ublique au Portage-la-Prairie. C'騁ait d駛? trop que la collusion des fourriers du Canada avec ces dangereux brouillons. Mais voici plus grave encore. En septembre 1869, le gouvernement d'Ottawa nomme William McDougall lieutenant-gouverneur des Territoires. Le 2 d馗embre, en route pour Fort-Garry, ce haut fonctionnaire canadien, d駸ign? ? un poste usurp?, multiplie les imprudences. De Pembina, en territoire am駻icain, il fait conna?tre, par proclamation, aux populations de l'Ouest sa qualit? officielle. De bonne foi, mais ? tort, il leur annonce comme fait accompli depuis la veille, l'entr馥 de la Terre de Rupert et du Territoire du Nord-Ouest, dans la Conf馘駻ation du Canada. (4) Pendant ce temps-l?, ? la Rivi鑽e-Rouge, le ォ parti canadien サ exulte et se livre ? toutes les fanfaronnades. Aux natifs, il annonce leur prochaine expulsion du pays, ? moins qu'on ne fasse d'eux des charretiers pour conduire les voitures des nouveaux immigrants. (5) Pour aviver ? plaisir les provocations, les journaux d'Ottawa du mois d'octobre pr馗馘ent ont d駛? annonc? l' envoi ? Fort-Garry de 350 carabines et de 35,000 cartouches. (6)

On reste stup馭ait de tant de b騅ues. Pour qu'un gouvernement civilis? se comporte avec ce sans-g麩e, les terres de l'Ouest seraient-elles vides d'habitants, ou ces habitants compteraient-ils moins que des parias? Au Canada la nouvelle se r駱and tout ? coup qu'un jeune homme de vingt-sept ans s'est pr駸ent? aux arpenteurs de la Rivi鑽e-Rouge et leur a tenu ce langage de ma?tre: ォ You dare not to go any further サ. (Je vous d馭ie d'aller plus loin). La m麥e nouvelle apporte que le chef improvis? a fait tourner bride aux fourriers de William McDougall et que McDougall lui-m麥e, en d駱it de sa pompeuse proclamation, a jug? prudent de s'abriter derri鑽e la fronti鑽e am駻icaine. Int駻ess?, le public apprend ensuite que le jeune h駻os de la Rivi鑽e-Rouge porte un nom fran軋is: Louis Riel; qu'il appartient ? la nationalit? m騁isse, m駘ange d'Indiens et d'Europ馥ns, et qu'il s'est fait le porte-parole de ses 12,000 compatriotes et de toute la population des Territoires. Pas d'erreur possible: l'on se trouve bien en face de civilis駸. Ceux que la presse ontarienne d駸igne 駘馮amment comme un ォ troupeau de buffles サ, ou comme les ォ noirs prot馮駸 サ, ou les ォ serfs サ de l'騅麭ue de Saint-Boniface, poss鐡ent, en effet, depuis longtemps, des institutions judiciaires et politiques, un 騅鹹h? anglican, un 騅鹹h? catholique, un vicariat apostolique, un syst鑪e scolaire. La population de la Rivi鑽e-Rouge comprend alors environ 14,000 habitants, dont 1,565 blancs, 558 Indiens, et 11,963 m騁is. Ces derniers se partagent en deux groupes ethniques: m騁is anglais, m騁is fran軋is, groupes ? peu pr鑚 馮aux o? les m騁is de langue fran軋ise accusent toutefois une l馮鑽e majorit?. Quelques-uns de ces derniers remontent, par leurs anc黎res, jusqu'au temps des La V駻endrye. La plupart sont d'origine plus r馗ente, descendant des coureurs des bois, des voyageurs des pays d'en haut ou des premiers employ駸 de la Compagnie du Nord-Ouest. En 1812 un grave 騅駭ement s'騁ait pass? dans l'Ouest. Thomas Douglas, comte de Selkirk, l'un des principaux actionnaires de la Cie de la Baie d'Hudson, avait achet?, cette ann馥-l?, de la Compagnie, quelque 110,000 milles carr駸 de terres au confluent de l'Assiniboine et de la Rivi鑽e-Rouge. Sur le nouveau domaine une colonie naissait presque aussit?t. Sans tarder, Selkirk pourvoyait le jeune 騁ablissement de ses institutions politiques: un gouverneur bient?t assist? d'un Conseil 騁ait charg? de l'administration. En 1835 le Conseil d'Assiniboia divisait la colonie en quatre districts judiciaires et s'駻igeait lui-m麥e en cour supr麥e. Cette m麥e ann馥 un autre grave 騅駭ement se passait ? la Rivi鑽e-Rouge: la Compagnie de la Baie d'Hudson y rachetait les droits de la succession Selkirk. Cette substitution de propri騁aires n'entra?nait toutefois nul changement dans les institutions politiques et judiciaires. Et il est ? noter que, dans le personnel de l'administration, l'on verra figurer des m騁is et des hommes d'Eglise: les 騅麭ues Provencher et Tach?. Car voici bien un autre fait important dans l'histoire de la colonie: en 1818 des missionnaires catholiques arrivaient sur les bords de la Rivi鑽e-Rouge. La jeune Eglise se d騅eloppa rapidement. En 1822 l'abb? J.-N. Provencher, sacr? 騅麭ue, devient, pour le Nord-Ouest, coadjuteur de l'騅麭ue de Qu饕ec. En 1844 la r馮ion est 駻ig馥 en vicariat apostolique, puis en 騅鹹h? en 1847. En 1853 le P鑽e Alexandre Tach?, O.M.I., succ鐡e ? l'騅麭ue Provencher sur le si鑒e de Saint-Boniface. En 1862 deux vastes districts, ceux de l'Athabaska et du Mackenzie, sont d騁ach駸 du dioc鑚e de Saint-Boniface et confi駸 ? Mgr Faraud.

Comme partout ailleurs, l'Eglise s'est faite, dans l'Ouest, fondatrice d'馗oles. En 1818, les premiers missionnaires emportent, de Mgr Plessis, cette consigne expresse: ォ Les missionnaires s'attacheront avec un soin particulier ? l'馘ucation chr騁ienne des enfants, 騁abliront, ? cet effet, des 馗oles et des cat馗hismes dans toutes les bourgades qu'ils auront occasion de visiter. サ A ces pionniers de la jeune Eglise, l'騅麭ue enjoint de b穰ir ces trois choses ? la Rivi鑽e-Rouge: ォ une 馮lise, une maison, une 馗oleサ. (7) Pour se mettre ? la besogne, les missionnaires n'attendront pas l'aide officielle. D鑚 l'ann馥 qui suit leur arriv馥, ils fondent deux 馗oles, l'une ? Saint-Boniface, l'autre ? Pembina. En 1829 l'abb? Provencher ouvre la premi鑽e 馗ole de filles de la r馮ion en 1833 l'abb? Belcourt, la premi鑽e 馗ole industrielle du Nord-Ouest; en 1844 les Soeurs de la Charit?, le premier couvent ? l'ouest de l'Ontario. Lorsqu'en 1857-58, les explorateurs du gouvernement canadien traverseront la r馮ion, ils jetteront dans leur relation cette note louangeuse: ォ L 馘ucation est dans un 騁at plus avanc? que ne le pourrait faire supposer l'isolement de la colonie et sa courte existence . . . サ (9) A cette 駱oque, les habitants de la Rivi鑽e-Rouge jouissent, pour l'馘ucation de leurs enfants, d'un v駻itable r馮ime de libert?. Catholiques et protestants ont chacun leurs 馗oles et contribuent s駱ar駑ent ? leur soutien. Ce r馮ime a m麥e pour lui la sanction officielle que lui accorde la Compagnie de la Baie d'Hudson, unique autorit? du pays. La Compagnie contribue au soutien de l'enseignement public par des subventions en terres et en argent; chaque confession religieuse re輟it sa part. Et, par exemple, ? partir de 1825, les missionnaires catholiques recevront pour leurs 馗oles, 50 livres par ann馥. (10)

En 1870, c'est donc un groupe humain 騅olu?, un petit peuple civilis? qui vit sur les bords de la Rivi鑽e-Rouge. Rien par cons駲uent que de fort naturel en la r駱ugnance de ce peuple, si minime soit-il, ? passer, lui et son territoire, ? une autre puissance, comme une population d'esclaves ou de sauvages, sans m麥e 黎re consult?? Mgr Tach?, d'abord favorable ? l' annexion et jusqu'? l'enthousiasme, n'a pas tard? ? se ressaisir. Mais les m騁is n'ont jamais cach? leurs appr馼ensions. Le plus grand nombre, la majorit?, 馗rira l'騅麭ue de Saint-Boniface, ォ redoute ce changement. サl (11) Et quelles h駸itations, quelles craintes plus justifiables que celles-l?! Les impairs, les provocations des premiers 駑issaires du Canada ne seront d駱ass駸 que par l'騁range ent黎ement des autorit駸 f馘駻ales ? ne rien entendre. ォ H駘as! サ, devait 馗rire Mgr Tach?, ォ comme nos hommes d'Etat de langue fran軋ise ont 騁? aveugles sur nos int駻黎s, qui sont pourtant ceux de la province de Qu饕ec. サ (12) Et pourquoi ne pas le dire? L obstination, l'aveuglement de ces hommes tiennent en toute lettre du prodige. Vainement, de passage dans la capitale, l'騅麭ue de Saint-Boniface a tent? de leur dessiller les yeux. Sir Georges-ノtienne Cartier lui a r駱ondu, ? sa mani鑽e hautaine: ォ Je suis ? ce sujet beaucoup mieux renseign? que vous pouvez l'黎re et je n'ai pas besoin d'autres informations. サ Une nouvelle d駑arche de l'騅麭ue, une lettre du gouverneur de l'Assiniboia mise sous le yeux de Cartier, lettre pleine d'avertissements graves, n'饕ranlent point cette superbe assurance. Autoritaire et cassant, g穰?, comme tous les politiciens, par une trop longue possession du pouvoir, ou par le spectacle trop prolong? de la servilit? humaine, le chef canadien-fran軋is ne sait r駱ondre ? ces avis que par de nouvelles impertinences. Aussi peu clairvoyant, Sir John A. MacDonald ne sait alors parler que de ces ォ mis駻ables m騁is サ. (13) Un jour la liste du personnel administratif de la Rivi鑽e-Rouge est livr馥 au public; on y constate que les fonctionnaires d駸ign駸 sont tous ou presque tous de langue anglaise. Alarm?, l'騅麭ue de Saint-Boniface se d騁ermine ? un dernier effort. Le 7 octobre 1869, au moment de s'embarquer pour le concile du Vatican, il 馗rit ? Sir Georges une 駱?tre o? il secoue rudement le grand homme: ォ Les noms mis devant le public jusqu'? ce jour, pour le personnel de l'administration, sont tous des noms anglais et protestants, ? l'exception de M. Provencher . . . Puisque le Haut-Canada fournit McDougall et un conseiller, pourquoi le Bas-Canada n'aurait-il pas aussi ses deux hommes? . . . Nos p鑽es ont d馗ouvert tous ces pays, ils les ont arros駸 de leurs sueurs et m麥e de leur sang; nos missionnaires y ont trop souffert, pour qu'on puisse l馮itimement r馘uire nos compatriotes ? l'esp鐵e d'exclusion ? laquelle on semble les condamner. La langue fran軋ise est non seulement la langue d'une grande partie des habitants du Nord-Ouest, elle est de plus, elle aussi, langue officielle; et pourtant la plupart des membres de la nouvelle administration ne parlent pas cette langue; c'est assez fixer le sort de ceux qui n'en parlent pas d'autre. Pourquoi faire en sorte que toutes les influences puissent devenir pr駛udiciables ? nos compatriotes et coreligionnaires . . . ? サ (14)

Lettre 駘oquente? Mais que pouvait-elle contre l'incroyable l馮鑽et? que l'on apporte alors ? toute cette affaire de l'Ouest? Mgr Tach? terminait sa lettre ? Sir Georges, par ce mot tristement proph騁ique: ォPlus tard l'on reconna?tra ce que ma position me fait pr騅oir, et quels regrets s'il 騁ait trop tard! サ A l'automne de 1869 l'on pouvait dire qu'Ottawa avait tout fait pour se mettre une insurrecion [sic] sur les bras. Cette insurrection, il l'aura. Le 16 octobre de cette ann馥-l?, en face des autorit駸 canadiennes, un gouvernement provisoire se dresse ? la Rivi鑽e-Rouge. Comme il va de soi, les instigateurs du mouvement se recrutent parmi ceux que menace davantage le nouvel 騁at de choses. Et c'est ainsi qu'une poign馥 de Fran軋is catholiques, perdus dans la solitude, ? plus de 1,000 milles de toute vie fran軋ise, assumaient les plus grands risques pour la d馭ense de leur patrimoine moral. La population enti鑽e fait bloc contre l'envahisseur; mais ce sont les m騁is fran軋is qui prennent la t黎e du mouvement. C'est le jeune Riel qui est l'inspirateur de la r駸istance, lui qui parcourt les petits centres de la Rivi鑽e-Rouge pour les 騅eiller au sentiment du p駻il et du devoir, lui qui fait agr馥r aux m騁is de langue anglaise, la n馗essit? d'un gouvernement provisoire. (15) De ce gouvernement, c'est encore lui qui est l'animateur, en attendant qu'il en devienne le pr駸ident. Et, sans doute, ce qui meut Riel et les siens, c'est, en premier lieu, leur sentiment froiss? d'hommes libres et de sujets britanniques, incapables d'admettre qu'un pouvoir 騁ranger puisse ainsi disposer d'eux, sans m麥e prendre leur avis; et c'est encore le souci de leurs propri騁駸 terriennes qu'ils sentent menac馥s par de trop loquaces cupidit駸; mais, par-dessus tout, ce qui meut ce petit peuple et lui a mis les armes ? la main, c'est, ? ce qu'il semble bien, la volont? de d馭endre son individualit? ethnique. Tout ? l'heure, quand ses d駘馮u駸 emporteront vers la capitale canadienne ce qu'il appelle sa ォ Liste des droits サ, parmi le petit nombre d'articles qu'il affirme ォ p駻emptoires サ et d馗lare ne point abandonner ? la discr騁ion de ces d駘馮u駸, figurent ceux-l? m麥es qui, sous le futur r馮ime, doivent assurer ? la langue fran軋ise des droits officiels:

ォ 16. Que les langues fran軋ise et anglaise soient communes dans la l馮islature et les cours, et que tous les documents publics, ainsi que les actes de la l馮islature soient publi駸 dans les deux langues. サ

ォ 17. Que le lieutenant-gouverneur ? nommer pour la province du Nord-Ouest poss鐡e les deux langues fran軋ise et anglaise. サ

ォ 18. Que le juge de la Cour supr麥e parle le fran軋is et l'anglais. サ

On sait le reste: le gouvernement canadien emp鹹h? par le gouvernement britannique d'envoyer des troupes ? la Rivi鑽e-Rouge pour imposer sa souverainet?; Ottawa contraint de n馮ocier avec Fort-Garry; proclamations de McDougall d駸avou馥s; promesse donn馥 ? la population en armes, de respecter tous ses droits civils et religieux, et ce, par proclamation solennelle du gouverneur. En un mot, sur toute la ligne, capitulation des autorit駸 canadiennes. Et ce n'est pas tout: d駱art pr馗ipit? vers l'Ouest d'une commission d'enqu黎e; les insurg駸 pri駸 d'envoyer en retour une d駘馮ation; enfin humiliation supr麥e: l'homme dont on avait tant m駱ris? les conseils et les avertissements, l'騅麭ue de Saint-Boniface, mand? en toute h穰e du Concile du Vatican pour venir aider ? l'oeuvre de pacification.

A la fin d'avril 1870, dans une salle du parlement d'Ottawa, trois d駘馮u駸 du Nord-Ouest, (16) re輹s en cette qualit? officielle par le gouvernement canadien, si馮eaient en face de Sir John A. MacDonald et de Sir Georges-ノtienne Cartier, d駘馮u駸 de l'ノtat f馘駻al. (17) Les d駘ib駻ations vont avoir lieu sous une haute surveillance: celle du ministre des colonies. Lord Granville a voulu en effet, que son d駘馮u? sp馗ial f?t pr駸ent ? Ottawa; et il a fait avertir le gouvernement canadien que ce dernier aurait ? en passer par la d馗ision du gouvernement imp駻ial. De part et d'autre le premier souci fut de chercher une base d'entente. Quelle serait-elle? Les d駘馮u駸 de la Rivi鑽e-Rouge ont apport? avec eux ce qu'ils appellent une ォ liste des droits サ : (18) ォ conditions サ et ォ propositions サ sous lesquelles le peuple d'Assiniboia consentirait ? entrer en Conf馘駻ation avec les autres provinces du Canada サ. Document capital d'o? va sortir la constitution du Manitoba. L'article VII de la ォ Liste サ, consacr? aux droits scolaires, se lisait comme suit: ォ Que les 馗oles soient s駱ar馥s et que les argents pour les 馗oles soient divis駸 entre les diff駻entes d駭ominations religieuses au prorata de leur population respective d'apr鑚 le syst鑪e de la province de Qu饕ec. サ On remarquera la pl駭itude de ce texte; il vise bien au-del? de la confessionnalit? de l'馗ole, en un pays comme la Rivi鑽e-Rouge o? Anglais et Fran軋is, protestants et catholiques, vivent chacun chez eux, en des paroisses distinctes. (19) Les d駘馮u駸 du gouvernement provisoire n'eurent pas de peine ? faire agr馥r leurs vues. Ramen? ? la raison par les 騅駭ements, Ottawa s'empressa d'acquiescer aux d駸irs et aux volont駸 de la population de l'Ouest. L'article XXII de la constitution du Manitoba fixa le statut scolaire des deux confessions religieuses. Dans le domaine de l'enseignement public, la l馮islation de la nouvelle province re輹t, comme les autres l馮islatures provinciales, une juridiction restreinte, avec cette diff駻ence toutefois que, pour le coup, les restrictions s'駭onc鑽ent plus nombreuses. Ailleurs, n'馗happent aux prises des parlements provinciaux que les droits et privil鑒es des 馗oles confessionnelles 騁ablies l馮alement avant la f馘駻ation. Dans la constitution manitobaine la coutume devient source de droit; et tous les droits ou privil鑒es scolaires garantis indiff駻emment par la coutume ou par la loi sont soustraits ? la juridiction de la l馮islature. Et que l'on ne s'騁onne point de cette innovation constitutionnelle. L'ann馥 pr馗馘ente, la guerre s'騁ait d馗lench馥 au Nouveau-Brunswick contre l'馗ole minoritaire. Les Manitobains prenaient un suppl駑ent de pr馗autions . (20) Pour le m麥e motif, sans doute, ils voulurent se m駭ager un recours sp馗ial au cabinet f馘駻al, recours qui leur serait une protection, et contre ォ toute autorit? provinciale サ et contre ォ tout acte ou d馗ision de la l馮islature de la province. サ (21) M麥e souci de nettet? dans la d馭inition des droits du bilinguisme ? la Rivi鑽e-Rouge. L'article 23 de la constitution manitobaine n'est que la transposition de l'article 133 de la charte f馘駻ative, tel qu'il s'applique ? la province de Qu饕ec. Facultatif dans les d饕ats des Chambres de la l馮islature, dans toute plaidoirie ou document des tribunaux de juridiction f馘駻ale et provinciale l'usage de la langue fran軋ise et de la langue anglaise devenait obligatoire dans les imprim駸 officiels, dans la r馘action des archives, proc鑚-verbaux et journaux des Chambres. De la fa輟n la plus expresse, ce texte de 1870 prolongeait donc dans l'Ouest la lettre et l'esprit du pacte de 1867. Il y proclamait l'馮alit? absolue des deux races.

Qu'exiger de plus? Un publiciste 馗rira un jour que pareille loi a 騁? impos馥 aux habitants de la Rivi鑽e-Rouge, ? la pointe de la ba?onnette, par le colonel Wolseley. (22) Nous n'avons plus besoin de dire que cette fa輟n de traiter les faits n'a rien de commun avec l'histoire. Fruit des d駘ib駻ations de deux peuples et de deux gouvernements qui fixaient d'un commun accord les conditions de leur alliance, la constitution manitobaine prenait, par cela m麥e, devant le droit constitutionnel anglais, le caract鑽e auguste d'un pacte parlementaire, document ォ inviolable aux yeux de la loi et au sens moral du genre humain. サ (23) Ce pacte, le parlement canadien l'allait d'ailleurs ratifier d'un vote presque unanime (120 contre 11) . Il ajouterait m麥e ? la valeur de l'article XXII, en 馗artant une r駸olution hostile par un premier vote de 81 contre 34. (24) Le parlement imp駻ial prendrait ? son tour, sous sa haute protection, la constitution de la jeune province en l'incorporant ? la l馮islation imp駻iale, ce qui 騁ait la placer, du m麥e coup, hors des atteintes du parlement canadien et de la l馮islature du Manitoba. (25) Que si, enfin, il pla?t aux catholiques et aux Fran軋is de la Rivi鑽e-Rouge d'accro?tre encore ce luxe de garanties, ils n'ont qu'? se rappeler l'engagement solennel pris ? leur 馮ard par le gouverneur g駭駻al du Canada, Sir John Young. En sa proclamation du 6 d馗embre 1869, r馘ig馥, avouera-t-il ? Mgr Tach?, selon la lettre d'un message du cabinet britannique, Sir John Young a fait au petit peuple de l'Ouest cette promesse explicite et formelle: ォ Par l'autorit? de Sa Majest?, je vous assure que sous l'union avec le Canada tous vos droits et privil鑒es civils et religieux seront respect駸. サ (26)

Lorsque, le 15 juillet 1870, les catholiques de la Rivi鑽e-Rouge devinrent sujets canadiens, on peut dire que nul groupe religieux ne se pouvait targuer, dans toute la Puissance, d'une pareille condition juridique. Tout ? l'heure m麥e, au parlement canadien, lorsquedes voix se sont 駘ev馥s contre l'article XXII, pour quel motif l'ont elles fait, sinon pour ce luxe de privil鑒es, cette situation de faveur accord馥 ? la minorit? manitobaine? (27) Victoire consid駻able et dont l'effet d駱assait de beaucoup les fronti鑽es de la petite province. Pour en saisir tout le sens, il faut remonter, pour un moment, ? l'ann馥 1864, ? l'heure o? s'駘abore la Conf馘駻ation de l'Am駻ique du Nord britannique. Deux id馥s ou plut?t deux esprits se heurtent ? la Conf駻ence de Qu饕ec: l'esprit unitariste et l'esprit f馘駻aliste; le premier, ambitieux de la fusion des races et de l'effacement des provinces sous un gouvernement central et unique; le second, soucieux du maintien des diversit駸 ethniques et religieuses, de la survivance des particularismes provinciaux dans le cadre f馘駻al. Les troubles de la Rivi鑽e-Rouge trahissent le m麥e heurt d'esprits et de conceptions politiques. D馭aits en 1867, les unitaristes ne voulurent point se r駸igner ? un 馗hec d馭initif. Restreindre l'expansion fran軋ise et l'esprit du pacte f馘駻al aux fronti鑽es du Qu饕ec resta, chez eux, la pens馥 de fond. Pour quelques-uns, l'oeuvre la plus urgente en 1869, c'騁ait de faire de l'Ouest un fief r駸erv? ? l'anglo-protestantisme. Et volontiers au portique du Manitoba, eussent-il [sic] grav?: D馭ense ? tout catholique et ? tout Fran軋is d'entrer ici? L'intervention hardie du jeune m騁is Louis Riel d駛oua ce plan ambitieux. Gr稍e ? Riel, le dualisme canadien ne s'arr黎erait pas, comme ? une fronti鑽e interdite, aux rives du lac Sup駻ieur. On le verrait s'騁endre ? ces vastes territoires, propri騁? des deux races canadiennes, acquise par l'argent de tous. Et, par l?, le jeune h駻os manitobain e?t pu se flatter d'avoir affermi la pens馥 politique de 1867, tout en assurant ? ses compatriotes et ? ses coreligionnaires un suppl駑ent de protection morale.

- II -

Les faits paraissent d'abord justifier ces espoirs. Le 15 mars 1871 le premier parlement manitobain s'ouvre ? Winnipeg. M麥e vu d'aujourd'hui, combien le spectacle se r騅鑞e r馗onfortant. Ce premier parlement si鑒e sous la pr駸idence d'un Canadien fran軋is, M. Joseph Royal. Le lieutenant-gouverneur Adam-George Archibald est venu lire, dans les deux langues officielles, le discours de la couronne. Et M. Joseph Dubuc, qui pr駸ente l'adresse, prononce, en langue fran軋ise, le premier discours de la vie parlementaire au Manitoba. (28) Inaugur馥 sous de tels auspices, l'harmonie se donne l'air de continuer. D鑚 cette premi鑽e session le parlement manitobain proc鐡e ? l'organisation de l'enseignement public; il le fait, avec un respect absolu de la constitution. L'organisme sup駻ieur de l'enseignement public ne sera rien d'autre qu'un conseil g駭駻al ou bureau, divis? en deux sections, l'une catholique, l'autre protestante. A chaque section, pourvue d'un surintendant, ressortiront l'administration et la direction des 馗oles de sa foi religieuse. Et ces 馗oles, publiques ou nationales, n'en seront pas moins confessionnelles, dot馥s des m麥es droits et des m麥es libert駸, avec part 馮ale aux fonds publics. (29) C'騁ait, d'un mot, le r馮ime de la libert? compl鑼e. Quelques lois subs駲uentes, celle de 1875, celle de 1881, modifieront la loi primitive, sans essentielle alt駻ation. Double section du Conseil, double organisme administratif, pleins pouvoirs de chaque confession pour le choix des livres de morale, l'enseignement de la religion, la nomination des instituteurs, des inpecteurs [sic] et des examinateurs, l'organisation des 馗oles normales, des arrondissements scolaires, l'駘ection des commissaires; pleine autorit? de ces commissaires sur le r?le de cotisation, la construction des 馗oles; obligation ? l'imp?t pour les seules 馗oles de sa foi; partage des octrois l馮islatifs au prorata de la population 馗oli鑽e. Bref, tous les droits et tous les privil鑒es l馮aux o? se fonde la libert? scolaire, (30) font l'essence de la l馮islation manitobaine et y restent incorpor駸 jusqu'en 1889. Loin de s'affaiblir, la situation de la minorit? catholique s'est, depuis 1870, affermie, puisqu'? ses droits et privil鑒es ant駻ieurs ? la Conf馘駻ation elle peut joindre d駸ormais tous ceux-l? que sa l馮islature lui a d騅olus.

Ce r馮ime de justice et de bonne entente avait-il quelque chance de longuement durer? Dans les premiers temps, on l'e?t pu croire, tant paraissait forte la position des catholiques. Avec une admirable pr騅oyance l'騅麭ue de Saint-Boniface a fait venir du Qu饕ec quelques jeunes hommes de talent, faits pour le r?le de chefs: MM. Joseph Dubuc, Joseph Royal, Marc Girard, Alphonse-A.-C. Larivi鑽e. Tr鑚 vite au premier rang dans la vie publique de leur province, leur prestige travailla pour la paix. Beaucoup n饌nmoins, parmi ceux qui avaient gard? souvenir des 騅駭ements de 1869 et de 1870, se d馭endaient mal d'inqui騁ude. Avec l'騅acuation du Fort-Garry par Louis Riel ne s'騁ait pas dissous le parti des turbulents. Et quel ph駭om鈩e inqui騁ant que l'effroyable crise de fanatisme d馗ha?n馥 par ce parti ? travers la Puissance? De ces passions furieuses si promptes ? s'allumer, si lentes ? s'騁eindre, o? chercher le mobile v駻itable? Quels sentiments profonds, quelle puissante coalition d'int駻黎s avait donc froiss駸 ou contrari駸 le soul钁ement de la Rivi鑽e-Rouge pour qu'une si forte partie de l'opinion anglo-canadienne se f?t emport馥 ? ce degr? d'effervescence? Les explosions de fanatisme antifran軋is ou anticatholique sont faits assez coutumiers dans l'histoire du Canada. Elles 馗latent comme des fi钁res p駻iodiques; et il n'est pas difficile d'en retracer les foyers infectieux. Les Orangemen se sont constitu駸 au Canada, comme chacun sait, les janissaires du protestantisme et du britannisme exalt駸. Deux terreurs, sinon deux haines, font en somme la vie de leurs loges: la haine du papisme, la terreur de la domination fran軋ise. Que le recensement d馗ennal r騅鑞e la moindre ascension num駻ique des Canadiens fran軋is et tout aussit?t surgit dans l'esprit des orangistes, une sorte d'駱ouvante, l'image d'un raz de mar馥 en voie de submerger la race anglo-canadienne. Partout, dans la vie publique, ils croient apercevoir la main du Pape, la main des 騅麭ues, tramant quelque hideux complot contre la supr駑atie anglo-protestante. Le ォ French Qu饕ec サ fait surtout leur cauchemar; et s'il leur appara?t un pays si arri駻? et si redoutable ? la fois, c'est qu'il est avant tout la ォ priest-ridden province サ. Parfois un rien suffit ? secouer tous ces pauvres gens de folles terreurs ou de col鑽es hyst駻iques. Pour une carte postale, un timbre bilingues, 駑is par Ottawa, pour une 駑ission fran軋ise ? la radio, pour deux mots de fran軋is aux portes d'un 馘ifice f馘駻al, on les a vus s'agiter, convoquer des ォ indignation meetings サ, comme si quelque main sacril鑒e avait hiss? le drapeau papal aux barri鑽es du Ch穰eau de Windsor ou sur la statue de Trafalgar Square. Sans doute, ces farouches appels ? la guerre sainte n'ont gu鑽e de prise sur la masse des Anglo-Canadiens cultiv駸. Ils restent le fait d'exalt駸 ou de politiciens sans scrupules habiles ? manier les simples, et qui, dans les loges, cherchent le plus souvent une client鑞e 駘ectorale. Trop de fois n饌nmoins, il faut bien le dire, ces appels r騏ssissent ? susciterdes mouvements d'opinion qui font remonter ? la surface les pires vagues de fond.

Ainsi arriva-t-il en 1869-70, lors des 騅駭ements de la Rivi鑽e-Rouge. On reste litt駻alement stup馭ait devant l'騁endue et la dur馥 de l'馗hauffement. C'est toute l'opinion anglo-canadienne qui para?t surexcit馥. Dans leur col鑽e, quelques journaux de Toronto et m麥e de Montr饌l s'馮arent jusqu'? injurier bassement l'騅麭ue pacificateur de Saint-Boniface. Ils lui prodiguent les 駱ith鑼es de ォ rus? サ et de ォ fourbe サ, de ォ tra?tre サ et de ォ d駘oyal サ ? l'Angleterre. Un autre ph駭om鈩e non moins extraordinaire, c'est la temp黎e de haines qui s'abat sur la t黎e du h駻os de la Rivi鑽e-Rouge, le m騁is fran軋is Louis Riel. Ces haines atteignent au paroxysme quand, pour faire respecter son gouvernement, le jeune chef fait ex馗uter au peloton un 駭ergum鈩e du ォ parti canadien サ du nom de Thomas Scott. On perd alors toute pond駻ation. Le grave gouvernement de l'Ontario inscrit ? son budget la somme de cinq mille piastres pour l'arrestation et le ch穰iment des meurtriers de Scott. Le gouvernement canadien qui, maintesfois et de la fa輟n la plus solennelle, a promis l'amnistie aux auteurs des troubles de la Rivi鑽e-Rouge, aime mieux renier sa parole que braver ce courant d'opinion. De si extraordinaires passions ne d駭oncent-elles pas leur origine? On songe, malgr? soi, au dualisme toujours aigu et persistant des races et des croyances. Et si de telles col鑽es poursuivent l'騅麭ue Tach? et Louis Riel, ne serait-ce point qu'elles veulent atteindre les deux hommes qui ont introduit dans l'ouest le dualisme abhorr? et lui ont fait d馗erner, par le parlement canadien, la supr麥e sauvegarde de la constitution?

De ce fanatisme extr麥e et tenace, tout pouvait faire craindre, au Manitoba, quelque retour offensif. Qu'un jour ou l'autre, le flot de l'immigration europ馥nne romp?t, au d騁riment des catholiques, l'駲uilibre du nombre, et la paix ne serait-elle pas un miracle? Le miracle n'eut pas lieu. De savantes approches pr駱arent l'assaut contre la minorit?. D鑚 1874 le r馮ime scolaire est en butte ? une attaque. En 1876 l'on s'en prend ? l'existence de la Chambre haute manitobaine. Par souci d'馗onomie, le gouvernement lib駻al d'Ottawa sollicite l'abolition de cette Chambre. Les catholiques y d騁iennent la majorit? d'une voix. La prudence leur conseille de ne point sacrifier leur plus solide protection. Mais leurs coll鑒ues anglo-protestants de la Chambre basse se r駱andent en instances; aux instances s'ajoutent les promesses, promesses d'un respect ind馭ectible du droit minoritaire. Les catholiques commettent la faute d'acquiescer ? ces supplications. (31) Moins de trois ans plus tard vient l'assaut contre la langue de la minorit?. La l馮islature supprime l'impression en langue fran軋ise des documents officiels, ne faisant exception que pour les statuts. C'est une violation flagrante de l'article 23 de la constitution manitobaine que seul r騏ssit ? emp鹹her le veto du lieutenant-gouverneur. (32) En 1888, nouvelle agression contre la loi scolaire. Jusque-l?, dans les diverses retouches qu'elle a subies, les deux principes de la confessionnalit? et de la dualit? administrative sont rest駸 saufs. En 1888, sous pr騁exte d'une surveillance administrative plus efficace, l'on enl钁e au Bureau d'馘ucation sa responsabilit? financi鑽e. L'ann馥 suivante l'audace s'accro?t; la section catholique poss鐡e un fonds de r駸erve qu'elle a pu constituer au prix d'馗onomies laborieuses. On l'en d駱ouille. La somme est peu consid駻able: 13,879ドル.47. Tondre la brebis du pauvre ne va pas d'ordinaire sans de plus noirs desseins. Ces desseins se d騅oilent l'ann馥 d'apr鑚.

Ici, reprenons l'histoire d'un peu plus haut. L'agression de 1890 se d馗ha?ne avec une telle virulence que, pour la bien entendre, il faut sortir du Manitoba et voir un peu ce qui se passe alors dans le reste du pays. La p駻iode de 1880 ? 1890 compte assur駑ent parmi les p駻iodes les plus agit馥s de l'histoire canadienne. A lire aujourd'hui quelques discours de l'駱oque, comme ? mesurer l'audace de certains projets, l'on cro?t r黐er, tant les passions s'expriment avec une sorte de fureur tragique. C'est aux environs de 1885, lors de l'insurrection des m騁is de la Saskatchewan, que se retrace, semble-t-il, l'origine de cette agitation extraordinaire. La r饌pparition de Louis Riel sur la sc鈩e de l'Ouest devait r騅eiller dans l'Ontario les col鑽es mal 騁eintes de 1870. D'autant que la population de langue fran軋ise allait manifester bruyamment ses sympathies ardentes pour la victime de l'馗hafaud de Regina. La guerre des races se ralluma. Dans le Qu饕ec un homme incarne, ? cette 駱oque, le nationalisme froiss? de ses compatriotes: Honor? Mercier. Les foules acclament comme une revanche son 駘oquence fi鑽e, tranchante, volontiers agressive. D駛? le point de mire des sectaires, Mercier le sera bien davantage lorsque, devenu premier ministre de sa province, il entreprendra de r馮ler la question des biens des J駸uites. En cette affaire n'a-t-il pas eu l'id馥 hardie de recourir ? l'arbitrage de L駮n XIII? A vrai dire l'appel au pontife n'offre rien de si mals饌nt. C'est l'acte d'un gouvernement en majorit? catholique, en un litige o? les parties appartiennent ? la foi catholique. Et d'honorables pr馗馘ents ne manquent point pour justifier la proc馘ure. En 1885, dans sa dispute avec l'Espagne, au sujet des Iles Caroline, Bismark, chancelier de Sa Majest? protestante l'empereur d'Allemagne, a sollicit? bien avant le catholique Mercier, la m馘iation du Pape de Rome. Et qui donc aurait trouv? ? se plaindre du r鑒lement de la question tel que fait par Mercier? Serait-ce par hasard la minorit? protestante du Qu饕ec? En d駱it de titres assez color駸 ? ces biens des J駸uites, elle s'est vu attribuer au partage un ch鑷ue de 60,000ドル qu'elle a gracieusement encaiss?. La loi Mercier a d'ailleurs paru si anodine, qu'elle a pass? sans le moindre bruit. ォ A l'exception du Gleaner d'Huntingdon サ, dira la Gazette de Montr饌l, ォ nous ne croyons pas qu'aucun journal, dans cette province ou dans d'autres provinces du Canada, se soit occup? de cette question. サ (33)Mais voici: un f稍heux hasard a voulu que le lieutenant-gouverneur du Qu饕ec ait sanctionn? la loi un 12 juillet. Dans le choix d'une pareille date, comment ne pas voir une intention de d馭i ? l'ordre d'Orange? Enfantillages! dira-t-on. Le Mail de Toronto n'est pas de cet avis et il n'admet point que la minorit? qu饕馗oise prenne la chose sur le ton paisible. ォ Si l'駘駑ent britannique et protestant du Qu饕ec ne veut pas se sauver lui-m麥e, dira-t-il, nous devons essayer de le sauver, dans notre propre int駻黎. サ (34) Aveu tout resplendissant de clart? si l'on ajoute que, pour bon nombre d'agitateurs, l'important est d'atteindre l'ancien rielliste Mercier? Pour une si grande fin, il importe peu qu'un nouveau d饕at acrimonieux soit jet? ? travers le pays. Au printemps de 1889 les amateurs de spectacles purent voir les plus farouches protagonistes de l'autonomie provinciale s'en aller demander au parlement f馘駻al le d駸aveu de ォ l'Acte concernant le r鑒lement des biens des J駸uites. サ Et quels hauts motifs feront valoir ces Messieurs? Ceux-ci entre autres, que la loi Mercier constitue, sur la vie politique d'une province canadienne, la mainmise d'un pouvoir 騁ranger, celui du Pape de Rome, et qu'elle gratifie d'une dotation, la Soci騁? de J駸us, ォ corps 騁ranger サ, lui aussi, ォ secret et politico-religieux サ expuls? de toute communaut? chr騁ienne, ォ pour son intol駻ance et son ing駻ence indue dans les affaires d'Etat . . . サ (35) Que d'autres repr駸ailles provoquerait le riellisme qu饕馗ois! En 1882 le parti conservateur de l'Ontario, sous la conduite de son chef William Ralph Meredith, s'est d駛? port? ? l'attaque des 馗oles s駱ar馥s de sa province. Les 騅駭ements de la Saskatchewan rallument cette guerre scolaire. Aux luttes 駘ectorales de 1886 et de 1890, Meredith fonce encore avec fureur sur la minorit? catholique. A ce moment le plan des gallophobes et des protestants agressifs se d騅oile en toute son ampleur: biffer le droit minoritaire catholique de toutes les constitutions provinciales; pourchasser la langue fran軋ise par tout le Canada, et jusqu'au parlement f馘駻al, tel est le but de ces 駭ergum鈩es. C'est en 1890, au cours d'un d饕at sur l'abolition de la langue fran軋ise au Nord-Ouest, que Dalton McCarthy, d駱ut? de Simcoe-Nord, l钁e le voile sur les ultimes espoirs de son groupe: ォ Je ne dis pas サ s'馗rie-t-il, ォ qu'un jour ne viendra pas o? il sera opportun de proposer l'abolition des deux langues dans cette Chambre . . . j'esp鑽e qu'avant longtemps la d駱utation de la province de l'Ontario demandera ? cette Chambre de l'aider ? faire dispara?tre de l'Acte de l'Am駻ique britannique du Nord, l'article concernant les 馗oles s駱ar馥s . . . サ (36) D駛?, dans une autre harangue, en dehors du parlement, McCarthy a trac? ce programme ? ses adeptes: ォ Occupons-nous d'abord des deux langues dans les territoires du Nord-Ouest et de l'enseignement du fran軋is dans les 馗oles des provinces anglaises; lorsque ces deux questions auront 騁? r馮l馥s, nous aurons fait quelque chose et aplani la route pour l'avenir. サ (37) Il va de soi que les discours o? s'agitent ces projets belliqueux sont d'une temp駻ature oratoire appropri馥. Les orateurs vont parfois jusqu'? de farouches appels ? la guerre civile. Le 12 juillet 1889, ? Stayner (Ontario), McCarthy, gris?, sans doute, d'enthousiasme orangiste, crie ? la foule: ォ Le temps est maintenant venu pour le peuple de d馗ider cette grande question (il s'agit de la suppression du fran軋is) au moyen de son bulletin de vote; si ce moyen ne rem馘ie pas au mal pendant la g駭駻ation actuelle, la prochaine y rem馘iera par la ba?onnette. サ (38) La fougue n'est ni moindre ni moins provocante en cette p駻oraison de M. Charlton, autre d駱ut? ontarien, lors du d饕at sur l'abolition de la langue fran軋ise au Nord-Ouest: ォ J'esp鑽e, disait-il, que les d駱ut駸 fran軋is nous pardonneront - si toutefois ils jugent n馗essaire de pardonner un sentiment qu'il ne peuvent partager, mais que les d駱ut駸 anglais de cette Chambre 駱rouvent - un sentiment d'orgueil qu'inspire l'histoire de l'empire britannique: sentiment qui leur fait 駱rouver du plaisir ? contempler le r駸ultat de la bataille des Plaines d'Abraham; sentiment qui les porte ? se r駛ouir des r駸ultats des batailles du Nil et de Trafalgar, ainsi que de Waterloo; sentiment qui leur fait voir avec orgueil les progr鑚 de l'empire britannique et qui leur inspire la conviction que les institutions anglaises sont les plus propres ? donner au genre humain la prosp駻it? et le bien-黎re . . . . J'esp鑽e M. l'orateur, qu'ils nous pardonneront d'avoir pour but avou?, de faire de ce pays un pays saxon. Le but avou? de l'Anglo-Saxon est de faire de sa race la plus grande race de la terre et l'espoir de l'Anglo-Saxon est que le jourviendra . . . o? la langue anglaise sera la langue de communication entre toutes les races . . . et o? la race anglaise sera la race dominante du monde . . . サ (39) Que des propos aussi enflamm駸 r駸onnent sous la vo?te du parlement f馘駻al, permet de juger de l'atmosph鑽e du pays. On en juge encore mieux lorsque, de la tranch馥 qu饕馗oise, avec plus d'駘騅ation dans l'esprit, mais avec une nettet? non moins cinglante, l'on entend Honor? Mercier jeter aux sectaires cette hautaine r駱lique: ォ Tout en protestant de notre respect et de notre amiti? envers les repr駸entants des autres races et des autres religions; tout en nous d馗larant pr黎s ? leur accorder leurs droits partout et toujours, dans toutes les occasions et en tout; tout en offrant de partager avec eux l'immense territoire et les richesses 駭ormes que la Providence nous a donn駸; tout en voulant vivre en parfaite harmonie avec eux, sous le drapeau de l'Angleterre et le sceptre d'une reine que nous aimons tous, nous d馗larons solennellement que jamais nous n'abdiquerons les droits qui nous sont garantis par les trait駸, les lois et la constitution. Les trait駸, les lois et la constitution nous garantissent le droit de rester catholiques et Fran軋is, et catholiques et Fran軋is nous resterons. Proclamons-le hautement afin qu'il n'y ait pas de fausses esp駻ances chez nos adversaires, afin qu'il n'y ait pas de faiblesses dans nos rangs. Les premi鑽es ann馥s de la Domination anglaise n'ont pu vaincre nos a?eux; les pers馗utions dont on nous menace aujourd'hui ne r騏ssiront pas mieux ? vaincre leurs descendants. Nous sommes maintenant deux millions et demi de Canadiens fran軋is en Am駻ique, fiers de notre pass?, forts dans le pr駸ent et confiants dans l'avenir: nous m駱risons les menaces de nos ennemis. サ (40)

On nous pardonnera ces citations peut-黎re un peu longues. Elles marquent l'騁at des esprits ? l'heure o? s'engage la pers馗ution scolaire au Manitoba. Elles font voir ? quels vastes plans cette pers馗ution se rattache. Ce n'est point pour leur inf駻iorit? p馘agogique qu'on s'attaque aux 馗oles de la minorit? manitobaine. En 1885, ? l'Exposition coloniale et indienne de Londres, elles ont figur? avec grand honneur. Le haut-commissaire canadien, Charles Tupper, ne leur a point m駭ag? son suffrage flatteur. La Canadian Gazette louait alors, dans le syst鑪e manitobain: ォ un syst鑪e d'馗oles qui, tout en respectant la foi et les convictions religieuses de la population, offre ? tout enfant une 馘ucation capable de le rendre propre ? occuper le rang le plus 駘ev? dans la soci騁?. サ (41) N'allons pas croire, non plus, si l'on met ? part les frasques de quelques agitateurs hargneux, que, dans l'Ouest, races et confessions religieuses passent leur temps ? se quereller ? propos d'馗oles. ォ Toutes les classes サ (de la population) dira bient?t M. Ewart, ォ avaient leur libert? d'action et s'en d馗laraient tout ? fait satisfaites, jusqu'? ce qu'elles fussent inform馥s en 1890 que cette libert? d'action leur manquait. サ (42) L'histoire est beaucoup plus simple. En 1889 le fourrier du sectarisme, Dalton McCarthy, a fait au Manitoba une tourn馥 oratoire. Au mois d'ao?t de cette ann馥-l?, dans un discours ? Portage-la-Prairie, McCarthy offrait en primeur aux sectaires de la jeune province, son programme d'action: ォ L'homme politique a une mission devant lui サ, disait-il. ォ Il lui appartient d'駱argner ? ce pays des luttes fratricides, de faire de ce pays un pays britannique de fait comme il est de nom . . . Il y a la question des 馗oles s駱ar馥s ici et dans le Nord-Ouest, et il y a la question des 馗oles fran軋ises dans l'Ontario; nous avons chacun de nous notre besogne taill馥 dans diff駻entes parties du pays; faisons cette besogne d'abord, avant d'aller plus loin, avant que les difficult駸 augmentent et que les droits acquis aient pouss? de plus fortes racines. サ (43) Ce jour-l?, sur l'estrade, se trouvait un aventurier politique qui allait recueillir fid鑞ement l'invite ou la consigne. En 1888, au cours d'une 駘ection partielle, le m麥e aventurier avait donn? sa parole, au nom du parti lib駻al, de ne jamais porter atteinte ni ? la langue ni au fran軋is. Dix-neuf mois plus tard, ? moins de 40 milles du lieu o? il avait prof駻? ces solennelles promesses, Joseph Martin, devenu procureur g駭駻al dans le cabinet Greenway, sollicitait l'aide des 駘ecteurs pour d馗hirer la loi scolaire du Manitoba. Peu 馗onome d'emphase th鰾trale, l'駭ergum鈩e jurait, ce jour-l?, de ne se laisser arr黎er par aucun obstacle: ォ Le parlement de la province peut 黎re contre nous; la Constitution peut 黎re contre nous; mais nous nous proposons d'en appeler au Parlement f馘駻al; en cas d'馗hec nous en appellerons au Parlement d'au-del? des mers. サ (44) McCarthy l'avait dit: il fallait se h穰er, avant que les droits acquis devinssent irr騅ocables. Les catholiques de race fran軋ise vont d'ailleurs porter la peine de leur faiblesse num駻ique. En d駱it d'un accroissement rapide: 5,767 穃es en 1870, 20,571 en 1890, ils ne forment d駛? plus qu'un septi鑪e de la population de la province. Pass? ? l'騁at de minorit?, le temps passait aussi pour eux du respect de leurs droits.

Le 12 mars 1890 a lieu l'ouverture des hostilit駸 au parlement de Winnipeg. Deux projets de loi de l'honorable Joseph Martin bouleversent de fond en comble l'ancien r馮ime scolaire. Au Conseil de l'Instruction publique ? double section se substituent un d駱artement d'馘ucation et un ォ Advisory Board サ uniquement ouverts ? des protestants. Proprement aboli, le syst鑪e des 馗oles s駱ar馥s fait place ? un syst鑪e d'馗oles dites nationales ou neutres. Le 31 mars, en d駱it de l'unanime r駸istance des d駱ut駸 catholiques, auxquels s'est jointe en bloc l'opposition conservatrice, le parlement de Winnipeg adopte les projets Martin. Le droit minoritaire avait v馗u. Choix des instituteurs, nominations des inspecteurs, r馘action des programmes, tout l'ensemble des privil鑒es qui d駻ivent du droit familial et font l'atmosph鑽e de l'馗ole, la minorit? catholique en est brutalement d駱ouill馥. En 馗hange jouirat-elle au moins de la neutralit? dont se targue le nouveau r馮ime scolaire? En cette neutralit?, l'archev麭ue de Saint-Boniface et M. John S. Ewart, (45) principal avocat des catholiques manitobains, ne voient qu'un d騁estable masque. A la condition de se conformer aux r鑒lements de l'Advisory Board, exercices et enseignement religieux restent tol駻駸. Mais il arrive que le programme en vigueur, pour l'instruction religieuse, n'est rien d'autre que le programme de l'ancienne section protestante du bureau d'馘ucation, programme qui n'a 騁? au reste, maintenu que sous la forte pression des protestants du Manitoba. (46) On tol鑽era aussi les exercices religieux, pourvu toutefois, et le mot en dit long, qu'ils soient d'un caract鑽e non sectarian. L'instituteur devra, en outre, ne rien souffrir, en cette mati鑽e, qui ne soit selon la volont? de l'Advisory Board; et il s'y engagera par serment et sous peine dune confiscation de l'octroi l馮islatif. Tout masque d馗hir?, les 馗oles nationales du Manitoba sont proprement des 馗oles protestantes. Non peut-黎re qu'elles soient telles de par la lettre de la loi; mais cette rencontre 騁range se produit que l'馗ole de la nouvelle l馮islation et l'馗ole protestante d'avant 1890 se ressemblent comme deux sueurs jumelles. Etrange neutralit?, en tout cas, que celle o? l'on ne trouve ? frapper que les catholiques, ? ne destituer que leurs inspecteurs, ? ne fermer que leurs 馗oles normales!

Que dire de quelques autres aspects des lois Martin? Violer le droit de propri騁?, faire main basse sur les imp?ts de provenance catholique, ne les fait gu鑽e reculer . (47) Car tous les pers馗uteurs se ressemblent par leur avidit?. Et il est rare qu'? la manie de la proscription ne se joigne la soif de la spoliation. La nouvelle taxe scolaire au Manitoba sera lev馥 d駸ormais sur la totalit? de la circonscription municipale, laquelle peut comprendre plusieurs arrondissements d'馗ole. Que, par scrupules de conscience, les catholiques refusent de convertir leurs 馗oles en 馗oles publiques, et les voil? priv駸 de leur part de la caisse commune, dans l'obligation de payer des imp?ts dont rien ne leur profite. En certains territoires, arrondissements catholiques et arrondissements protestants se comp駭騁raient, tout en gardant leur autonomie administrative. Les lois Martin suppriment cette autonomie au profit de l'arrondissement protestant et font passer ? ce dernier meubles et immeubles de l'autre. D鑚 1890 un trait de plume fait dispara?tre, dans la ville de Winnipeg, la commission scolaire catholique; et les parents catholiques sont contraints de verser leurs imp?ts pour des 馗oles o? ne fr駲uentent point leurs enfants. C'騁ait d駛? prendre avec le bien d'autrui, d'assez singuli鑽es libert駸. Les l馮istes de Winnipeg ne s'arr黎eront point ? ces proc馘駸 si proches de la confiscation. A l'馮ard des 馗oles insoumises, la suppression de l'octroi l馮islatif fut jug? insuffisante. Contre elles, il fallait aggraver les lois de 1890, interdire ? leur usage la lev馥 de tout imp?t municipal, puis, dans les districts r馭ractaires, d馗r騁er, au profit des 馗oles publiques, la confiscation pure et simple de toutes les propri騁駸 scolaires. Depuis quatre ans les opprim駸 avaient sollicit? justice et piti?. Promulgu馥s en 1894, ces derni鑽es lois draconiennes constituaient la r駱onse des pers馗uteurs.

L'on vient de voir ce qu'ils ont entrepris contre l'馗ole confessionnelle. En ravissant aux catholiques, de langue fran軋ise pour la grande majorit?, l'administration et la discipline de leurs 馗oles, le choix des livres, la r馘action des programmes, l'inspectorat, la formation des professeurs, les lois de 1890 ne pouvaient manquer d'atteindre, ne f?t-ce que par contre-coup, le caract鑽e national de l'enseignement. Telle fut bien la d駸astreuse cons駲uence. Pour dissiper d'ailleurs toute 駲uivoque sur les tendances de cette l馮islation oppressive, la veille du jour o? devait 黎re vot馥 la loi scolaire de 1890, le 18 mars, l'honorable Joseph Martin proposait I'abrogation des droits officiels de la langue fran軋ise au Manitoba. Seul馗happait ? la furie de l'agitateur, l'usage facultatif des deux dans les d饕ats parlementaires. Ce jour-l? une grande 駱reuve 騁ait r駸erv馥 aux Canadiens fran軋is. Pendant la bataille une minorit? anglaise avait noblement d馭endu le droit ? leurs c?t駸. Sur la question de langue, cette minorit? fit cause commune avec les briseurs de la constitution. Ainsi, vingt ans tout juste apr鑚 les 騅駭ements de 1870, des l馮islateurs n'h駸itaient pas ? fouler aux pieds les solennelles promesses faites au petit peuple de la Rivi鑽e-Rouge par le repr駸entant de la couronne britannique. La constitution manitobaine, texte sacr? d'un acte parlementaire, r騅ocable par le seul parlement imp駻ial, 騁ait odieusement viol馥, trait馥 avec plus de m駱ris que l'historique ォ chiffon de papier サ. Un protestant, le d駱ut? de Winnipeg, M. Hugh J. MacDonald, pourra dire ? la Chambre des Communes: ォ Le syst鑪e des 馗oles s駱ar馥s de cette province du Manitoba a 騁? aboli d'une mani鑽e barbare, brutale et cruelle. サ (48) Plus s騅鑽e encore, M. John S. Ewart, plaidant devant le Conseil priv? du Canada, laissera 馗happer cet aveu de souverain d馮o?t: ォ Je me reconnais tout? fait incapable de trouver une expression appropri馥. Je ne suppose pas qu'il soit possible de trouver dans l'histoire politique d'aucun pays civilis?, quelque chose qui soit si enti鑽ement et si irr駑issiblement bas, l稍he et sans coeur. サ (49)

- III -

La brutalit? de l'attaque affaiblirait-elle, chez les Fran軋is et les catholiques du Manitoba, la volont? de d馭ense? Ils sont l? un peuple minuscule de vingt mille 穃es, compos? presque enti鑽ement d'agriculteurs encore pauvres. Isol駸 dans l'Ouest immense, ont-ils quelque chance de faire entendre leur plainte ? travers le pays? Le Qu饕ec, la province-m鑽e, leur para?t bien loin, enfi騅r馥 du reste de querelles politiques. Pourtant, s'il se penche sur soi-m麥e, le petit peuple manitobain ne laisse pas de se d馗ouvrir un r馥l et solide vouloir-vivre. Il garde intacte la sourde vitalit? des groupes de sa race, les seuls qui r駸istent en Am駻ique ? l'enveloppement anglosaxon.Il peut compter sur une force encore plus rare: l'appui de chefs 駭ergiques, pleins de l'optimisme confiant des gens de l'Ouest, trop habitu駸 ? la lutte pour la craindre. Au premier rang figure un archev麭ue, v駭駻able vieillard, sans conteste l'un des plus grands coeurs qu'ait enfant駸 la race canadienne-fran軋ise. V駻itable p鑽e de son peuple, il joint ? cette majest? le prestige d'un saint. Pendant ces ann馥s trop f馗ondes en petitesses morales, par lui s'駘钁eront, de Saint-Boniface, pour la d馭ense du droit opprim?, les cris les plus nobles, les plus 駑ouvants qui aient remu? le pays. Il appartient en outre ? cette g駭駻ation d'騅麭ues venus du vieux Qu饕ec, hommes fiers, qui ont apport? avec eux, par tout le Canada, un sens incorruptible de la libert? et, par-dessus tout, un culte passionn? pour l'enseignement catholique et l'馗ole confessionnelle. Qu'est-il besoin de dire vers quel parti vont pencher les opprim駸?

Contre les lois spoliatrices trois moyens de d馭ense s'offrent ? eux: le veto du lieutenant-gouverneur de leur province; ? d馭aut de ce premier veto, le veto du gouvernement canadien, ou enfin quelque mesure r駱aratrice, en vertu de l'article 22 de la constitution manitobaine ou de l'article 93 de la charte f馘駻ative. Avec un ent黎ement magnifique, les catholiques manitobains vont entreprendre d'駱uiser tous les recours, toutes les juridictions. Aupr鑚 du lieutenant-gouverneur, l'騅麭ue de Saint-Boniface tente une d駑arche personnelle, mais pour n'obtenir qu'une rebuffade. M麥e r駱onse ? deux m駑oires de la d駱utation fran軋ise de Winnipeg. Au reste, pour marquer son parfait accord avec la politique de ses ministres, le lieutenant-gouverneur ne vient-il point de prononcer, en langue anglaise exclusivement, son discours de fin de session, rompant ainsi avec une tradition de vingt ann馥s? Force est donc de se replier vers le gouvernement canadien. La section catholique du Bureau d'馘ucation adresse une premi鑽e supplique aux autorit駸 f馘駻ales. Huit d駱ut駸 de la loyale opposition du parlement manitobain auxquels se joignent le s駭ateur Girard et M. LaRivi鑽e, M.P., en adressent une seconde. L'騅麭ue de Saint-Boniface, l'騅麭ue des Trois-Rivi鑽es, Mgr Lafl鐵he, ancien missionnaire de l'Ouest, viennent ? la rescousse. Un m駑oire de l'un et de l'autre appuie aupr鑚 du gouverneur g駭駻al, Lord Stanley, ainsi qu'aupr鑚 du secr騁aire d'Etat de la Puissance les suppliques des opprim駸. Bient?t tout l'駱iscopat catholique, d'Halifax ? Vancouver, (50) le cardinal Taschereau en t黎e, fait entendre sa voix. Voeu caract駻istique: le repr駸entant de la Couronne est pri? d'馗arter une ォ l馮islation qui imposerait ? une partie consid駻able des loyaux sujets de Sa Majest? la conviction qu'on a manqu? ? la foi publique. サ (51) Noterons-nous que ces diverses suppliques r騅鑞ent ? la lecture un assez grave d駸accord sur le mode de r駱arer l'injustice?

Elles h駸itent entre le d駸aveu et une mesure r駱aratrice. Et c'est qu'en effet le d駸accord existe assez gravement au fond des esprits sur l'opportunit? de s'adresser au gouvernement plut?t qu'au parlement. Il est s?r qu'? se m麝er de l'affaire le cabinet d'Ottawa ne laisse voir aucune h穰e d駻馮l馥. Et, ? vrai dire, quoi de plus explicable? De quelque fa輟n qu'il choisisse d'intervenir, il lui faut assumer une sorte de fonction judiciaire: fonction lourde, on le devine sans peine, ? des hommes politiques m麝駸 aux luttes de leur pays, surtout en des litiges aussi 駱ineux que les d饕ats scolaires. Que le jugement ? porter vise les actes d'amis ou d'adversaires politiques, dans un cas comme dans l'autre, comment esp駻er, d'hommes de parti, l'impartialit? rigoureuse ou la simple s駻駭it? d'esprit? D鑚 1867 les ォ P鑽es サ de la Conf馘駻ation eussent pu soup輟nner la d駘icatesse de la fonction dont ils investissaient le gouvernement f馘駻al. On s'en avisa en 1890. Et telle est l'origine de la r駸olution fameuse d'Edward Blake qui, pour am駘iorer la proc馘ure d'appel, allait aussi la compliquer. Eclair? par la r馗ente histoire des 馗oles du Nouveau-Brunswick, Blake - il est alors chef de l'opposition lib駻ale aux Communes d'Ottawa, - a bien discern? le p駻il de m麝er, en ces litiges troublants, la fonction judiciaire et la fonction politique. Le 29 avril 1890, moins d'un mois apr鑚 le vote des lois manitobaines, il propose donc que, pr饌lablement ? l'exercice de son pouvoir de d駸aveu ou de sa juridiction d'appel dans les litiges scolaires, le gouvernement prenne l'avis d'un haut tribunal de justice sur les questions de droit ou de fait m麝馥s ? ces litiges. Proposition sage, faite pour plaire ? un homme habile comme le premier ministre du temps, sir John A. MacDonald. Soucieux n饌nmoins de concilier la nouvelle proc馘ure et les textes constitutionnels, MacDonald qui accepte la proposition Blake, insiste toutefois sur le caract鑽e purement consultatif des futures d馗isions judiciaires. Il est bien entendu qu'elles ne sauraient ォ lier l'Ex馗utif サ. - ォ Je ne me propose pas サ, avait dit Blake, ォ de mettre l'Ex馗utif dans une position telle qu'il n'ait pas de devoirs ? remplir. サ Et MacDonald de ponctuer: ォ L'Ex馗utif n'est pas d馮ag? de toute responsabilit? par la r駱onse du tribunal . . . La r駱onse sera simplement pour l'information du gouvernement. Il se peut que le gouvernement n'approuve pas cette d馗ision et il pourra 黎re de son devoir de ne pas l'approuver, s'il n'accepte pas la conclusion ? laquelle le tribunal en est arriv?. サ Apparemment satisfaite de ces explications, la Chambre agr饌, d'un vote unanime, la r駸olution du chef de l'opposition. (52)

Esprit loyal, ce dernier n'avait s?rement en vue, ce jour-l?, ni manoeuvre ni int駻黎 de partisan. Jamais pourtant bou馥 de sauvetage n'騁ait venue s'offrir plus opportun駑ent aux deux partis politiques. La proposition Blake, MacDonald l'avait nettement d馗lar? en Chambre, ne pourrait devenir loi avant la session prochaine. Qu'騁ait-ce ? dire sinon qu'en l'intervalle, le d駘ai fix? par la constitution pour l'exercice du d駸aveu serait bel et bien expir?, et qu'? la veille des 駘ections g駭駻ales, il ne se pouvait plus merveilleux hasard? L'駱ineuse question, cauchemar des deux partis, se trouvait par l?-m麥e 馗art馥 de la bataille 駘ectorale, pour 黎re 馗art馥 ensuite des soucis du gouvernement, quel que f?t le parti au pouvoir.

C'est en cette atmosph鑽e d'ambigu?t駸 que les opprim駸 du Manitoba prennent le chemin du pr騁oire. Le gouvernement canadien se charge lui-m麥e de la premi鑽e 駱reuve judiciaire. A son instigation, un M. J. K. Barrett, catholique de Winnipeg, intente poursuite aux autorit駸 municipales de la capitale manitobaine; Barrett s'en prend aux r鑒lements de la municipalit?, ? la taxe scolaire unique, qui l'oblige lui, catholique et commissaire d'馗oles catholiques, ? payer pour le soutien d'馗oles protestantes. (53) Par cette cause-type, le gouvernement canadien se flatte de faire prononcer l'inconstitutionnalit? des lois de 1890, source des r鑒lements incrimin駸. Engag馥 uniquement autour du premier paragraphe de l'article 22 de la constitution manitobaine, c'est-?-dire autour des droits minoritaires ant駻ieurs ? 1870, l'駱reuve se termine, devant ce premier tribunal de Winnipeg, par une d馭aite de la minorit?. Les 馗oles catholiques d'avant 1870 n'auraient 騁?, ? tout prendre, opine le tribunal, que des 馗oles libres, vivant de leurs propres ressources, sans subventions de l'ノtat. Et comme les lois Martin n'emp鹹hent les catholiques ni d'騁ablir de semblables 馗oles, ni de les soutenir comme auparavant, ces lois ne violent donc en rien l'article 22 de la constitution de la province. M麥e d駭ouement de la cause Barrett devant un tribunal de seconde instance, pr駸id? celui-ci par trois juges. (54) Un de ces trois, M. Joseph Dubuc, a pourtant 駭onc? un jugement dissident. Et de ce jugement, un avocat anglais dira tout ? l'heure devant le Conseil Priv? d'Angleterre: ォ J'arrive maintenant au jugement le plus fort contre moi. サ (55) Dubuc assistait, en 1870, aux d駘ib駻ations du parlement d'Ottawa sur les affaires de l'Ouest. Ancien d駱ut? ? l'Assembl馥 l馮islative de Winnipeg, ancien membre du cabinet provincial, il a vot? au parlement de sa province la loi de libert? de 1871. Ni son exp駻ience, ni sa science juridique n'ont pu avoir raison de l'obstination de ses coll鑒ues. Quelques mois plus tard, revirement complet devant la Cour Supr麥e du Canada. A l'unanimit?, les juges Ritchie, Strong, Fournier, Taschereau et Patterson infirment les d馗isions des deux tribunaux de Winnipeg.

Bien qu'attendu, ce jugement n'馗late pas moins, dans le public, comme un coup de th鰾tre. Il s鑪e le d駸arroi dans le camp des pers馗uteurs qui d馗ident d'en infirmer co?te que co?te l'effet retentissant. Tout aussit?t une com馘ie judiciaire est imagin馥: un M. Logan, adepte de la religion anglicane, m鈩era ? son tour la municipalit? de Winnipeg devant les tribunaux pour obtenir, lui aussi, exemption de taxes ? l'馮ard des 馗oles publiques. Com馘ie judiciaire, avons-nous dit, mais, avant tout, rouerie de politiciens. Devant le Conseil priv? d'Angleterre, le procureur g駭駻al, Sir Richard Webster, s'en ouvrira sans m駭agements: ォ Je nie compl鑼ement que M. Logan soit un opposant bona fide . . . Il est ici et a 騁? envoy? ici par le gouvernement provincial, pour l'aider. サ (56) Personne n'ignore, en effet, que sous le r馮ime scolaire ant駻ieur ? 1890, toutes les sectes protestantes, sans excepter les anglicans, se sont montr馥s satisfaites du m麥e r馮ime scolaire. Dans le bureau g駭駻al de l'馘ucation elles n'ont form? qu'une section unique en face de la section catholique. Personne n'ignore, non plus, que, pour l'enseignement religieux, les nouvelles 馗oles publiques ne sont que l'exacte copie des anciennes 馗oles protestantes. (58) Mais qu'importent ces illogismes si la cour 駑et un jugement favorableaux anglicans? Le profit ne sera pas m馘iocre pour les politiciens, s'il leur est donn? de s'馗rier: les anglicans r馗lament les 馗oles s駱ar馥s; ils y ont droit, selon les tribunaux, au m麥e titre que les catholiques; pourquoi point, en ce cas, des 馗oles s駱ar馥s pour les presbyt駻iens, pour les m騁hodistes, pour toutes et chacune des sectes? Pourquoi point le caprice illimit?, l'anarchie g駭駻ale dans le domaine de l'enseignement public, le r?le de l'ノtat r馘uit ? n饌nt? . . . Il en fut comme on l'avait souhait?: la cour du Banc de la Reine du Manitoba donna gain de cause ? l'anglican Logan. Sur ce, la ville de Winnipeg, aid馥 et conseill馥 par le gouvernement manitobain, d馗ida de porter la cause Barrett et la cause Logan au tribunal supr麥e de l'empire, ? la section judiciaire du Conseil priv? d'Angleterre.

Le d饕at s'amplifiait. De cette nouvelle aventure, la minorit? catholique a-t-elle pleinement supput? les risques? L'駱oque durait encore de ce loyalisme, ? la fois touchant et colonial, qui faisait se tourner vers le haut tribunal de Londres comme vers le si鑒e de toute justice. Au Manitoba on se ber軋it d'un si confiant espoir que peut-黎re n馮ligea-t-on la prudence. C'est le 30 juillet 1892 que le Conseil priv? d'Angleterre rendit sa d馗ision. (59) Essayons de voir clair en cette pi鐵e judiciaire. Pour tenir le fil en cet 馗heveau assez emm麝?, rappelons-nous que le tribunal de Londres n'avait ? se prononcer que sur un point pr馗is: le premier paragraphe de l'article 22 de la constitution manitobaine, ou, si l'on veut, ォ l'騁at de choses existant en vertu de la coutume, au Manitoba, ? l'駱oque de l'Union サ a-t-il 騁? viol? par les lois de 1890? Il s'agit, en effet, d'un appel des tribunaux de Winnipeg et de la Cour supr麥e du Canada, lesquels n'ont eu ? d駘ib駻er que sur ce point particulier.

Les mots ォ par la coutume サ, expression capitale dans le texte constitutionnel, attirent d'abord l'attention du haut tribunal. Tout en se d馭endant d'駘aborer une d馭inition pr馗ise, Leurs Seigneuries ne laissent pas de s'y aventurer et s'en acquittent d'une fa輟n tout ? fait acceptable et d'excellent augure. ォ Ces mots サ, disent-elles, ォ ont sans doute 騁? introduits pour couvrir le cas sp馗ial d'un pays qui n'avait pas encore joui de la s馗urit? des lois proprement dites. サ Et ォ l'intention de la l馮islature (f馘駻ale) a d? 黎re de conserver tous les droits et privil鑒es et tous les avantages de la nature d'un droit ou privil鑒e dont jouissaient pratiquement toutes les classes de personnes ? l'駱oque de l'union. サ On ne pouvait souhaiter commentaire plus judicieux. Mais, ce r馮ime scolaire 騁abli et fix? par la coutume avant 1870, qu'騁ait-ce au juste? Sur ce point, Leurs Seigneuries s'en rapportaient b駭騅olement ? la description de l'archev麭ue Tach?: le r馮ime est en premier lieu un r馮ime ? base confessionnelle, soutenu ? la fois par les cotisations des parents et par les fonds des 馮lises; il est en plus un r馮ime d'馗oles s駱ar馥s, l'Eglise catholique et les sectes protestantes gardant, d'un c?t? comme de l'autre, sur leurs institutions, une autorit? pleinement autonome. ォ Les membres de l'Eglise catholique romaine サ, disaient encore Leurs Seigneuries, ォ soutenaient les 馗oles de leur propre Eglise pour le b駭馭ice des enfants catholiques romains, et ils n'騁aient pas tenus de contribuer et ne contribuaient pas au soutien des autres 馗oles. サ

D馗id駑ent tout allait pour le mieux. Puisque l'expression ォ par la coutume サ constituait en droit constitutionnel une sauvegarde effective et que, dans le domaine scolaire, la coutume d駸ignait au Manitoba, non un 騁at de choses fictif, mais d'authentiques privil鑒es et de v駻itables droits minoritaires, la conclusion paraissait in駘uctable: ces droits et privil鑒es jouissaient, en vertu du premier paragraphe de l'article 22 de la constitution manitobaine, d'une sorte d'intangibilit?; en cons駲uence toute l馮islation agressive devenait ultra vires ouinconstitutionnelle. La conclusion paraissait d'autant plus s'imposer qu'au jugement de Leurs Seigneuries, les lois Martin de 1890 avaient effectivement aboli au Manitoba les 馗oles s駱ar馥s. Pourtant, arriv駸 ? ce point de leur expos?, il semble que les honorables juges se soient soudainement repentis de tant de logique. Dans un brusque virage et par une s駻ie d'arguties ex馗ut馥s en voltige, ils s'駘ancent ? cette conclusion stup馭iante que les lois de 1890 ont laiss? intacts les droits et les privil鑒es de la minorit? catholique. L'騁ablissement d'un syst鑪e d'馗oles nationales, ? base de neutralit?, opinent-ils, n'offre rien d'incompatible avec l'existence d'馗oles confessionnelles et s駱ar馥s. La preuve en est, qu'en d駱it des lois Martin, la minorit? reste libre de conduire ses 馗oles selon ses principes religieux, libre aussi de les maintenir par ses souscriptions volontaires. Vous entendez bien? Et ? la v駻it?, quoi de plus clair? Et honni soit qui mal y pense? Ce qui frappe en ce raisonnement, c'en est s?rement la candeur, ? moins que ce ne soit autre chose. Qu'est-ce, en effet, que cette libert? que l'on proclame tr鑚 haut, et ? laquelle il ne manquera que d'黎re utilisable ? Qu'est-ce, aussi bien, que ce syst鑪e d'馗oles s駱ar馥s, rejet? en dehors de tout m馗anisme l馮al, libre de vivre pourvu qu'il le puisse en d駱it de la loi? Le raisonnement qui suit n'est pas moins simpliste. Tr鑚 bien, avaient dit les d馭enseurs de la minorit?: les deux syst鑪es peuvent exister l'un ? c?t? de l'autre; seulement il arrive ceci, qu'avant 1890 catholiques et anglicans n'avaient ? payer que pour un syst鑪e, le leur, et, qu'? tout prendre, payer deux taxes au lieu d'une, cela fait g駭駻alement quelque diff駻ence. Leurs Seigneuries ne se laissent point d馗oncerter par cette r馭lexion de bon sens. Inconv駭ient manifeste? r駱ondent-Elles. Mais ? qui la faute? A la loi? Au droit nouveau? Pourquoi pas plut?t ? la conscience, aux convictions religieuses des anglicans et des catholiques? Convictions infiniment respectables, se h穰e-t-on d'admettre; mais, en d馭initive, seules responsables de la r駱ugnance de ces minorit駸 religieuses ? user des 馗oles publiques.

On se r馗rie et l'on lit deux fois. D'une pareille th駮rie d駻ivait, en effet, cette cons駲uence assez inattendue qu'un article de constitution politique, en l'esp鐵e l'article 22 de la constitution manitobaine, r馘ig? express駑ent pour prot馮er une conception sp馗iale d'馗ole et certaines convictions religieuses, pouvait devenir illusoire, 黎re brutalement viol?, et que les 馗oles et les convictions, victimes du nouvel 騁at de choses, n'auraient ? s'en prendre qu'? elles-m麥es, ? leur manque de go?t pour l'injustice ou la spoliation. Encore n'est-ce point la seule part de l'騁range en ce jugement du Conseil Priv?. Sans discussion ni r馭utation motiv馥, d'un simple geste autoritaire, les graves juristes 馗artent le jugement unanime de la Cour supr麥e du Canada. S'ils se d馭endent de la moindre compromission avec les vis馥s politiques des lois pers馗utrices, ils ne s'駘钁ent pas moins avec hauteur contre ce qu'ils estiment les pr騁entions excessives de la minorit?. Ces pr騁entions 駲uivaudraient, selon leur dire, ? rendre impossible ou inefficace toute l馮islation scolaire, ? r馘uire m麥e ? n饌nt le r?le d'une l馮islature. Les nobles juges n'oublient qu'une chose: et c'est de d駑ontrer en quoi, pendant vingt ans, de 1870 ? 1890, la constitution du Manitoba a pu emp鹹her la l馮islature manitobaine de l馮if駻er efficacement en mati鑽e scolaire; en quoi 馮alement les m麥es restrictions constitutionnelles ont emp鹹h? d'autres provinces de se pourvoir d'un excellent syst鑪e d'enseignement public. Au reste, que venaient faire, en cette discussion juridique, l'opinion tendancieuse du Conseil priv? sur l'Etat ma?tre d'馗ole, l'aveu de ses pr馭駻ences pour l'馗ole publique? A quoi bon ces propos, assez 騁rangers au litige, qui se donnaient l'air de condamner tout l馮islation favorable au r馮ime de l'馗ole s駱ar馥, si m麥e, par ricochets, ils n'atteignaient point l'article 93 de la constitution canadienne, sauvegarde de quelques-unes de ces l馮islations scolaires? Il n'est nul besoin de dire, apr鑚 cela, que le Conseil priv? en tenait pour la constitutionnalit? des lois de 1890. Sur neuf juges canadiens, six, dont les cinq de la Cour supr麥e, avaient d馗lar? ultra vires, les lois Martin. Le Conseil priv? se rangeait ? l'avis des trois juges manitobains. ォ Jugement d駱lorable . . . comportant un terrible d駭i de justice, サ (60) devait s'馗rier en plein S駭at, en 1897, l'honorable M. Scott, alors secr騁aire dans le cabinet Laurier.

On devine l'駑otion des catholiques manitobains le jour o? le t駘馮raphe leur apporta la substance de cet extraordinaire jugement. Ils n'osaient en calculer les formidables cons駲uences. Le gouvernement, le parlement canadien lui-m麥e, ne se croiraient-ils pas li駸 par la sentence du supr麥e tribunal? Et n'騁ait-ce point la voie ferm馥 ? toute nouvelle proc馘ure, ? toute autre revendication? ォ Frapp駸 au coeur par ce coup de foudre d'autant plus cruel qu'il 騁ait inattendu サ, a 馗rit un Manitobain, ォ il nous semblait que le ciel 騁ait d'airain pour nous et nous 騁ions presque tent駸 de nous livrer ? des pens馥s de d駸esp駻ance. サ (61) A coup s?r de moins opini穰res eussent laiss? tomber le manche et la cogn馥. Mais nous avons dit quelles superbes r駸erves de volont? faisaient la force de ces opprim駸. L'exemple de l'駭ergie sereine leur vint encore de leur vieil 騅麭ue. ォ S'ensuit-il que nous acceptions ce fait extraordinaire comme une solution finale? サ, se demandait le vieillard, au lendemain de la grande 駱reuve. ォ Non サ, r駱ondait-il fi鑽ement. ォ Une question n'est r馮l馥 que quand elle l'est avec justice et 駲uit? . . . Le droit prime la loi, l'駲uit? vaut mieux que la l馮alit?. サ Fi鑽e attitude o? le peuple suit l'騅麭ue, si m麥e il ne le pr馗鐡e. Au lendemain des 騅駭ements de 1890, ce peuple s'est d駛? r騏ni en congr鑚 national pour affirmer sa volont? de r駸istance. Dans un nouveau congr鑚 qui suit la d馗ision du Conseil priv?, il avise ? d'autres moyens de d馭ense. Un dernier espoir subsiste. La minorit? a perdu la bataille sur le premier paragraphe de l'article 22 de la constitution. C'est ? ses droits scolaires ant駻ieurs ? 1870 et fond駸 sur la coutume que les tribunaux contestent la garantie constitutionnelle. D'autres droits demeurent en sa possession: ceux qu'elle tient de la l馮islation scolaire de sa province, droits post駻ieurs ? 1870. Pour ceux-l?, un supr麥e recours existe: le recours au minist鑽e f馘駻al et, par celui-ci, au parlement canadien. Et ce recours se fonde ? la fois sur les paragraphes 2 et 3 de l'article 22 de la constitution manitobaine et sur l'article 93 de la charte f馘駻ative. Ultime ressource que la minorit? n'entend point laisser 馗happer. Liant en faisceau l'ensemble de ses droits, les vaincus comme les autres, et forte de ce qu'elle estime une position invincible, elle adresse sa supplique au gouvernement d'Ottawa. (62) Et il semble que cette fois-ci les pronostics soient plus r馗onfortants. Le spectacle du courage est contagieux. A l'automne de 1892, la question des 馗oles du Manitoba prend l'ampleur d'une question nationale. L'opinion s'駑eut. De la province de Qu饕ec partent vers Ottawa des suppliques en faveur des pers馗ut駸. Sur un ton plus grave encore qu'en 1890, les 騅麭ues catholiques de la Puissance sollicitent de nouveau l'intervention du gouvernement f馘駻al. Jusque des milieux protestants, de puissants concours viennent s'offrir. W. F. Luxton a mis au service de la minorit?, le journal le plus influent de l'Ouest canadien: la Free Press de Winnipeg. En 1893 une voix s'駘钁e en faveur des opprim駸 et qu'on n'attendait gu鑽e en ce d饕at, celle de l'honorable William McDougall, l'ancien lieutenant-gouverneur si ti鐡ement accueilli jadis ? la Rivi鑽e-Rouge.

Chacun attend la r駱onse d'Ottawa. Le 9 juillet 1891 Sir John Thompson a pr駸ent? au parlement canadien un projet de loi destin? ? rev黎ir de la forme l馮ale la r駸olution Blake. (63) Sanctionn馥 le 30 septembre 1891, apr鑚 un vote unanime, la loi s'est appropri? le projet Blake, sans se priver toutefois d'en 駘argir quelque peu la teneur. (64) Le cabinet f馘駻al aura le loisir de soumettre ? la Cour supr麥e, non seulement les questions de droit ou de fait se rapportant aux conflits scolaires; il pourra en user de m麥e, ? discr騁ion, pour toute question litigieuse. Sur un point cependant, la loi respecte absolument la pens馥 de Blake: les d馗isions de la Cour ne lieront point l'ex馗utif. Ce sera donc sous les auspices de cet instrument l馮islatif, que le cabinet canadien se mettra ? l'examen des suppliques de la minorit? manitobaine. H駘as! le sort voudra que ces premi鑽es proc馘ures tra?nent ind馭iniment en longueur. Commenc馥s le 26 novembre 1892, elles n'aboutissent que le 31 juillet de l'ann馥 suivante. Ce m麥e jour un d馗ret minist駻iel d馭鑽e enfin la cause au tribunal de la Cour supr麥e. Et voici recommenc馥, pour la minorit?, la p駻illeuse aventure ? travers le pr騁oire. Cette fois-ci elle y va jouer son espoir ultime. Assez peu flatt馥 de son nouveau r?le, la Cour supr麥e se h穰e, elle aussi, lentement. Le cabinet lui a soumis six questions o? se d騁achent entre toutes les deux suivantes: le paragraphe 2 de l'article 22 de ォ l'Acte du Manitoba サ, ou le paragraphe 3 de l'article 93 de ォ l'Acte de l'Am駻ique britannique du Nord サ conf鑽ent-ils ? la minorit? manitobaine le droit d'appel au gouvernement f馘駻al? Ce droit d'appel se trouve-t-il 馗art? par la r馗ente d馗ision du Conseil priv? d'Angleterre? Huit mois plus tard, le 20 f騅rier 1894, la Cour supr麥e rend enfin son jugement. La premi鑽e d馗eption est de n'y point retrouver l'unanimit? de nagu鑽e. Une majorit? de trois juges sur cinq, majorit? de composition variable pour chaque cas, donne aux deux questions principales, une r駱onse n馮ative. D馗id駑ent, pour la minorit? manitobaine, l'imbroglio ne cessait plus de s'emm麝er. En effet, d'une part, on l'assure, qu'en d駱it de la d馗ision du Conseil priv?, son droit d'appel reste sauf; d'autre part, on lui dit que cet appel, ni la constitution manitobaine, ni la constitution canadienne ne l'autorisent. De nouveau le ciel se refaisait d'airain. Qu'esp駻er? Le cabinet canadien d馗ida de faciliter aux catholiques manitobains un nouvel appel au Conseil priv? d'Angleterre, de les y aider m麥e p馗uniairement. (65) Il fallut donc s'acheminer encore vers l'oracle londonnien.

En t黎e des catholiques qui accept鑽ent de porter l'appel au supr麥e tribunal, figurait un M. Gerald-F. Brophy. (66) D'o? le nom de cause Brophy donn? par l'histoire ? cet autre proc鑚. On saisit bien, croyons-nous, la diff駻ence entre ce second appel et le premier. Cette fois l'on laisse de c?t? la constitutionnalit? des lois de 1890. Le tribunal est pri? de r駱ondre ? ces deux seules questions: le deuxi鑪e paragraphe de l'article 22 de l'Acte du Manitoba autorise-t-il l'appel de la minorit? au gouvernement canadien? Le gouvernement canadien a-t-il juridiction voulue pour donner effet ? cet appel? Que la r駱onse du tribunal doive 黎re grosse de cons駲uences, il est bien inutile de l'affirmer. Il s'ensuivra ou la fin de l'agitation scolaire, ou un rebondissement nouveau qui la rejettera pour le coup sur un plan encore plus trouble: celui de la politique. On attendit encore un an tout proche. Enfin, le 29 janvier 1895, la section judiciaire du Conseil priv? pronon軋 son jugement. (67) La d馗ision de 1892 avait suscit? maintes pol駑iques, dont quelques-unes assez aigres. Aussi les honorables juges tiennent-ils ? faire savoir qu'ils sont au courant. Et ils se livrent d'abord ? un m駻itoire effort de logique pour justifier leur premier sentiment. En 1892, exposent-ils, les seuls droits invoqu駸 devant le Conseil priv? ont 騁? des droits minoritaires d'existence ant駻ieure ? 1870 et fond駸 uniquement sur la coutume. Tout autre s'offre aujourd'hui la requ黎e des catholiques manitobains. Il s'agit, cette fois, de droits positifs, 駑an駸 de la l馮islature de la province. C'騁ait laisser entendre une argumentation diff駻ente, dont se ressentirait peut-黎re la conclusion. En un judicieux parall鑞e le Conseil se h穰ait de comparer les deux situations de la minorit?: celle qui 騁ait la sienne avant 1890; celle que lui avaient faite les lois oppressives. Muni de ces clart駸, le haut tribunal n'h駸itait pas ? conclure: ォ En face d'une pareille situation, il ne semble pas possible de dire que les droits et les privil鑒es de la minorit? catholique romaine … n'ont pas re輹 d'atteinte サ. Phrase d馗isive qui, ? la v駻it?, tranchait tout. Que les lois de 1890 fussent constitutionnelles ou non, il importait peu, d鑚 lors qu'elles causaient pr駛udice aux droits des catholiques tels que d馭inis en leur requ黎e. La conclusion s'imposait et c'騁ait bien celle du tribunal: le 2e paragraphe de l'article 22 de la constitution manitobaine conf駻ait au gouvernement canadien le droit d'intervention.

Ce jugement apporta, il est superflu de le dire, grande joie aux opprim駸; grand aussi fut l'embarras du cabinet f馘駻al. En d駱it de toutes les voies de traverse o?, de bonne foi peut-黎re, ils l'avaient aiguill馥, voici qu'apr鑚 cinq ans, les politiques d'Ottawa voyaient revenir vers eux l'obs馘ante question. On comprit alors que la r駸olution Blake n'allait pas sans quelques inconv駭ients. Excellent en soi, le proc馘? exigeait toutefois qu'on l'accompagn穰 de diligence. Que les tribunaux se perdissent en d'interminables d駘ais, sans arriver ? disposer de l'駱ineuse affaire, et le danger c'騁ait qu'elle repar?t dans l'ar鈩e politique, mais grossie, escort馥, pour le coup, de toutes les passions ramass馥s en route. Ainsi advint-il pour la question manitobaine. Pendant que, dans les provinces anglaises, dans l'Ontario surtout, le sentiment orangiste, chaque jour plus 馗hauff?, se jetait du c?t? des pers馗uteurs, grossissait 駱erd?ment son cri de ォ Hands off Manitoba! サ, l'opinion qu饕馗oise, d馗oncert馥, ahurie par tant de retards et d'atermoiements, commen軋it ? douter de la bonne foi des gouvernants, les accusaient hautement de duplicit?.

Par deux fois d駛?, le cabinet f馘駻al s'est d馮ag?, trop habilement peut-黎re, de requ黎es en d駸aveu. Les premi鑽es lui 騁aient venues en 1890 et au printemps de 1891. Et l'on se rappelle que les unes et les autres s'accordaient assez peu sur la nature m麥e de l'aide quelles sollicitaient du gouvernement canadien. Impopulaire dans toutes les provinces, nulle part, peut-黎re, le veto f馘駻al ne l'est autant, ? cette 駱oque, qu'au Manitoba. Des interventions de ce genre contre ses lois de chemin de fer n'ont-elles pas d駛? conduit la jeune province ? deux doigts de la r騅olte? Le recours au d駸aveu, estiment en outre beaucoup de Manitobains catholiques, risque d'ali駭er ? la minorit? des concours pr馗ieux, tels que celui de M. Luxton de la Free Press de Winnipeg. A quoi bon d'ailleurs mettre en branle ce lourd m馗anisme, pensent quelques autres, quand il n'en peut r駸ulter pour les autorit駸 f馘駻ales qu'une s駻ie de d馗onvenues? Chacun sait que les lois pers馗utrices ? peine d駸avou馥s, il se trouvera ? Winnipeg une l馮islature pour les voter de nouveau et peut-黎re m麥e les aggraver, et qu'entre les deux gouvernements ce sera ainsi un jeu de ripostes o? le plus fort risque d'黎re le vaincu. (68) Quelques conseils, quelques discours des chefs politiques d'Ottawa sont-ils bien faits, du reste, pour inspirer confiance en l'intervention f馘駻ale, sous quelque forme qu'elle se produise? Un jour de 1896 que Sir Charles Tupper vante cette ressource de la charte f馘駻ative et croit y discerner une sup駻iorit? sur la constitution am駻icaine, M. Laurier riposte: ォ L'honorable ministre a pr騁endu que c'est un avantage. Je pr騁ends que c'est peut-黎re une grande erreur. サ (69) D駛? en 1891, Sir John Thompson glisse cet avis ? l'abb? C.-A. Beaudry, secr騁aire de Mgr Tach?: ォ Suivez d'abord le rem鐡e indiqu? par la constitution; et ce rem鐡e n'est pas le veto, mais l'appel au gouverneur g駭駻al en son conseil, apr鑚 que les proc馘ures l馮ales ont 騁? 駱uis馥s. サ (70) C'騁ait laisser pr騅oir assez clairement la conduite du cabinet ? l'馮ard des lois manitobaines. Le 21 mars de cette m麥e ann馥, Sir John Thompson dissuadait ses coll鑒ues de recourir au d駸aveu. (71) La cause Barrett 騁ait alors pendante devant la Cour supr麥e. Attendons la d馗ision du tribunal, opinait sir John, quitte, en cas de n馗essit?, ? nous rabattre sur l'intervention des autorit駸 f馘駻ales, le vrai rem鐡e constitutionnel en pareil cas. Trois ans passeront et de nouveau le cabinet d'Ottawa se trouvera aux prises avec une requ黎e en d駸aveu. La l馮islature manitobaine vient de voter ses lois aggravantes de 1894. Tout aussit?t une p騁ition solennelle sign馥 de l'駱iscopat canadien et quelques autres p騁itions venues d'un peu partout requi鑽ent le d駸aveu des lois audacieuses. (72) Ottawa fit encore la r駱onse par trop pr騅ue. En effet, sur quatre lois manitobaines soumises en 1890 ? la sanction du gouvernemenet canadien, dont l'une sur la quarantaine du b騁ail, une autre sur les compagnies ? fonds social, une troisi鑪e et une quatri鑪e contre les 馗oles s駱ar馥s et les droits officiels de la langue fran軋ise, ces deux derni鑽es seules ne s'騁aient pas attir? la d駸approbation du cabinet f馘駻al. (73) Puis, Ottawa s'騁ait souvenu opportun駑ent, sans doute, d'un cas analogue survenu en 1873, lors de l'affaire des 馗oles du Nouveau-Brunswick. A cas semblable n'y avait-il pas lieu d'appliquer le m麥e rem鐡e? Charles Hibbert Tupper, alors ministre de la Justice, informa donc la minorit? que les nouvelles lois ne diff駻aient pas substantiellement des lois de 1890, et qu'en jugeant celles-ci constitutionnelles, le Conseil priv? d'Angleterre avait par avance dispos? du d駸aveu ? l'馮ard de celles-l?. (74)

Cette r駱onse du ministre est du 5 f騅rier 1895. Elle suit de huit jours ? peine le deuxi鑪e jugement du Conseil priv? d'Angleterre. Fallait-il d駸esp駻er de toute forme d'intervention f馘駻ale? Ottawa voudrait-il exercer le droit que venait de lui reconna?tre le tribunal londonien? Dans le pays certaines appr馼ensions commen軋ient ? se r駱andre. Le cabinet parut vouloir les d駑entir. Il commen軋 par o? il fallait commencer. Point par point il suivit la proc馘ure 騁ablie par le paragraphe 4 de l'article 93. II entama des n馮ociations avec le gouvernement manitobain. Le 21 mars 1895 un ォ Arr黎? r駱arateur サ partait d'Ottawa pour Winnipeg. De forme mod駻馥, sinon d駱ourvue de solennit?, le document r騅鑞e un 騅ident souci: celui de d駸armer, par avance, au parlement d'Ottawa, l'opposition lib駻ale en 騅itant tout ce qui pourrait ressembler, m麥e de loin, ? une politique coercitive. L'ォ Arr黎鮟 n'exige nulle abrogation des lois incrimin馥s; il y propose tout au plus quelques correctifs, ou, ce qu'il appelle d'un terme encore plus radouci, un ォ compl駑ent サ. Entendons par l? la restitution ? la minorit? catholique de ses droits fondamentaux: droit de surveillance et de direction sur ses 馗oles, droit ? sa part des fonds publics, exemption de contribution ? d'autres 馗oles que les siennes. (75) Un d馗ret minist駻iel joint ? l'ォ Arr黎? r駱arateur サ accentue encore ce ton conciliant. Le gouvernement canadien y r饌ffirme sa volont? de respecter jusqu'? l'extr麥e limite l'autonomie provinciale.

A l'馮ard des gouvernants de Winnipeg, il y avait certes m駻ite ? cette profusion de m駭agements et d'amabilit駸. Le dernier jugement du Conseil priv? d'Angleterre 騁ait ? peine connu dans l'Ouest, que le cabinet Greenway, encore incertain des projets d'Ottawa, s'empressait de mettre sur les l钁res du lieutenant-gouverneur ces paroles officielles, assez proches du d馭i: ォ Dans tous les cas, ce n'est pas l'intention de mon gouvernement de revenir sur la d騁ermination bien arr黎馥 qu'il a prise de maintenir le syst鑪e actuel des 馗oles publiques . . .サ (76) Discours de bravade dont l'augure ne tromperait point. Aux premi鑽es ouvertures diplomatiques d'Ottawa, Winnipeg r駱ondit: ォ Nous sommes contraints de d馗larer respectueusement ? Votre Excellence que nous ne pouvons pas accepter la responsabilit? de mettre ? ex馗ution les ordonnances contenues dans l'Arr黎? r駱arateur. サ (77)

Refus d'ob駟ssance ne pouvait 黎re plus cat馮orique. Sous la rebuffade, le gouvernement f馘駻al va-t-il se cabrer? Arm? de sa supr麥e ressource constitutionnelle, va-t-il se tourner sans plus vers le parlement, lui soumettre une l馮islation r駱aratrice? Beaucoup, parmi ses amis, qui ne prenaient conseil que de sa dignit?, eussent d駸ir? et m麥e voulu ce geste viril. Mais le soup輟n de faiblesse para?t alors moins dangereux au cabinet d'Ottawa que le soup輟n de courage. Et, comme tous les faibles, avant d'agir, il aime se m駭ager des haltes ou du r駱it. Temporiser, renouer des n馮ociations avec le gouvernement manitobain, ajourner, ajourner le plus possible la l馮islation r駱aratrice, lui semble alors le dernier mot de la sagesse politique. Et c'est ainsi que, le 27 juillet 1895, un nouveau d馗ret minist駻iel s'en va vers Winnipeg. Le ton en est encore plus conciliant, si possible, que celui de l' ォ Arr黎? r駱arateur サ . Le cabinet abandonne cette fois le premi鑽e [sic] r?le dans les n馮ociations; il descend au rang d'humble suppliant et pour prier le gouvernement Greenway de formuler lui-m麥e sa propre solution. Document maladroit et d馗evant? Plus encore qu'une volont? r駸ign馥 ? d'ind馭inies concessions, chaque ligne trahit le supr麥e embarras du cabinet f馘駻al. (78) Il y appara?t soucieux d'馗happer par-dessus tout ? sa besogne de justicier, implorant presque le gouvernement manitobain de l'en d駘ivrer. ォ Document humiliant サ, ォ monument de b黎ise サ 馗rira de ce malheureux d馗ret, M. Auguste-R饌l Angers, ministre r馗emment d駑issionnaire. (79) A la vue du premier pouvoir du pays ainsi prostr? le gouvernement de Winnipeg se crut d駘ivr? de tout scrupule. Et, cette fois, en d駱it de son ton ordinaire de d馭i, la r駱onse parut presque ch穰iment m駻it?.

ォ Je crois devoir 駑ettre l'avis サ, 馗rivait M. Clifford Sifton, procureur g駭駻al du cabinet Greenway, ォ . . , que la proposition d'騁ablir, sous quelque forme que ce soit, un syst鑪e d'馗oles s駱ar馥s, soit positivement et d馭initivement rejet馥 . . . サ (80)

De l'avis du plus grand nombre, le cabinet f馘駻al vient de commettre l'une de ses plus grandes fautes: faute contre la minorit?, mais plus encore faute contre soi-m麥e. Il se peut que la situation n'offre rien de facile ? d駭ouer. Elle requiert, ? ce qu'il semble, plus de ressources d'esprit, plus de finesse diplomatique que le cabinet n'en peut fournir. Tout en s'acquittant, ? l'馮ard du droit minoritaire, de son r?le de protecteur, il lui faut contenir, apaiser l'aile orangiste de son parti, fanatiquement hostile aux 馗oles s駱ar馥s, toujours encline ? quelque frasque; plus rude encore la t稍he de d駸armer l'opposition lib駻ale, prompte ? s'馗hauffer pour la moindre atteinte ? l'autonomie provinciale, ou pour ce qu'il lui pla?t d'appeler de ce nom. De l?, dans les n馮ociations avec le gouvernement manitobain, l'usage de formules adoucies, point trop absolues, point trop offensantes, usage assez abondant pour 黎re immod駻?. Au surplus, inutiles compromissions o? l'on n'馗arte point les sautes d'humeur, les r馗riminations d'adversaires bien d騁ermin駸 ? n'黎re jamais satisfaits. La conciliation, le cabinet f馘駻al la pratiquera de la plus mauvaise mani鑽e possible qui est de se donner toutes les apparences de la faiblesse, sinon de la peur. Son attitude embarrass馥 et timor馥 ne d駸armera ni l'opposition lib駻ale ni le gouvernement manitobain, cependant qu'elle d騁achera de lui l'opinion des honn黎es gens, et voire ses propres partisans qui ne lui pardonneront point de se laisser aussi sottement humilier.

Il y a pis toutefois que ces erreurs de tactique. Et ce sont les mis鑽es d'o?, pour une grande part, elles proc鐡ent. Le parti conservateur d'Ottawa offrealors tous les sympt?mes de la d馗omposition. Son 騁at est celui de tous les partis qui ont d駱ass? la commune usure du pouvoir et qui fait que les grands partis meurent d'ordinaire sans grandeur. Alors qu'au parlement ne cesse de grandir une opposition combative, aguerrie, entra?n馥 par un chef 駘oquent, dou? de prestige, la vieille 駲uipe conservatrice ach钁e de s'駱uiser, sans qu'on voie surgir l'駲uipe de rel钁e. En moins de cinq ans, le cabinet et le parti auront cinq fois chang? de chef. A Sir John A. MacDonald, mort en 1891, a succ馘? Sir John Abbott, mort l'ann馥 d'apr鑚; ? ce dernier succ馘ait Sir John Thompson qui mourait ? son tour en 1894; successeur de Thompson, Sir MacKenzie Bowell laissait la place ? un autre en avril 1896. Le parti conservateur n'a pas 馗happ?, non plus au mal commun ? tous les partis d馗adents: l'indiscipline. D鑚 le d饕ut de la querelle scolaire, un fort groupe des conservateurs ontariens, entra?n? par Dalton McCarthy, s'est ouvertement solidaris? avec les pers馗uteurs. Plus tard, le Mail and Empire, le World, le Hamilton Spectator, organes accr馘it駸 du minist鑽e, adopteront la consigne lib駻ale du ォ Hands off Manitoba! サ La division r鑒ne au sein m麥e du cabinet; les coteries s'y affrontent, mettent quelquefois le public dans la confidence de leurs querelles. A l'heure m麥e o? le minist鑽e pr駱arait son ォ Arr黎? r駱arateur サ, n'a-t-on pas vu le contr?leur des douanes, M. Clarke Wallace, d駭oncer le document ? mots ? peine couverts devant les loges orangistes? Comme il va de soi, le groupe des ministres canadiens-fran軋is se ressent, lui aussi, de cet 騁at d'anarchie. A l'automne de 1895, il n'馗happe plus ? personne que les ministres qu饕馗ois ont perdu tout poids dans le minist鑽e, et qu'? la Chambre leur influence s'騅anouit sur leurs propres partisans. (81) Un homme gardait encore sur ses coll鑒ues du cabinet, un prestige incontest?, emp鹹hait les pires fautes, contenait l'esprit de division. Au lendemain du premier jugement du Conseil priv?, quand les chefs des deux partis inclinaient au geste de Pilate, il a fait plus que personne pour emp鹹her l'ensevelissement de la question scolaire, r駸erver au droit vaincu quelque moyen de revanche. Malheureusement le 8 juillet 1895 l'honorable Auguste-R饌l Angers, car c'est de lui qu'il s'agit, a quitt? le cabinet. Il l'a quitt? ? la veille du d馗ret minist駻iel qui a suivi l'ォ Arr黎? r駱arateur サ; et, de sa d駑ission, il a voulu faire une protestation contre l'humiliante politique du minist鑽e. Deux de ses coll鑒ues l'ont alors suivi, l'honorable Ald駻ic Ouimet et Sir A.-P. Caron. (82) A ce moment, peut-on dire, les d駱ut駸 conservateurs qu饕馗ois tenaient entre leurs mains le sort du minist鑽e. Quiconque et, f?t-ce M. Laurier, leur e?t propos? une action imm馘iate au parlement, les e?t ralli駸 ? l'unanimit?. Pour les trois ministres d駑issionnaires l'heure s'offrait donc opportune d'駱argner ? leur parti la faute irr駱arable. Appuy駸 sur le solide bloc de leurs partisans, ils n'avaient qu'? pers騅駻er dans leur attitude et, selon toute probabilit?, c'騁ait le funeste d馗ret remis? pour jamais, et c'騁ait aussi la loi r駱aratrice pr駸ent馥 au parlement d鑚 la session de 1895, et vot馥 par une imposante majorit?. Malheureusement, apr鑚 trois jours ? peine de mutinerie, MM. Caron et Ouimet rentraient au bercail, contrits et repentants. M. Laurier se gardait d'esquisser le geste de ralliement. Plus d駸orient駸 que jamais, les conservateurs qu饕馗ois continuaient ? se diviser.

On pense bien que, du parlement, ces querelles prolongent leur 馗ho dans la presse et parmi le peuple. Tr鑚 t?t, entre les hommes et les journaux de parti, la question scolaire a pris le r?le d'un ballon politique. Jamais querelles de presse et de tribune n'ont si ardemment s騅i qu'aux heures o? l'union s'imposait davantage. A la fin la confusion est telle dans les esprits que, sur le compte des partis et des chefs politiques, elle engendre le plus profond scepticisme. En 1891, le vieil archev麭ue de Saint-Boniface avait d駛? prononc? cette parole de supr麥e d駸enchantement: ォ Le parti qui nous rendra justice, ne le fera pas pour l'amour de la justice, mais parce que cela fera son affaire. サ (83) Combien profonde la d駸illusion lorsqu'aux tout premiers jours de 1896, on se trouverait en pr駸ence d'une seconde crise minist駻ielle! Le 2 janvier la session s'騁ait ouverte ? Ottawa. Trois jours plus tard, sept ministres de langue anglaise sortaient tapageusement du cabinet. (84) Dix longues journ馥s, la crise se prolongera pour prendre fin tant bien que mal, par l'entr馥 de Sir Charles Tupper dans le cabinet Bowell.

Mais enfin la session qui venait de s'ouvrir serait la session de la loi r駱aratrice. Annonc? dans le discours du tr?ne, le grand 騅駭ement en fit oublier quelques autres. Le 11 f騅rier le projet de loi subissait sa premi鑽e lecture. Couch? en 112 articles, il s'offrait comme une pi鐵e volumineuse. (85) L'article premier en d馭inissait nettement l'objet: r騁ablir en principe et en pratique les 馗oles s駱ar馥s au Manitoba. Bureau d'馘ucation, surintendant, syndics, choix de leurs instituteurs, choix aussi de leurs manuels, quoique avec certaines restrictions, exemption de cotisations pour d'autres 馗oles que les leurs, juste part et des taxes municipales et des allocations l馮islatives, les catholiques pourraient tout recouvrer. Que le projet, en sa r馘action primitive, pr黎穰 le flanc ? de faciles critiques, nul ne se le cachait. La difficult? apparemment insurmontable, inh駻ente d'ailleurs ? cette sorte de l馮islation, paraissait 黎re de faire fonctionner, sous un gouvernement de province r馗alcitrant, tout un organisme scolaire d'騁roite et naturelle d駱endance avec l'administration provinciale et municipale. Par cette collaboration forc馥 des divers pouvoirs, quelques articles de la loi cr饌ient de v駻itables nids ? litiges constitutionnels. Et l'on se disait qu'autre chose serait de faire voter la loi par le parlement f馘駻al et autre chose de la faire ex馗uter. O? trouver, par exemple, les ressources financi鑽es indispensables au fonctionnement de ce syst鑪e d'馗oles s駱ar馥s? Difficult? consid駻able qui avait longtemps arr黎? les r馘acteurs de la loi. Et si, par l'article 74, ils avaient reconnu aux catholiques leur part des allocations l馮islatives, le texte s'騁ait born? ? une affirmation th駮rique, tant le droit sup駻ieur des provinces ? la disposition de leurs deniers en avait impos?.

Pour imparfaite et chim駻ique qu'on veuille la faire, une particuli鑽e grandeur ne s'attache pas moins ? cette loi r駱aratrice, la plus importante, sans conteste, que le parlement canadien e?t discut馥 depuis la Conf馘駻ation, dira tout ? l'heure, ? l'ouverture du d饕at, Sir Charles Tupper. (86) A l'encontre de toutes les pr騁entions de l'unitarisme, elle affirme quelques-uns des principes qui sont ? la base m麥e de l'Etat canadien: le dualisme religieux du pays, la dignit? du droit minoritaire, la fonction tut駘aire du gouvernement f馘駻al ? l'馮ard de ces principes fondamentaux. Il faudrait m麥e dire davantage et qu'il s'agissait en ce projet de loi de 1896, du droit public canadien, ou, si l'on veut, du droit tout court, et de la volont? desautorit駸 supr麥es du pays de le sauvegarder. ォ Il ne s'agit pas d'馗oles s駱ar馥s サ, pourra dire le leader de la Chambre, ォ il s'agit de la constitution du pays サ. Puis, rappelant ? la majorit? l'imposante proportion des catholiques canadiens, est-il juste, continuera le m麥e orateur, ォ de laisser fermenter dans l'esprit de plus de 41 pour cent de la population totale du pays, l'opinion qu'un catholique ne peut obtenir du parlement de ce pays, la m麥e consid駻ation que s'il 騁ait protestant. サ (87)

Sur la valeur de la loi r駱aratrice, il est un sentiment, ce semble, qu'il convient d'interroger plus que tout autre: celui de la minorit?. Qu'en ont pens? les catholiques manitobains? Point capital, en effet, et sur lequel deux versions historiques ne furent jamais possibles. Il fut bient?t connu que les opprim駸 acceptaient la loi et l'acceptaient unanimement. Trois t駘馮rammes du nouvel archev麭ue de Saint-Boniface, Mgr Langevin, l'ont fait savoir ? la Chambre des Communes. (88) Ils l'acceptent parce qu'elle consacre ces deux principes: le principe des 馗oles s駱ar馥s, le principe de l'intervention f馘駻ale. Son approbation, l'archev麭ue l'a donn馥 apr鑚 avis favorable de ses coll鑒ues de l'駱iscopat canadien et de son clerg?, apr鑚 consultation des principaux juristes de son entourage, parmi lesquels les juges Prud'homme et Dubuc, l'avocat de la minorit?, le protestant John S. Ewart, et M. Prendergast. (89) Son dernier t駘馮ramme au Parlement, il l'a r馘ig? sous l'inspiration et presque sous la dict馥 d'un homme de grande sagesse, alors volontiers consult? par les hommes politiques, l'abb? Colin, sup駻ieur du S駑inaire Saint-Sulpice de Montr饌l. (90) A Saint-Boniface, pas plus qu'ailleurs, l'on ne se ferme les yeux sur les dangereuses lacunes, les multiples d馭ectuosit駸 du projet de loi. On n'ignore pas, non plus, que les amis intransigeants et qui en prennent ? leur aise parce qu'ils sont loin, pensent volontiers: ォ Mieux vaut la pers馗ution ouverte que le rem鐡e offert サ. A l'usage de ceux-l?, un personnage eccl駸iastique de Winnipeg r駸ume ainsi le sentiment, tel qu'autour de lui il l'entend s'exprimer: ォ Nombre d'amis bien pensants . . . croient qu'il faut accepter cette loi malgr? ses imperfections: 1. parce qu'elle consacre le principe des 馗oles s駱ar馥s, c'est-?-dire qu'on nous ouvre les portes de la Cit? sainte . . ., en nous reconnaissant le droit de citoyen, comme dirait Son Honneur le juge Dubuc . . .; 2. parce qu'en exigeant absolument ォ the last pound of flesh サ . . ., il y aurait un grand danger de tourner contre nous ceux qui d駛? ne nous sont favorables qu'? moiti?. サ ォ Ce n'est l?, me direz-vous サ, 馗rivait encore le m麥e eccl駸iastique, ォ que la moiti? du pain auquel vous avez droit. Oui, mais quand on est sur le point de mourir d'inanition et qu'on nous refuse le pain entier, ne vaut-il pas mieux accepter un demi-pain que de s'exposer ? tout perdre? . . . Sans l'Acte rem馘iateur, m麥e tel qu'il est, nous sommes perdus. Il n'y a pas ? se faire illusion, les habitants du pays sont trop pauvres pour supporter longtemps un syst鑪e double d'馗oles. サ (91) Enfin, et pour tout dire, les catholiques manitobains ne sont nullement d'avis que, pour 黎re imparfait, le projet de loi soit imperfectible, et que le parlement soit dans l'impuissance absolue de l'am駘iorer.

Mais qu'allait faire le parlement? Son premier souci serait-il de s'en rapporter au sentiment de la minorit? manitobaine? Ou voudrait-il 黎re de ces redresseurs de torts qui en tiennent opini穰rement pour leur rem鐡e, persuad駸 de conna?tre mieux que les pers馗ut駸, les besoins de ceux-ci? A la loi r駱aratrice 馗herrait au surplus ce premier malheur d'黎re discut馥 au moment le plus mal choisi. Elle viendrait devant un parlement moribond, ? la veille d'駘ections g駭駻ales, c'est-?-dire ? l'heure o?, pour les partis, la tendance est commune de tout subordonner ? la strat馮ie 駘ectorale. L'honorable Angers, sorti du cabinet en protestation contre l'ajournement de 1895, 馗rivait, d鑚 ce temps-l?, ? un ami: ォ Tout le monde ici est d'avis que l'ajournement est fatal, qu'il sera impossible en janvier de faire adopter une mesure qui accorde r馥llement des 馗oles s駱ar馥s aux catholiques du Manitoba. サ (92) Quelle pr騅ision juste! Il suffisait du moindre retard dans les d饕ats, d'un obstacle pr騅u ou impr騅u jet? en travers du m馗anisme parlementaire, pour que le projet de loi perd?t toute chance d'aboutir. La session de janvier enfin ouverte, le gouvernement va-t-il au moins se h穰er, mener les choses rondement? On commence par perdre deux mois en querelles intestines, compliqu馥s d'une crise minist駻ielle, en efforts d駸esp駻駸 pour rallier le gros des partisans. La Chambre n'abordera la seconde lecture du projet que le 3 mars, c'est-?-dire six semaines tout au plus avant la fin de l'existence l馮ale du parlement. A lui seul ce premier d饕at se prolonge jusqu'au 20 mars; et il arrive que le projet se heurte, d鑚 le d饕ut, ? une proposition radicale du chef de l'opposition: le renvoi ? six mois. Mauvais augure que viendrait accentuer la furie oratoire des d駱ut駸 de la gauche. D馗id駑ent l'on se jette dans une attaque ? fond qu'? tout prix l'on entend faire victorieuse. L'opposition groupe des forces multiples. Au premi鑽es lignes se rangent, comme il va de soi, les adversaires irr馘uctibles de l'馗ole s駱ar馥; ils en d駭oncent l'inutilit? ou la nuisance, comme si, en l'esp鐵e, il s'agissait non d'un droit constitutionnel, mais d'une th駮rie p馘agogique. Apr鑚 ceux-l? viennent les farouches protagonistes de l'autonomie provinciale, ceux qui repoussent toute forme d'intervention f馘駻ale et qui multiplient les hauts cris contre la politique coercitive du gouvernement, ou ce qu'ils appellent d'un ton m駘odramatique, la prise ? la gorge du Manitoba. D馘aignant ces th鑪es usag駸, d'autres, avec une vigueur plus habile, s'attaquent aux droits m麥es de la minorit?, mettent en doute l'efficacit? ou la constitutionnalit? de la loi r駱aratrice. Cette loi, que sera-t-elle autre chose qu'une semence de nouveaux troubles, une amorce ? de nouvelles et co?teuses promenades ? travers les pr騁oires? Et, comme d駭ouement fatal, on montrait les passions mauvaises grandissant ? travers le pays, et la situation des catholiques manitobains empir馥.

En d駱it de cette opposition habile et tenace, la seconde lecture du projet n'en recueille pas moins 112 voix contre 94. Mais c'est l'heure choisie par l'opposition pour d駑asquer ses batteries de r駸erve. Jusqu'alors la longueur des discours, longueur et lenteur trop manifestement calcul馥s, n'ont pas laiss? d'騅eiller quelques pressentiments. Avec l'騁ude du projet en comit?, tout se d騅oile. Contre la loi r駱aratrice, l'opposition aura recours ? la supr麥e tactique parlementaire: l'obstruction.

L'on n'attend pas que nous r駸umions ce d饕at qui fut moins un tournoi d'駘oquence qu'une lutte athl騁ique o? la victoire devait appartenir aux plus endurants, aux mieux muscl駸, aux mieux cuirass駸 contre l'駱uisement ou le sommeil. Pendant six jours et six nuits, les 駲uipes d'orateurs se relay鑽ent d'un bord ? l'autre de la Chambre, comme en deux tranch馥s ennemies, deux 駲uipes de sentinelles et de tirailleurs, cependant que toutes les 馗luses, toutes les cataractes oratoires ouvertes b饌ntes laissaient passer le flot. Les McCarthystes fournissaient 8 heures de parole, les lib駻aux anglais et fran軋is, 16. Six jours et six nuits la Chambre entendit de ces discours innombrables et incommensurables o? la phrase, le d騅eloppement s'allonge, dans la mesure o? la pens馥 se raccourcit. Rien ne put r駱rimer ce d馗ha?nement des grandes eaux, pas m麥e la menace d'une r駸istance sans merci, non plus que l'adjuration supr麥e de Sir Charles Tupper qui, devant les orateurs incontinents, invoquait le risque d'une telle lutte pour son grand 稟e: ォ Si c'est n馗essaire サ, leur cria-t-il un jour, en ces termes pr鑚, ォ la Chambre si馮era nuit et jour. Notre sant? pourra en souffrir, et des gens de mon 稟e jouent leur vie dans ces veilles continues, mais l'importance de la question justifie les plus grands sacrifices. Je suis pr黎 ? 駱uiser tout ce que je puis avoir de force physique en si馮eant ici nuit et jour, afin d'emporter la mesure. (93) De la part d'un leader de soixante-seize ans, c'騁ait engagement t駑駻aire. Le 15 avril les moulins ? paroles for軋ient le minist鑽e ? capituler. Il retira pratiquement son projet de loi pour se mettre au vote de cr馘its d'urgence. Huit jours plus tard, le 23 avril, deux jours avant leur mort l馮ale, les Chambres 騁aient dissoutes et les 駘ections fix馥s au 23 juin suivant. Selon une d馗laration faite en Chambre, d鑚 le 15 avril, par l'honorable Ald駻ic Ouimet, la question scolaire manitobaine serait port馥 devant l'駘ectorat. (94)

Sous quelle figure y vont appara?tre les deux partis? Ainsi qu'il arrive en toute session d'un parlement, la strat馮ie 駘ectorale inspirait, pour une bonne part, avons-nous dit, les derniers d饕ats. Comment expliquer d'autre fa輟n beaucoup des r駲uisitoires dirig駸 contre le minist鑽e? Quelle d駻ision, par exemple, que de lui reprocher son arrogance, ses proc馘駸 draconiens ? l'馮ard des autorit駸 de Winnipeg, quand il n'a march?, comme chacun sait, que le fouet dans le dos, apr鑚 un tel 駱uisement des essais de conciliation, qu'il en 騁ait sorti humili?, discr馘it? devant ses propres partisans! Les hommes, du reste, qui lui reprochent les proc馘駸 trop violents, sont les m麥es qui ont trouv? l' ォ Arr黎? r駱arateur サ de 1895 trop b駭in, insuffisamment imp駻atif. De m麥e, la sinc駻it? inspire-t-elle uniquement les cris de Home rule! Hands off! pouss駸 en faveur du Manitoba lorsque, dans la derni鑽e phase de la lutte, nul n'exige plus l'abrogation des lois de 1890, mais leur simple correction? A la rigueur s'agit-il d'autre chose que de laisser la constitution du pays suivre son cours? L'un des c?t駸 amusants du spectacle, c'est de voir parmi les plus v馼駑ents d駭onciateurs de l'intervention f馘駻ale, les McCarthystes, ceux-l? m麥e qui, en 1889, ont sollicit? contre le gouvernement Mercier l'intervention d'Ottawa. Aussi plaisant et suspect le reproche de pr馗ipitation fait au minist鑽e quand l'erreur irr駱arable aura 騁? sa lenteur ? se mouvoir, les trop longs pi騁inements d'une justice au pied bo?teux. (95)

Convenons-en: les critiques les moins faciles ? 馗arter sont celles qui visent le texte m麥e de la loi r駱aratrice, ses lacunes, sa constitutionnalit? douteuse. En devenaient-elles, pour autant, irr馭utables? Trop souvent l'on a raisonn?, au cours du d饕at, comme si, en face de cette loi, la Chambre se f?t trouv馥 d駱ourvue de son habituel pouvoir d'amendement. En fait, parmi les articles les plus sujets ? caution, celui qui devait r馮ler le choix des livres scolaires, n'a-t-il pas 騁? modifi? de fa輟n satisfaisante? (96) Et sans l'interruption du d饕at ? l'article 15, l'article 74, le plus discut? de tous et le plus discutable, n'e?t-il pas re輹, lui aussi, sa part de correction? Un refus de cr馘its 騁ait ? pr騅oir de la part de la Chambre de Winnipeg; et il s'agissait d'assurer, au point de vue financier, le fonctionnement des 馗oles de la minorit?. Or nul n'ignorait que M. Flavien Dupont, d駱ut? de Bagot, s'騁ait charg? de parer ? la difficult? par un amendement qu'il tenait en r駸erve et qui e?t mis ? la disposition du gouvernement f馘駻al le revenu des terres scolaires du Manitoba. (97) Sans doute, incertain de la constitutionnalit? de l'amendement, Sir Charles Tupper n'osa prendre, ? son 馮ard, d'engagement explicite; tout au plus exprima-t-il le regret que le parlement n'e?t pas eu le temps de l'騁udier. Mais le d駱ut? de Bagot se faisait fort, avait-il d馗lar? ? la Chambre, de cuirasser son amendement contre toutes les objections constitutionnelles; (98) et cette opinion l'honorable Ald駻ic Ouimet l'avait confirm馥 et m麥e d駱ass馥, en proclamant le droit cat馮orique des Chambres f馘駻ales ? disposer des revenus des terres scolaires du Manitoba en faveur des 馗oles de la minorit?. (99) Au reste, est-il s?r qu'on n'ait pas volontairement surfait l'importance de cet article 74? Les d駱ut駸 f馘駻aux connaissaient en tout cas, sur le sujet, pour l'avoir entendu citer devant eux, une d馗laration importante, celle du d駱ut? lib駻al de Saint-Boniface ? la Chambre de Winnipeg, M. Prendergast. Celui-ci venait de s'en expliquer en toute nettet? au parlement manitobain: nantis du droit de se taxer eux-m麥es, puis exempt駸 de la double taxe scolaire, ses coreligionnaires, avait-il dit, seraient en mesure de soutenir leurs 馗oles. Et M. Prendergast avait m麥e ajout? que, d駱ut? de la Chambre des Communes, il e?t vot? sans h駸itation la loi r駱aratrice. (100)

La grande faiblesse du gouvernement n'騁ait pas l?. Plus malais駑ent se d馭endait-il, devant l'駘ectorat, du reproche d'insinc駻it?. Les rivalit駸 de ses factions, rivalit駸 occasionn馥s, comme chacun savait, par la question scolaire; les frasques de son aile McCarthyste, les lenteurs, les retards impardonnables apport駸 ? l'oeuvre de justice, ont sem?, dans l'opinion publique, de mauvais germes de doute et de m馭iance. Une r駮rganisation tardive du cabinetvient de s'accomplir; Sir Mackenzie Bowell s'est effac? devant Sir Charles Tupper. Et nul motif s駻ieux ne permet de mettre en suspicion la sinc駻it? personnelle du nouveau chef. Le r?le que vient de tenir, ? l'馮ard de la loi r駱aratrice, l'ancien et temp騁ueux adversaire des 馗oles s駱ar馥s en Nouvelle-Ecosse, l'駭ergie d駱loy馥 par lui ? la faire accepter par son parti, et voire ses v馼駑entes philippiques ? l'adresse des dissidents du groupe McCarthyste, de tels discours ou de tels actes sont de ceux qui ont coutume d'騁ablir la bonne foi d'un homme public. (101) Mais, dans ce cabinet h穰ivement r駮rganis?, si l'on aper輟it ォ le seul homme サ qui, au jugement de M. Laurier, ォ avait apparemment du courage et des convictions サ, (102) M. Auguste-R饌l Angers, l'on y voit aussi l'un de ceux qui ont refus? de suivre M. Angers, jusqu'au bout, dans sa noble d駑ission de 1896. Plus que tout le reste, un incident survenu au cours de la derni鑽e session a profond駑ent discr馘it? le minist鑽e et rendu suspecte sa loyaut?. Au lendemain de la seconde lecture de la loi r駱aratrice ? la Chambre des Communes, n'a-t-on pas appris tout ? coup, le d駱art pour Winnipeg d'une nouvelle d駘馮ation? L'honorable Arthur R. Dickey, ministre de la justice, l'honorable Alphonse Desjardins, ministre de la milice, Sir Donald A. Smith, d駱ut? f馘駻al, 騁aient partis tenter une d駑arche supr麥e aupr鑚 du gouvernement Greenway. (103) La nouvelle cr饌 dans le public une sorte de stupeur. Que voulait dire cette nouvelle conf駻ence quand, ? Ottawa, le leader de la Chambre se donnait l'air de mener le d饕at ? grande vitesse, dispos? m麥e ? br?ler les 騁apes? Il para?t bien que le cabinet f馘駻al ne se r駸igna qu'avec une extr麥e r駱ugnance ? cette aventure. Il aurait eu la main forc馥 par Sir Donald Smith. Si on lui avait refus? sa d駘馮ation, Sir Donald aurait menac? de voter contre la deuxi鑪e lecture de la loi r駱aratrice, d'entra?ner m麥e dans sa d馭ection un bon nombre d'amis . (104) Il arriva n饌nmoins ce qui 騁ait facilement pr騅isible. Les d駘馮u駸 rapport鑽ent du Manitoba une nouvelle et 馗latante humiliation, humiliation que, pour le malheur du gouvernement f馘駻al, ils agr駑enteraient de quelques autres ennuis. L?-bas, ? Winnipeg, ils s'騁aient mis en t黎e d'improviser ? la h穰e un projet de r鑒lement; en veine de concessions, ils s'y 騁aient assez aventur駸 pour sacrifier quelque peu la loi r駱aratrice, 饕ranler quelques-uns de ses principes. La minorit? en 駱rouva un vif m馗ontentement; (105) et, dans le public, le soup輟n se r駱andit plus que jamais d'une politique ? double jeu.

Les adversaires ne se feront point faute de ramasser l? une arme dangereuse. Mais eux-m麥es apparaissent-ils en meilleure posture? Leur proposition de ォ renvoi ? six mois サ a fait pousser en quelques lieux les hauts cris d'indignation. Dans le Courrier du Canada, M. Thomas Chapais vient d'馗rire de l'acte de M. Laurier: ォ Cette attitude est celle d'un tra?tre サ. (106) L'obstruction syst駑atique au vote de la loi n'a pas caus? un moindre scandale. A quarante ans de distance et pour qui observe froidement cet 駱isode parlementaire, une question ? tout le moins vient ? l'esprit: le projet de loi de 1896 騁ait-il d'un caract鑽e si extraordinaire, mena軋it-il ? ce point les int駻黎s de la minorit? ou les int駻黎s g駭駻aux du pays, qu'il justifi穰 cette tactique extr麥e, d駸esp駻馥? Les conservateurs, disait-on, ne se livraient qu'? une parade, ? une feinte. Au fond, l'馗hec de la loi r駱aratrice 騁ait chose fatale et pr騅ue; et le seul but des ma?tres du pouvoir 騁ait de se faire, pour les prochaines 駘ections, un engin 駘ectoral. Co?te que co?te, opinaient donc les lib駻aux, il fallait leur briser dans les mains cet engin redoutable. A quoi les conservateurs ripostaient, et apparemment avec autant de raison, que l'馗hec de la loi servirait tout aussi bien les int駻黎s de l'opposition. Apr鑚 tout, d駭oncer ? son aise, dans la province de Qu饕ec, la longue et coupable inertie du gouvernement; dans les provinces anglaises, se poser en champions de l'autonomie des provinces, n'騁ait-ce pas se m駭ager pour soi-m麥e un espoir 駘ectoral aussi prometteur?

Le chef lib駻al en tient, quant ? lui, pour une nouvelle enqu黎e. Et l'objet de cette enqu黎e, il s'en explique dans sa correspondance plus nettement qu'? la Chambre, serait d'馗lairer les protestants sur la l馮itimit? d'un enseignement dogmatique ? l'馗ole catholique, puis sur l'騁endue des promesses prodigu馥s ? la minorit? avant et apr鑚 l'entr馥 du Manitoba dans la Conf馘駻ation. (107) Mais vraiment l'homme politique 馗happe-t-il ici ? toute illusion? Tant de discussions dans la presse, dans les tribunaux, dans les parlements, discussions reprises et condens馥s depuis six ans en une foule de brochures, laissent-elles encore sur ces deux points, dans les esprits loyaux, de si imp駭騁rables obscurit駸? En un m駑oire destin? aux autorit駸 romaines, M. Laurier justifiait, par de moins faibles raisons, la tactique de son parti: ォ Si le parlement avait adopt? ce Bill ou tout autre semblable サ, 馗rivait-il, ォ la province du Manitoba en aurait certainement contest? la validit? et il s'en serait suivi une longue p駻iode d'agitation et de tourmente au grand d騁riment de la minorit? catholique dans les autres provinces; la croyance que toute l馮islation de ce genre n'apporterait pas un r鑒lement final dans la question justifiait amplement l'opposition que le parti lib駻al fit au bill du gouvernement. サ (108)

Ce jour-l? encore, l'homme politique livrait-il le v駻itable fond de sa pens馥? Et cette pens馥, au cours de ces ann馥s agit馥s et en ces querelles ardues et subtiles, o? prend-elle son point d'appui? Et d'abord y a-t-il lieu de se poser la question? Le chef lib駻al n'a rien, comme chacun sait, des esprits tranch駸, dogmatiques, habitu駸 ? lier leur conscience ou leur action ? des principes inflexibles. Ses habitudes d'esprit, pour ne pas dire sa doctrine, sont pr馗is駑ent de ne se lier ? aucun syst鑪e d'id馥s, ? rien de trop rigide ou de trop rigoureux. Le relatif, l'opportunisme, lui font plut?t son climat intellectuel. On lui a fait une telle r駱utation d'intelligence et d'駘oquence qu'on a fini par y voir la raison de son prestige et de son immense popularit?. On oublie qu'il avait l'intelligence plus 騁endue et souple que solide et cultiv馥; et que l'駘oquence fut, chez lui, plus parlementaire que populaire. Ce serait se tromper tout aussi gravement que d'attribuer ses qualit駸 de chef ? sa force morale ou ? la fermet? imp駻ieuse de la volont?. Il a trop de souplesse et d'ondoiement dans l'esprit pour n'en avoir pas dans le caract鑽e. Sa v駻itable puissance est ailleurs. Elle est dans son d駸int駻essement, je veux dire, chez ce passionn? de la gloire, une 駘騅ation d'穃e qui lui inspire un m駱ris absolu des gains ou des succ鑚 d'argent. Sa puissance est encore dans son habilet?, habilet? proche quelquefois de la virtuosit?, par quoi il excelle ? humer le vent, ? s'emparer des courants d'opinion pour les suivre en les dirigeant. A une connaissance merveilleuse des hommes, il sait aussi joindre l'art de les conqu駻ir et de les manier. Capable au besoin d'駭ergie et de d馗ision, il met son orgueil et presque une sorte de coquetterie ? ne jamais commander o? il lui suffit de persuader. Sa puissance de chef, pourquoi ne pas dire qu'il la tient aussi et tout d'abord de l'ensemble de sa personne, de sa haute taille, du port de sa t黎e, de son masque subtil et fin, de l'aur駮le de sa chevelure o? d駛? se dessine le nimbe de la renomm馥: le tout composant ? l'homme un magn騁isme v駻itable, 駑anation d'une personnalit? s馘uisante, faite toutefois pour 黎re aim馥, admir馥 plut?t qu'ob駟e? On rapporte qu'au sortir d'un entretien avec le chef lib駻al, l'archev麭ue de Saint-Boniface, Mgr Langevin, aurait dit ? cette 駱oque de 1896: ォ Je n'y retourne plus; il est en train de m'ensorceler サ. Le mot est vraisemblable s'il n'est point vrai. Avec ce tour d'esprit, on voit un peu n饌nmoins comment se comportera la pens馥 de l'homme ? l'馮ard d'un probl鑪e complexe, tel que celui des races et des croyances au Canada; et l'on pressent, en particulier, tout ce qu'il y appara?tra d'ind馗is et de vacillant, en face des probl鑪es scolaires, les plus d駘icats et les plus passionn駸 de tous ceux qui se posent en un pays mixte. Au reste, fra?chement 駑ancip? du radicalisme, le chef accepte malais駑ent, en ce domaine, les directives 駱iscopales dont le dogmatisme l'effraie. En Chambre n'a-t-il pas d馗lar? r馗emment que, sur cette question des 馗oles du Manitoba, il ne permettrait ? aucun chef de son Eglise de lui dicter une ligne de conduite? ォ Tant que j'occuperai un si鑒e en cette Chambre サ, a-t-il encore dit, ォ tant que j'occuperai le poste que j'occupe, chaque fois qu'il sera de mon devoir de prendre une position sur une question quelconque, cette position je la prendrai, non pas au point de vue du catholicisme, non pas au point de vue du protestantisme, mais je la prendrai pour des motifs qui peuvent s'adresser aux consciences de tous les hommes, ind駱endamment de leur foi, pour des motifs qui peuvent animer tous les hommes aimant la justice, la libert? et la tol駻ance. サ (109) Se sent-il li? davantage du c?t? de la constitution canadienne? Les garanties de l'article 93, 駘ev馥s si haut par d'autres, lui inspirent-elles autre chose qu'un d駸olant scepticisme? Encore en ce d饕at qui vient de prendre fin, n'a-t-il pas qualifi? de ォ grande erreur サ probable, l'acte des constituants de 1867, accordant aux autorit駸 f馘駻ales le droit d'intervenir dans la l馮islation des provinces? A la rigueur peut-黎re lui arrive-t-il de garder encore quelque foi en l'opportunit? du rem鐡e constitutionnel; mais sa foi est une foi travaill馥 de m馭iances et de doutes; et l'usage du rem鐡e s'entoure pour lui de conditions si multiples et si menues qu'il cesse ou presque d'黎re pratique. (110)

Au moment de para?tre devant le peuple, l'attitude du chef lib駻al se ressentira de cette h駸itation ou de ce balancement. (111) A Qu饕ec, en juin 1896, l'on croit tenir de lui un engagement formel. Parvenu au pouvoir, il r鑒lera ォ cette question サ, promet-il, ォ ? la satisfaction de toutes les parties int駻ess馥s . . . サ Pour collaborateur, il s'adjoindra Sir Oliver Mowat, champion de la minorit? catholique de l'Ontario. Il y aura nouvelle conf駻ence, ォ o? les int駻黎s en p駻il seront repr駸ent駸 サ ; puis, en fin de compte, ォ si la conciliation ne r騏ssit point サ, aurait-il ajout?, ォ j'aurai ? exercer ce recours constitutionnel que fournit la loi, recours que j'exercerai complet et entier. サ (112) Promesse claire, d馗isive, si elle avait quelque chance d'authenticit?. Par malheur, ainsi le veut la tradition, la finale de l'orateur ne serait pas de lui; elle serait l'oeuvre d'un ami politique qui, estimant trop r騁icentes les promesses de son chef, y aurait ajout? cette valable ponctuation. De ce discours ou de cet engagement, Sir Oliver Mowat donnerait d'ailleurs, quelques mois plus tard, une autre version, o? la variante, assez consid駻able, se rapprocherait davantage de la v駻it?. (M. Laurier) ォ d馗lara サ, affirmait Sir Oliver, ォ qu'il 騁ait pr馭駻able d'accepter presque n'importe quelle mesure d'obtention possible, sans faire appel ? la coercition, que d'obtenir un r鑒lement plus satisfaisant par le recours ? la violence. サ (113)

Tels sont bien les deux partis et les deux attitudes entre lesquels le peuple aurait ? se prononcer. De quel c?t? pencherait le Qu饕ec catholique et fran軋is? Vers lui l'on se tourne comme vers l'arbitre dont d駱endra le sort de la minorit?; mais l'on ne se d馭end point de beaucoup d'inqui騁ude. De Saint-Boniface, le juge Dubuc 馗rit ? un ami de la vieille province: ォ Comment la Province de Qu饕ec va-t-elle la r駸oudre (la question scolaire) ? Nous appr馼endons beaucoup le r駸ultat. Que Dieu nous aide. サ (114) A ce moment critique, les 騅麭ues voulurent intervenir une derni鑽e fois. C'騁ait, pour eux, estimaient-ils, non seulement exercer un droit, mais remplir un devoir sacr?. Et, ce devoir leur enjoignait, ? ce qu'il leur parut, non pas de r馗lamer vaguement justice pour la minorit?, mais d'indiquer le moyen de lui obtenir justice. ォ C'est pourquoi サ, disaient-ils, ォ tous les catholiques ne devront accorder leur suffrage qu'aux candidats qui s'engageront formellement et solennellement ? voter, au Parlement, en faveur d'une l馮islation rendant ? la minorit? catholique du Manitoba les droits scolaires qui lui sont reconnus par l'Honorable Conseil Priv? d'Angleterre. Ce grave devoir s'impose ? tout bon catholique et vous ne seriez justifiables ni devant vos guides spirituels ni devant Dieu lui-m麥e de forfaire ? cette obligation: サ Une fois cette directive formul馥, quelques 騅麭ues en donn鑽ent-ils une interpr騁ation tendancieuse? Se seraient-ils donn? l'air de pencher pour un parti plus que pour l'autre? On le crut; et de bons esprits le leur ont m麥e durement reproch?, oubliant qu'en cette m麝馥 politique et en cette lutte scolaire ou s'affront鑽ent tant de ruses et d'hypocrisies, ces hommes d'Eglise furent les seuls ou peu s'en faut, ? rester pers騅駻amment fid鑞es ? la cause du droit et ? la d馭ense du faible. ォ Les politiciens サ, s'馗riera l'un d'eux, ォ peuvent avoir int駻黎 ? voir dispara?tre cette question de l'ar麩e politique et plus d'un voudrait s'en d饕arrasser, mais nous, les 騅麭ues . . . nous ne l'abandonnerons pas avant qu'elle ne soit r馮l馥 dans la justice. サ (115)

Alors, entre les deux partis, la lutte s'engagea, lutte hom駻iquede souque ? la corde, chacun s'effor軋nt de tirer de son c?t?, pour s'en faire un drapeau, les directives 駱iscopales. O? les 駘ecteurs exig鑽ent des engagements formels, tous les engagements possibles furent donn駸. Ceux-l? m麥e qui songeaient le moins ? tenir, promirent sans retenue et sign鑽ent tout ce que l'on voulut. En cette profusion de promesses et de serments lyriques, il restait ? voir comment l'駘ectorat qu饕馗ois se d駑麝erait. L'esprit populaire est grand simplificateur. Entre un parti qui promettait tout, mais avait peu tenu, et l'autre qui, n'ayant pas eu l'occasion de tenir, promettait aussi vigoureusement, le peuple opta pour le dernier.

Wilfrid Laurier devint premier ministre. Il le devint par sa province: le Qu饕ec lui apportant le vote d馗isif: trente-trois voix de majorit?, cependant que la majorit? totale de son parti ne d駱assait pas trente-cinq. Le vote catholique avait parl? de m麥e fa輟n par toute la puissance. Sur 66 catholiques qui si馮eraient au nouveau parlement, 45 porteraient l'騁iquette lib駻ale.

- IV -

Je me h穰e d'abr馮er. Par quelle voie, par quel moyen, le nouveau chef du gouvernement choisira-t-il de rendre justice ? la minorit?? Spontan駑ent Mgr Langevin lui offre son concours. D鑚 le 9 juillet 1896, l'archev麭ue 馗rit au nouveau premier ministre: ォ Puisque le repr駸entant de Sa Majest? vous appelle ? former un Cabinet . . ., je tiens ? vous assurer de mon profond respect et de mon sinc鑽e d駸ir de traiter avec vous comme je l'ai fait avec les hommes de l'autre gouvernement. Nous sommes des hommes d'ordre et l'autorit? est toujours sacr馥 pour nous. Pour ce qui est de la grave question des 馗oles, nous ferons en sorte de faciliter par tous les moyens possibles un r鑒lement heureux de cette difficult?, et ? Dieu ne plaise que nous refusions jamais de seconder franchement votre bonne volont?. サ (116) En de nobles paroles, Sir Charles Tupper fait le m麥e geste, au lendemain des 駘ections, puis ? l'ouverture du nouveau parlement, au moins d'ao?t 1896. ォ Je puis assurer l'honorable chef de la droite サ, dira Sir Charles en cette derni鑽e circonstance, ォ que non seulement je lui souhaite de tout coeur de r騏ssir ? r馮ler heureusement et promptement cette importante question, mais que tout ce que je pourrai faire pour la m麥e fin, sera fait en tout temps avec le plus grand plaisir . . . Tant que j'aurai l'honneur de si馮er dans cette Chambre . . . je n'h駸ite aucunement ? d馗larer que je serai toujours fid鑞e au principe qui est la condition fondamentale de la prosp駻it?, du progr鑚 et de l'avancement du Canada. Ce principe, c'est que tous, sans distinction de race ou de religion, soient convaincus qu'il n'y a qu'une loi, qu'un seul droit, qu'une seule justice pour la protection de ceux dont les int駻黎s peuvent 黎re mis en danger. サ (117)

Devant l'heureux premier ministre, toutes les voies semblent donc s'aplanir. Au parlement sa majorit? est constitu馥 par le groupe des lib駻aux du Qu饕ec, solennellement li駸 ? un r鑒lement de justice. A Winnipeg, plus heureux que ses pr馘馗esseurs, il pourra mener les n馮ociations, non pas avec un gouvernement hostile, acharn? ? multiplier les embarras, mais avec des amis politiques. Et voil? pour favoriser singuli鑽ement l'駱reuve victorieuse des sunny ways, si chers ? l'ancien chef de l'opposition. Pourtant de vagues appr馼ensions courent dans le public. L'on s'y souvient de la r駱ugnance du chef lib駻al ? l'exercice des recours constitutionnels. L'on n'a pas oubli?, non plus, le flottement de ses promesses 駘ectorales, moins fermes dans les provinces anglaises que dans le Qu饕ec. Sur ces entrefaites, ? l'騁? de 1896, l'honorable Isra?l Tarte, l'un des membres du cabinet Laurier, s'en va reprendre ? Winnipeg des n馮ociations d駛? entam馥s dans la capitale canadienne. (118) Quelques sympt?mes d駻outants se produisent. L'on avait promis une conf駻ence de toutes les parties int駻ess馥s. La principale int駻ess馥, la minorit? manitobaine, est 馗art馥 des n馮ociations. (119) Pendant son s駛our ? Winnipeg, le d駘馮u? du gouvernement Laurier prononce quelques discours; ses envol馥s oratoires sur les beaut駸 de l'馗ole nationale, sur les avantages de la co馘ucation des enfants catholiques et protestants, sur la futilit? des divergences religieuses, purs ォ accidents de la vie サ, donnent ? songer. (120) Soudain, le 20 novembre 1896, la presse re輟it communication d'un document coiff? de ce titre: M駑oire pour le r鑒lement de la question des 馗oles. C'est le texte impatiemment attendu, le texte du r鑒lement bient?t connu dans l'histoire canadienne, sous le nom de ォ R鑒lement Laurier-Greenway サ. Qu'y trouve-t-on? Trois s駻ies de dispositifs: les uns qui r馮lementent l'enseignement religieux, d'autres, l'emploi de ma?tres catholiques, un autre enfin, l'enseignement de la langue maternelle dans les 馗oles de la minorit?. L'enseignement religieux est r騁abli, mais soumis ? d'assez nombreuses conditions: fr駲uentation pour les 馗oles rurales, d'au moins dix enfants de la m麥e confession religieuse; pour les 馗oles de ville ou village, d'au moins 25 enfants; p騁ition pr饌lable des parents ou des tuteurs aupr鑚 des commissaires, requ駻ant cet enseignement; heure sp馗iale fix馥 ? la le輟n de cat馗hisme, soit, entre trois heures et demie et quatre heures de l'apr鑚-midi, sous la direction d'un membre du clerg? ou d'une personne autoris馥; o? le local s'y pr黎era, s駱aration des enfants pour la demi-heure de l'enseignement religieux. Sur requ黎e encore des parents ou des tuteurs, un instituteur catholique au moins pourra 黎re accord? aux 馗oles urbaines fr駲uent馥s par quarante enfants catholiques; le m麥e privil鑒e s'騁endra aux 馗oles de campagne ou de village fr駲uent馥s par au moins vingt-cinq enfants. Un seul article dispose bri钁ement de l'enseignement, non du fran軋is, comme on le crut d'abord, mais de la langue maternelle. Dans les 馗oles fr駲uent馥s par dix enfants parlant le fran軋is ou une autre langue que l'anglais, l'enseignement pourra 黎re donn? en anglais et dans la langue maternelle, d'apr鑚 le syst鑪e bilingue.

La presse lib駻ale, il va de soi, accueillit le document comme un acte lib駻ateur, une pi鐵e de haute sagesse politique. Partout ailleurs il 騅eilla de la stupeur. On se souvenait qu'un grand parti politique avait combattu l'ォ Arr黎? r駱arateur サ de 1895, puis la loi r駱aratrice de 1896, pour ce motif particulier que l'un et l'autre accordaient trop peu ? la minorit?. Or ce R鑒lement Laurier-Greenway dont on scrutait les termes, l'on d馗ouvrait qu'il donnait moins que l' ォ Arr黎? r駱arateur サ, moins que la loi r駱aratrice, moins encore que le projet de r鑒lement de la d駘馮ation Smith-Dickey-Desjardins. Avec lui c'騁ait proprement l'abandon des droits constitutionnels de la minorit?, du principe des 馗oles s駱ar馥s, l'abandon de leur autonomie administrative et p馘agogique. En retour, le nouveau R鑒lement offrait aux catholiques quelques miettes de libert?, d'une libert? instable, sans le moindre appui dans la constitution, ? la merci des caprices des politiciens. Aux fils des d馗ouvreurs de l'Ouest, le R鑒lement r駸ervait une autre humiliation non moins sensible: celle de voir leur langue, hier encore l'une des deux langues officielles de leur parlement et l'une des deux langues nationales de l'Etat canadien, rel馮u馥 par Ottawa au m麥e rang que les idiomes des nouveaux immigr駸. Car, ? parler net, ce que le R鑒lement assure dans les 馗oles fr駲uent馥s par un certain nombre d'enfants de langue fran軋is, ce n'est pas m麥e l'enseignement du fran軋is, mais l'enseignement en fran軋is; c'est-?-dire l'usage de la langue maternelle, comme simple m騁hode p馘agogique, pour mieux apprendre l'anglais. (121) C'騁ait faire ? la langue fran軋ise, une situation aussi p駻illeuse qu'humiliante, l'exposer ? se voir expulser des 馗oles, quelque jour prochain, aussi fatalement que toute autre langue des nouveaux venus.

Il faut le dire en toute justice: M. Laurier jugea d'abord son oeuvre sans vaine complaisance. A la session de 1897 le discours du tr?ne parlera de ce R鑒lement comme du ォ meilleur qu'il f?t possible d'obtenir dans l'騁at o? s'en trouvait cette question irritante. サ Quelques jours plus tard, en r駱onse ? une interpellation de Sir Charles Tupper, le premier ministre fera cette autre d馗laration: ォ Je peux ajouter que ce r鑒lement n'est pas aussi avantageux que je l'aurais d駸ir?; mais je n'h駸ite pas ? dire qu'apr鑚 une agitation qui a dur? six longues ann馥s o? les passions humaines furent excit馥s au plus haut degr?, il 騁ait impossible d'obtenir plus, et, dans les circonstances, le gouvernement du Manitoba ne pouvait accorder davantage. サ (122)

Ce plaidoyer pro domo serait-il accueilli favorablement par la minorit? et l'opinion? Si l'on avait escompt? la r駸ignation ou le silence des opprim駸, on fut bien d騁romp?. Dans toutes les localit駸 du Manitoba o? vivait un noyau de catholiques, un concert de protestations s'駘eva aussit?t contre le pr騁endu R鑒lement. A cet 駑oi de ses compatriotes, l'ancien surintendant des 馗oles catholiques, M. Bernier, donna, de son si鑒e au S駭at, une expression singuli鑽ement 駘oquente: ォ Que l'on ne nous parle point d'acceptation ou d'essai sous prot黎 サ, d馗lara-t-il. ォ Maintenant que la bataille est bien engag馥, il est mieux pour tout le monde qu'elle aille jusqu'au bout . . . C'est notre intention de la continuer . . . C'est d'abord pour l'穃e de nos enfants que nous la livrons; mais nous luttons aussi pour la pr駸ervation des privil鑒es constitutionnels de chacune des provinces du Dominion. Par-dessus tout nous combattons pour le maintien du r鑒ne de J駸us-Christ dans notre patrie. La crise actuelle est d'une importance plus que locale. Il semble que nous soyons au tournant d'un mouvement social d'une gravit? d馗isive au Canada. Le christianisme restera-t-il la r鑒le supr麥e de la vie publique et priv馥 dans ce pays? . . . Cette lutte est un devoir sacr?; c'est un apostolat, et j'esp鑽e qu'avec la gr稍e de Dieu, la minorit? catholique du Manitoba n'y faillira jamais. サ (123) Non moins ferme la protestation de l'archev麭ue de Saint-Boniface qui attendit ? peine les vingt-quatre heures pour d駭oncer le R鑒lement Laurier-Greenway. En quelques phrases de son 駘oquence tranch馥, br?lante, facilement dramatique, il s'馗riera du haut de la chaire de sa cath馘rale: ォ C'est aujourd'hui le jour le plus triste de ma carri鑽e 駱iscopale . . . Je proteste de toutes mes forces contre l'emploi de ce mot r鑒lement . . . Nous sommes peu nombreux et nous sommes pauvres? Ce n'est pas une raison pour insulter ? notre mis鑽e . . . Maintenant, il me reste ? prendre la direction de nos 馗oles. Je ne suis pas un homme de parti; je suis un 騅麭ue avant tout . . . J'ai pris comme devise: ォ Depositum custodi サ. Et je ne l'oublierai jamais, duss?-je combattre toujours. Si je faiblissais, les ombres de Mgr Provencher, de Mgr Tach?, auraient le droit de se dresser devant moi. サ (124)

Beaucoup d'騅麭ues du Qu饕ec font 馗ho ? ces protestations. Et comme les journaux lib駻aux s'insurgent, les 騅麭ues n'h駸itent pas ? en interdire la lecture. L'un de ces journaux le Cultivateur, aurait perdu en quelques jours, pas moins de 1,500 de ses abonn駸. (125) Redoutant l'agitation grandissante, le chef lib駻al tente de l'enrayer par un appel au Pape. D駛?, en octobre 1896, (126) une p騁ition ? L駮n XIII, sign馥 de quarante-cinq d駱ut駸 et s駭ateurs lib駻aux, a sollicit? l'intervention de Rome contre l'ing駻ence de quelques membres du clerg? dans les 駘ections. (127) A quelque temps de l?, des missions officieuses et officielles se mettent en route vers la Ville-Eternelle. Quelques 騅麭ues canadiens entreprennent aussi le m麥e voyage. D'un c?t? comme de l'autre, quoique de fa輟n diverse et avec des espoirs diff駻ents, l'on d駸ire une intervention du chef de l'Eglise. Le 25 novembre 1896, Mgr Langevin 馗rivait au cardinal Ledochowski, pr馭et de la Propagande: ォ Une lettre Encyclique du Saint-P鑽e serait le salut de nos 馗oles et j'oserai dire le salut de la province de Qu饕ec qu'un faux patriotisme ou un esprit de partisannerie outr? . . . peuvent entra?ner dans une tr鑚 mauvaise voie . . . サ (128)

L駮n XIII prit le parti d'envoyer un d駘馮u? enqu黎er sur place. Ce d駘馮u?, M. Laurier l'a souhait? de naissance et d'馘ucation anglaises, au courant des institutions parlementaires britanniques, familier avec les deux langues du pays. (129) Le choix de L駮n XIII tomba sur un jeune pr駘at qui r騏nissait ces qualit駸. Arriv? ? la fin de mars 1897, Mgr Merry del Val fit un s駛our de trois mois au Canada. En son grand d駸ir d'un succ鑚 diplomatique, il se donna pour t稍he d'obtenir tout de suite quelque am駘ioration au sort de la minorit?. M. Laurier pr黎a ses bons offices. Les n馮ociations furent reprises avec le gouvernement Greenway et, pour un moment, dans le ciel depuis si longtemps charg? d'orage, l'on crut voir se lever l'arc-en-ciel prometteur. De passage ? Ottawa, les hommes de Winnipeg accept鑽ent le projet d'un nouveau r鑒lement, beaucoup plus g駭駻eux que le premier; ils s'engag鑽ent m麥e aussit?t rentr駸 chez eux, ? valider l'entente par d馗ret minist駻iel. Pour parer ? tout malentendu, Mgr Merry del Val, aux concessions promises, avait obtenu l'assentiment pr饌lable des catholiques du Manitoba. Bref, il n'y avait plus qu'? chanter victoire; et, tout r駛oui et confiant, M. Laurier annon軋it par lettre au cardinal Rampolla, la bonne nouvelle de ce premier triomphe. Puis, les hommes de Winnipeg repartirent pour l'ouest; l'on attendit le d馗ret promis, et rien ne vint. Vainement aux sunny ways, le cabinet d'Ottawa joignit des moyens de persuasion plus 駭ergiques, refusa m麥e de verser au gouvernement manitobain une somme de 300,000,ドル r馗lam馥 par celui-ci. Rien n'y fit. (130) Gravement d鱸u, l'envoy? papal n'avait plus qu'? s'embarquer pour le voyage de retour: ce qu'il fit apr鑚 avoir annonc? que la parole serait maintenant au Pontife supr麥e.

Le 8 d馗embre 1897 paraissait la Lettre encyclique Affari vos, adress馥 aux archev麭ues, aux 騅麭ues et aux ordinaires de la Conf馘駻ation canadienne. En termes mesur駸, L駮n XIII distribuait ? peu pr鑚 馮alement le bl穃e et l'approbation aux catholiques et au gouvernement canadien. Le Pape d駭on軋it l'馗ole neutre, rappelait la doctrine de l'ノglise sur la n馗essit? de l'馘ucation morale et de l'enseignement catholique, regrettait la d駸union des catholiques canadiens dans la d馭ense de ces graves int駻黎s; puis suivait une formelle condamnation du R鑒lement Laurier-Greenway: ォ Nous ne pouvons toutefois dissimuler la v駻it?: la loi que l'on a faite dans un but de r駱aration, est d馭ectueuse, imparfaite, insuffisante . . . C'est beaucoup plus que les catholiques demandent et qu'ils ont, personne n'en doute, le droit de demander . . . Pour tout dire, en un mot, il n'a pas 騁? suffisamment pourvu aux droits des catholiques et ? l'馘ucation de nos enfants au Manitoba. サ L駮n XIII tra軋it, en terminant, une ligne de conduite aux catholiques de la Puissance et aux catholiques du Manitoba. Ceux-l?, l'union refaite entre eux et conseill駸 par leurs 騅麭ues, auraient ? pr駱arer la revanche des ォ principes immuables et sacr駸 サ de l'馘ucation chr騁ienne; ceux-ci, en attendant le plein triomphe de leurs revendications, auraient le devoir de ne point refuser les satisfactions partielles, partout o? le mal pourrait 黎re att駭u?, quittes ? soutenir ailleurs leurs propres 馗oles "par un redoublement de g駭駻euselib駻alit?. サ (131)

La lettre pontificale vint clore un chapitre des luttes scolaires au Canada, le plus 駑ouvant peut-黎re, ? coup s?r le plus charg? de cons駲uences pour l'avenir du pays.

Ressaisissons bien les derniers 騅駭ements. Par leur d駭ouement malheureux, les conflits scolaires du Nouveau-Brunswick et de l'Ile du Prince-ノdouard avaient d駛? inflig? au pacte f馘駻atif, un 饕ranlement consid駻able. Mais qu'騁ait-ce aupr鑚 de ce qui venait de se passer? Dans les deux provinces maritimes le droit minoritaire s'entourait de doutes et d'obscurit駸; et le devoir des autorit駸 f馘駻ales pouvait para?tre incertain. Dans le cas du Manitoba, nulle place ? la moindre obscurit?, non plus qu'au doute le plus l馮er. Entour? des garanties les plus sacr馥s par le parlement canadien, confirm? par la l馮islature de Winnipeg, le droit des catholiques s'騁ait vu conf駻er par le parlement imp駻ial une sorte d'inviolabilit?. Viol? par les plus audacieux pers馗uteurs, trouverait-il, dans le recours constitutionnel, sa juste revanche? Cette fois, non plus, le doute ne pouvait exister sur la l馮itimit? du recours. Consult? par elles, le plus haut tribunal de l'Empire a reconnu aux autorit駸 f馘駻ales le droit d'intervenir. Dans l'affaire des 馗oles du Manitoba, la d馗ision des hommes d'Ottawa portera donc express駑ent sur la valeur pratique de l'article 93, sur l'efficacit? m麥e de la constitution canadienne pour la protection des minorit駸. Le cas qui s'offrait ? eux 騁ait v駻itablement le cas type; et l'on n'en imagine point qui en eussent mieux r騏ni toutes les conditions. Aussi se prend-on ? r黐er d'une action exp馘itive du minist鑽e f馘駻al, action ferme et inflexible; ? r黐er aussi de l'unanimit? au moins relative du parlement devant son r?le de justicier, manifestation imposante qui, si elle n'e?t pu faire fl馗hir du premier coup le pouvoir pr騅aricateur, e?t du moins r駱rim? ses arrogantes p騁ulances, fortement impressionn? l'opinion publique, sauv? en tout cas la supr駑atie et la dignit? de la constitution. Au lieu de ce spectacle, que vit-on? Le gouvernement f馘駻al se laissant impun駑ent braver par le pouvoir subordonn? de Winnipeg, le parlement refusant sa coop駻ation ? l'oeuvre de justice, les catholiques eux-m麥es divis駸 en deux camps adversaires. C'est-?-dire que, mis ? l'駱reuve, dans les circonstances les plus favorables, l'article 93 se r騅駘ait inop駻ant.

Et voil?, pour le dire en passant, qu'馗late, apr鑚 tant de fois, le peu de psychologie ou le peu de sens politique des ォ P鑽es サ de la Conf馘駻ation. L'on se demande, en effet, si les ォ P鑽es サ catholiques ont jamais pr騅u ou calcul? qu'un jour ou l'autre l'intervention f馘駻ale aurait lieu d'黎re invoqu馥 en faveur d'une minorit? de leur foi. Faire, du parlement d'Ottawa, le souverain arbitre des conflits scolaires, l'id馥 pouvait para?tre g駭駻euse et non d駱ourvue de grandiose. C'騁ait investir le parlement central d'une mission supr麥e et sacr馥, 駻iger les repr駸entants de la nation en une sorte de haute Cour olympienne pour la protection du droit des faibles contre l'absolutisme des Etats; bref c'騁ait confier au parlement canadien le d駱?t de la paix nationale, la garde du pacte fondamental entre les races et les croyances. Niais encore fallait-il pr騅oir l'infaillible cons駲uence de chaque intervention d'Ottawa, en quelle atmosph鑽e et selon quelle r鑒le de jeu le m馗anisme constitutionnel courait le risque de fonctionner. Que les minorit駸 en butte aux pers馗utions fussent invariablement de langue fran軋ise ou de foi catholique, ce qui n'騁ait pas le fait impr騅isible, et d鑚 lors comment ne pas se rendre compte que le parlement charg? de la protection du droit minoritaire et de son redressement, ne serait jamais autre au Canada, qu'un parlement en majorit? anglo-protestant, et qu'en somme c'騁ait ? une majorit? anglo-protestante que serait confi馥 la garde des droits scolaires des catholiques ? On ne pouvait ignorer, en tout cas, que l'intervention f馘駻ale ferait se dresser chaque fois l'une en face de l'autre deux autonomies ou deux puissances: une province et l'Etat central, et que 1867 n'avait aboli ni les passions religieuses, ni les temp駻aments des deux races. Or, que l'Etat central d?t l'emporter facilement si, par hasard, l'appel au secours venait jamais d'une minorit? protestante, la chose ne faisait pas le moindre doute. En irait-il de m麥e lorsque la minorit? en d騁resse aurait l'infortune d'appartenir ? la foi catholique? Dans le premier cas, Ottawa n'aurait ? affronter en d馭initive que la r駸istance et l'autonomie d'un seul gouvernement provincial; dans l'aventure, il pourrait compter sur la formidable solidarit? que l'on sait; dans l'autre cas, et pour peu que les ォ P鑽es サ catholiques se fussent rappel? le rigide dogmatisme des protestants anglo-canadiens en mati鑽e d'enseignement public, ou, encore et plus simplement, leur soif de domination et leur esprit de corps, pouvaient-ils ne pas consid駻er comme in騅itable, en face de l'Etat interventionniste, la coalition ou la ligue imbrisable de toute l'opinion anglo-canadienne? Car l'hypoth鑚e, encore cette fois, n'a rien d'une grande subtilit?, ni rien de l'impr騅isible. Et si vraiment les ォ P鑽es サ de la Conf馘駻ation n'ont pas aper輹 ce probl鑪e; ou si, l'ayant aper輹, ils ont pens? qu'une majorit? parlementaire anglo-protestante saurait, par amour sp馗ulatif de la justice, se mettre perp騁uellement au-dessus des pr駛ug駸 de race et de foi, n'y a-t-il pas lieu, ? propos de l'article 93, de prononcer le mot de romantisme politique?

Le R鑒lement Laurier-Greenway soulignerait, en tout cas, d'un trait d馗isif, l'馗hec de cette conception politique. Quelque opinion que l'on entretienne, en effet, sur ce R鑒lement, on ne saurait faire qu'il ne porte avec soi sa signification. Or qu'騁ait-ce que cet acte du gouvernement f馘駻al, sinon, en propres termes, une renonciation ? son r?le tel que fix? par la constitution? En somme il venait de se rabattre sur une transaction en quelque sorte extraconstitutionnelle, dont il ne pouvait emp鹹her qu'elle ne f?t une abdication devant le pouvoir provincial. Apr鑚 ce solennel pr馗馘ent, lequel des gouvernements oppresseurs au Canada oserait-on encore menacer des foudres de l'intervention f馘駻ale? Non, il vaut mieux en convenir: un article fondamental de la charte de 1867 venait d'黎re frapp? pour jamais de caducit?. Et c'est bien ainsi qu'? Winnipeg l'on interpr鑼e le dernier acte du gouvernement d'Ottawa. Pour que toute 駲uivoque soit ? jamais dissip馥, l'un des ministres du cabinet manitobain vient de s'馗rier devant la Chambre de l?-bas: ォ Une chose d'une importance tr鑚 consid駻able, c'est que, dans cette transaction, le principe de l'autonomie provinciale en mati鑽e d'instruction publique a 騁? conserv? intact . . . Le principe de l'intervention f馘駻ale dans la l馮islation provinciale en mati鑽e d'instruction publique est pour jamais abandonn?; jamais plus nous ne verrons un parti politique faire des efforts pour imposer au Manitoba, en mati鑽e d'instruction publique, une loi repouss馥 par la province. サ (132)

En face d'un tel langage, on ne sait lequel est le plus inqui騁ant pour l'avenir du pays: ou de cette insolence dans le d馭i, ou de la d駑ission des autorit駸 sup駻ieures devant leur devoir.

- V -

Tournons-nous vers un autre spectacle.

Si elles mettaient fin ? l'agitation, les directives pontificales n'apaisaient qu'assez peu le malaise scolaire. Elles plong鑽ent tout d'abord l'archev麭ue de Saint-Boniface dans une anxi騁? proche de l'angoisse. Qu'exigeait au juste l'Encyclique? Un changement absolu de tactique? La renonciation d馭initive aux droits constitutionnels? ォ Je ne tiens pas ? prot馮er les 穃es plus que le Pape lui-m麥e サ, 馗rivait le jeune archev麭ue; ォ et si la voie des concessions, apr鑚 nous avoir soulag駸 pendant un temps, nous conduisait aux ab?mes, je n'en serais point responsable devant l'histoire, devant mon pays, et surtout devant Dieu et devant ma conscience. Je veux bien continuer ? lutter dans la pauvret?, l'humiliation et sans le moindre encouragement de Rome; mais je ne veux pas dire un mot, ni faire un pas contre la volont? de notre chef supr麥e. サ (133) Un autre jour il trace encore ces lignes faites pour 黎re grav馥s sur un monument: ォ II serait beau de mourir de faim sur la br鐵he; et si j'騁ais seul, je pr馭駻erais la mort ? une vie humili馥; mais je ne suis pas seul et je veux la vie pour mes enfants qui me demandent du pain . . . サ (134)

L'angoisse de l'archev麭ue n'allait point sans motifs. Le R鑒lement Laurier-Greenway qui promettait assez peu, tenait encore moins. Un rien, la rumeur d'駘ections provinciales et f馘駻ales, la menace d'une interpellation parlementaire, suffisait, en 1898, ? tout remettre en question. Une lettre personnelle de L駮n XIII ? l'archev麭ue de Saint-Boniface o? le Pontife sollicite, pour la minorit?, un traitement moins rigoureux, ne peut 黎re livr馥 au public, cette ann馥-l?, par crainte d'ameuter le fanatisme. (135) En 1900, dans la ville de Winnipeg, l'on veut bien n馮ocier avec les catholiques, promettre de leur verser leur part d'octroi, mais ? la condition d'une soumission pr饌lable et absolue de leur part. Et cela veut dire la renonciation au caract鑽e confessionnel des 馗oles catholiques, l'enl钁ement des crucifix des salles de classe et la suppresion du costume des religieuses enseignantes. (136)

L'騁at des 馗oles catholiques manitobaines offre alors un spectacle lamentable. Dans les villes, et notamment ? Winnipeg, pour maintenir leurs 馗oles libres, les pers馗ut駸 se sont r駸olus ? payer double taxe. En 1900, tout compte fait et des sommes d饕ours馥s et des octrois sacrifi駸 ou perdus, c'est le total consid駻able de 300,000ドル que les catholiques ont vers? depuis dix ans ? la commission des 馗oles publiques, pour la construction et l'entretien de palais superbes o? ne fr駲uentent m麥e pas leurs enfants. G駭駻alement trop pauvres, les Manitobains ne sauraient s'offrir partout la ressource d'馗oles ind駱endantes. A Winnipeg, en 1900, voici d駛? deux ans que les Soeurs des SS. Noms de J駸us et de Marie ne re輟ivent plus de salaire. D鑚 1896, plut?t que de se soumettre ? l'oppression, 51 馗oles avaient ferm? leurs portes. Toute une g駭駻ation de 1,000 ? 1,200 enfants grandissaient dans l'ignorance. (137) En d'autres localit駸 o?, pour limiter le champ des ruines, l'on avait accept?, la mort dans l'穃e, l'馗ole publique, ma?tres et ma?tresses se voyaient contraints d'attester solennellement n'avoir fait, ni pendant les heures de classe, ni avant trois heures et demie de l'apr鑚-midi, aucun enseignement, ni aucun exercice religieux; et, ce serment, il leur fallait le pr黎er bon gr? mal gr?, sous peine de perdre l'octroi municipal et l馮islatif.

Pourtant, en 1899, une d騁ente se fit sentir. D馭ait aux 駘ections, le gouvernement Greenway c馘ait la place ? un gouvernement conservateur. Celui-ci, sans rien restituer que de pr馗aire ? la minorit?, parut oublier la pers馗ution ou la tracasserie. Pendant pr鑚 de quinze ans, les catholiques vont vivre ainsi, avec quelque ombre de libert?, et sous des abris temporaires, par crainte d'un nouvel orage.

Cet orage 馗laterait en 1916. C'騁ait au temps de la grande guerre. Une effroyable vague de fanatisme se ruait d'un bout ? l'autre du Canada contre les Canadiens fran軋is, coupables d'exiger, dans la contribution de leur pays aux arm馥s britanniques, le respect des lois de la mesure et des formes constitutionnelles. Au Manitoba cette francophobie se compliqua bient?t de m馭iance, puis d'emportement contre les immigr駸 de race germanique, lesquels, au surplus, ne surent point se garder de toute imprudence. Manitobains de race fran軋ise et de race germanique furent donc envelopp駸 dans le m麥e d饕ordement de haines et, sous un nouveau gouvernement lib駻al, le gouvernement Norris, le Parlement de Winnipeg supprima, dans les 馗oles du Manitoba, l'enseignement de toute autre langue que l'anglais. Apr鑚 l'attaque oblique de 1890 contre les droits du fran軋is ? l'馗ole, c'騁ait cette fois l'attaque directe, la suppression sans phrases du droit minoritaire, un retour de l'esprit unitariste qui se refuse ? concevoir un autre Canada qu'un Canada de langue anglaise.

Que vont faire les Canadiens fran軋is du Manitoba? Vont-ils se laisser intimider par la froide audace de l'oppresseur, par la temp黎e de haine qui d'un bout ? l'autre du pays, se d馗ha?ne contre leur race? C'est l'heure o? ils vont esquisser une tactique, une nouvelle m騁hode de d馭ense, qu'avec le temps finiront par adopter toutes les minorit駸 fran軋ises au Canada. Les opprim駸 n'entendent pas s'arr黎er aux agitations st駻iles, aux simples protestations verbales, aussi vaines parfois qu'駑ouvantes. Il leur para?tra plus pratique de faire appel ? toutes les puissances de l'organisation. Ils donneront tout son relief, sa pleine force ? leur personnalit? morale et jusqu'? la couronner d'une certaine forme de gouvernement: sorte de pouvoir politique charg? du soin et de la d馭ense de leurs int駻黎s particuliers. Sous l'impulsion de ce pouvoir, toutes les minorit駸 vont se donner de multiples organismes de d馭ense et de culture. Avec une hardiesse souvent silencieuse mais d'une invincible opini穰ret?, elles n'h駸iteront pas ? prendre, chaque fois qu'il sera n馗essaire, les libert駸 qu'on leur refusera; patiemment elles reconstruiront les institutions d騅ast馥s ou d駑olies par l'arbitraire. Dans un pays facilement impressionn? par la puissance du fait accompli, on les verra organiser partout ces syst鑪es scolaires ind駱endants et, pourtant li駸, accroch駸 au syst鑪e de l'Etat comme des lierres qu'on ne pourrait plus arracher sans tout bouleverser. Bref, les minorit駸 fran軋ises s'appliquent ? se donner tous les attributs, la ォ structure interne サ qui, devant le droit international contemporain, fait l'essence m麥e de la minorit? et la constitue v駻itable ォ sujet de droit サ. Et quoi de plus habile et de plus f馗ond que cette tactique? Leurs premi鑽es revanches sont venues aux minorit駸 canadiennes, le jour o?, d駘aissant les mauvaises b駲uilles des recours judiciaires ou constitutionnels, elles ont march?, de leur pas libre, ? la conqu黎e de la libert?.

Ainsi feront les Manitobains qui vont r駱騁er le geste ancien, le geste de leurs anc黎res partout o?, depuis 160 ans, l'on a voulu leur ravir quelque chose de leur patrimoine moral. Sujets britanniques, ils n'entendent point se laisser infliger en leur pays, le traitement de citoyens de deuxi鑪e classe. Ils r駸isteront ? la loi, mais selon la tactique que nous indiquions il y a un instant. Plus d'appel ? une justice aussi co?teuse que douteuse; plus de recours non plus ? des textes constitutionnels ambigus et d駸uets, ? un m馗anisme l馮islatif de mus馥, impropre au d馗lenchement. Ces Fran軋is ont r駸olu de ne compter que sur eux-m麥es, sur leur propre courage, leur propre t駭acit?, la puissance de leur appel ? l'opinion, ? l'駘ite des esprits droits, hostiles parfois aux longues injustices. Faiblement aid馥 par l'immigration, leur haute natalit? a pourtant permis ? ces hommes de sang fran軋is de doubler leur nombre depuis vingt-cinq ans. Le recensement de 1931 leur accorde 47,039 穃es. Vaste enclave fran軋ise dans le pays manitobain, ils d騁iennent, en chiffres exacts, le territoire de 40 paroisses, le long de la Rivi鑽eRouge, avec des groupes notables diss駑in駸 en quelques autres paroisses ? majorit? anglaise ou flamande. Un d馗ret de Rome a divis?, il est vrai, le dioc鑚e de Saint-Boniface, lui enlevant une portion notable de son territoire: environ treize paroisses qui sont pass馥s ? un archev麭ue de langue anglaise: celui de Winnipeg; mais cette division eccl駸iastique n'a pas divis? les forces des Manitobains de race fran軋ise; par-dessus la fronti鑽e dioc駸aine ils continuent de faire cause commune et d'ob駟r aux m麥es chefs nationaux. Leur situation mat駻ielle s'est am駘ior馥; et, jusqu'? ces derniers temps o? devait fondre, sur ces pays de l'Ouest, la m騅ente du bl?, l'opulent sol des prairies les avait g駭駻eusement pay駸 de leurs labeurs.

Puisqu'ils entendent ne compter que sur eux-m麥es, les opprim駸 mettront sur pied un organisme qui prendra charge des int駻黎s de leur groupe: sorte de minist鑽e de l'action nationale, suppl饌nt, en ce domaine particulier, ? la carence de l'Etat. Cet organisme sera l'ォ Association d'Education des Canadiens fran軋is du Manitoba サ, qui aura pour but, ainsi qu'ils l'ont d馭ini, ォ de conserver leurs traditions nationales, leurs moeurs et leurs coutumes particuli鑽es et d'assurer leur survivance comme entit? catholique et fran軋ise サ. Dirig馥 par un ex馗utif dont le si鑒e est ? Saint-Boniface, l'Association, par ses multiples services ou ramifications, s'emparera de tout le Manitoba fran軋is. Elle s'appuiera d'abord sur ses cercles paroissiaux, associations de p鑽es de famille appel駸 les premiers au soutien de leurs 馗oles; aux cercles paroissiaux s'ajouteront l'Association des Commissaires d'馗oles de langue fran軋ise, puis l'Association des Instituteurs de langue fran軋ise. Ainsi, l'ex馗utif de Saint-Boniface tient r馥llement toutes les forces et tous les fils; et l'Association d'馘ucation, c'est bien, selon la d馭inition de l'archev麭ue actuel: ォ tout ce qu'il y a de fran軋is au Manitoba organis? pour l'action サ.

Mais pour importants que soient les cadres et les troupes, ? quoi les fera-t-on servir? En d馭initive, le plan est de s'emparer de l'馗ole telle que l'Etat l'a cr鳬e, 馗ole de langue anglaise; puis, non pas en marge de la loi, mais bien plut?t ? travers les mailles de la loi, d'y organiser un enseignement fran軋is ind駱endant, complet et coordonn?. Il y faut donc un programme, des manuels, des professeurs comp騁ents, un inspectorat, des examens. Patiemment, pi鐵e ? pi鐵e, le syst鑪e entier sera fa輟nn?. Le programme imposera le fran軋is, non seulement comme objet d'騁ude, depuis la premi鑽e jusqu'? la douzi鑪e ann馥 d'馗ole, mais comme langue d'une partie de l'enseignement et pour toutes les mati鑽es du programme officiel. Ce programme pourvoit aussi ? l'ornementation des classes, ? l'utilisation des chants populaires ou nationaux, ? l'organisation de biblioth鑷ues scolaires : toutes choses qui doivent constituer ? l'馗ole manitobaine une atmosph鑽e canadienne-fran軋ise. Pour se recruter un personnel de professeurs bilingues, l'Association d'馘ucation imaginera un ing駭ieux syst鑪e de pr黎s: pr黎s ? longue 馗h饌nce qui permettront ? des jeunes gens et ? des jeunes filles de suivre les cours de l'Ecole normale de Winnipeg. A c?t? de cette Ecole normale d'Etat, elle instituera des cours compl駑entaires d'enseignement religieux et de p馘agogie fran軋ise ? l'usage de ses aspirants-instituteurs. Elle ne voudra point se passer, non plus, d'un inspectorat. Des visiteurs d'馗oles, pr黎res ou religieux jusqu'ici, feront r馮uli鑽ement le tour des 馗oles pour y surveiller l'ex馗ution du programme d'騁udes fran軋ises, profitant de leur inspection pour r騏nir les instituteurs d'une r馮ion et leur donner des le輟ns de p馘agogie 馮alement fran軋ises. Enfin reste l'examen. Chaque ann馥, ? une date choisie, l'Association d'馘ucation organisera dans les 馗oles fran軋ises du Manitoba, un concours de fran軋is. Le m麥e jour, ? la m麥e heure, tous les 馗oliers et 馗oli鑽es auront ? r駱ondre aux m麥es questions, ? faire les m麥es devoirs. Ce sera comme la revue de tous les petits d馭enseurs de la langue maternelle, mais revue qui aura le caract鑽e et la f馗ondit? d'un examen g駭駻al, suivi de la proclamation des laur饌ts.

Pour faire aller ces nombreux rouages, mus eux-m麥es par des initiatives libres, ? qui manque la pression administrative ou l馮islative, il faut quelque part, penserez-vous, des ressources, beaucoup de ressources p馗uniaires et le prestige du commandement. Le fonctionnement de ce syst鑪e scolaire exige, en effet, de la part de l'Association d'馘ucation, le maintien d'un secr騁ariat permanent assist? d'un groupe de fonctionnaires. Mais le plus important, pour l'Association, est d'黎re ob駟e, d'obtenir, par la seule autorit? morale, la collaboration des parents, des commissaires d'馗ole, des instituteurs, des enfants. Rien ne peut aller que par l'acceptation loyale et g駭駻euse du programme d'騁udes fran軋ises, du visiteur fran軋is, des cours p馘agogiques suppl駑entaires, du concours annuel. Songez, en outre, que ce syst鑪e impose aux 駘钁es et aux ma?tres double programme, double s駻ie de livres, double examen, par cons駲uent de lourds sacrifices, et quelquefois m麥e des actes m駻itoires de courage. Introduire, par exemple, dans l'馗ole les livres fran軋is du programme de l'Association, c'est, pour le ma?tre, s'exposer aux molestations de l'Advisory Board qui interdit dans les 馗oles tous autres manuels que ceux qu'il a marqu駸 de son estampille.

Le prestige moral de l'Association, la grandeur des int駻黎s en jeu, suffisent ? d騁erminer la collaboration des Fran軋is du Manitoba. Il faut compter, sans doute, avec quelques humaines mis鑽es, avec l'inertie trop fr駲uente des cercles paroissiaux. En somme d'autres d騅ouements corrigent ces ti馘eurs ou ces lacunes. Les ressources financi鑽es, une souscription annuelle, recueillie parmi les familles par les cercles paroissiaux ou par les fonctionnaires de l'Association, les fournit. Fermiers et petits employ駸 consentent ce libre imp?t pour la constitution du budget scolaire. L'ob駟ssance aux directives des chefs est aussi lib駻alement accord馥. Il existe, au Manitoba fran軋is, 162 馗oles, dont 29 couvents et 2 coll鑒es dirig駸 par les Fr鑽es. Dans ces 162 馗oles, le fran軋is est enseign? selon les directives de l'Association d'馘ucation. Les petits Fran軋is du Manitoba se soumettent au double programme et ? toutes ses exigences comme au simple devoir de la vie. En 1929, 1,850 馗oliers et 馗oli鑽es prennent part au concours de fran軋is; 2,323 en 1932. M麥e all鑒re soumission de la part des ma?tres, qui portent la part la plus on駻euse du fardeau et souvent ne se retiennent pas d'y ajouter. L'ouverture des classes est fix馥 ? 9 heures du matin dans les 馗oles de Saint-Boniface. Cependant, d鑚 8 heures, vous pourriez voir de longues files d'enfants, sac au dos, se diriger vers quelques-unes des maison d'馘ucation. O? vont-ils? Ma?tres et 駘钁es s'imposent, chaque jour, une heure suppl駑entaire de classe pour donner plus de temps ? l'騁ude du fran軋is. En 1932 le Congr鑚 de l'Association d'馘ucation rendait aux ma?tres ce valable hommage: ォ Dans la majorit? des cas . . ., le personnel enseignant a ? coeur l'enseignement du fran軋is et s'acquitte amour, fiert? et patriotisme サ.

Sans doute, dira-t-on, ne faut-il point se dissimuler la fragilit? de toute cette construction plus ou moins artificielle. Cet organisme scolaire n'a pu se constituer et fonctionner qu'avec une certaine tol駻ance de l'Etat. Il peut para?tre aussi pr馗aire que cette tol駻ance elle-m麥e. Le fanatisme orangiste n'est jamais rien d'autre, au Canada, qu'un volcan mal 騁eint, et surtout au Manitoba, milieu cosmopolite travaill? depuis longtemps par les pires passions. Sans doute, mais il faut tenir compte aussi qu'un r騅eil de fanatisme se heurterait aujourd'hui ? une opinion canadienne-fran軋ise 騅eill馥, constamment tenue en alerte, d'un bout ? l'autre du Canada, par l'active vigilance d'une presse ind駱endante, et que cette opinion canadienne-fran軋ise peut d馗ider du sort des partis au parlement f馘駻al. L? m麥e, au Manitoba, le fanatisme se verrait aux prises avec des volont駸 fran軋ises aguerries, obstin馥s, les plus obstin馥s peut-黎re de toute l'Am駻ique dans leur d騁ermination de vivre. Nous avons dit tout ? l'heure la force du groupe manitobain. Il n'a qu'? le vouloir pour garder, puis fortifier ses positions. Le courant d'immigration europ馥nne bondit d駸ormais par-dessus le Manitoba, les homesteads et les bonnes terres cultivables y 騁ant devenus plus rares. Les Manitobains de race fran軋ise n'ont qu'? se serrer autour de leurs clochers, ? se cramponner au sol, source et moyen de leur vitalit?; le nombre ne saurait plus constituer pour eux le p駻il insurmontable.

Puis, si vous observez de pr鑚 leur organisation scolaire, vous d馗ouvrirez qu'elle n'a peut-黎re d'artificiel et de pr馗aire que l'apparence. Dans les milieux fran軋is homog鈩es o? les parents tiennent en leurs mains le choix des commissaires, et ceux-ci le choix des ma?tres et ma?tresses, l'馗ole manitobaine n'est rien d'autre qu'une 馗ole catholique et fran軋ise. Elle s'est introduite et d騅elopp馥 dans les cadres de l'馗ole officielle, ? la fa輟n de ces plantes vivaces et touffues qui poussent et se glissent ? travers un bosquet ou un massif de fleurs, avec une telle vigueur envahissante et de telles attaches, qu'on ne saurait plus les en arracher sans tout d騁ruire. Il n'y a d'ailleurs qu'? regarder ? travers les pays britanniques pour apercevoir le prestige du fait accompli, le caract鑽e pratiquement inviolable de la libert? prise et exerc馥. Les Anglo-Saxons s'opposent parfois avec rudesse aux 駑ancipation qui les d馗oncertent, parce qu'ils n'ont pas su les pr騅oir. Ils ont n饌nmoins ce grand sens politique de ne pas s'ent黎er ind馭iniment dans les situations absurdes, jugeant plus habile et plus profitable de s'accorder aux 騅olutions d駛? faites ou in騅itables. La culture fran軋ise au Manitoba s'appuie d'ailleurs sur d'autres forces que celles de l'enseignement primaire. De nombreux couvents, deux coll鑒es y dispensent l'enseignement moyen et acad駑ique. C'est de l'un de ces couvents fran軋is, qu'il y a quelques ann馥s, sortait la laur饌te d'un concours oratoire canadien. L'enseignement fran軋is s'駘钁e m麥e au Manitoba jusqu'aux humanit駸 classiques, lesquelles sont enseign馥s au juniorat des Oblats de Saint-Boniface et au coll鑒e de la m麥e ville, ce dernier pass? en 1885 sous la direction des P鑽es J駸uites, mais fond?, ? vrai dire, aux lointaines ann馥s de 1818.

Vitalit? fran軋ise, volont? de d馭ense et d'organisation, les Manitobains doivent ces vertus de force ? d'admirables chefs la?cs. Mais sur ce petit peuple r駸olu, combatif, l'on retrace, plus que tout le reste, l'empreinte souveraine d'une dynastie de grands 騅麭ues, et d馭inir ces 騅麭ues, c'est d馭inir leur peuple. Le premier, Mgr Provencher, arriv? l?, simple missionnaire, en 1818, y b穰it tout de suite des 馗oles en m麥e temps que des 馮lises. Son successeur fut l'騅麭ue Alexandre Tach?, devenu bient?t archev麭ue, en son temps le plus grand homme de l'Ouest et l'un des plus grands coeurs qu'ait jamais enfant駸 la patrie canadienne-fran軋ise. Le vieux missionnaire vit un jour la malice des hommes s'acharner ? d騁ruire ce qu'il avait si p駭iblement 馘ifi?. Jusqu'au bord de sa tombe, il garda, pour la d馭ense de l'馗ole catholique et fran軋ise, son inalt駻able intr駱idit?. Le simple soup輟n d'avoir sacrifi? quelques parcelles de son d駱?t arrache au vieux lutteur ces cris de lion bless?: ォ Ma conscience, et ce tribunal est pour moi de haute instance サ, dira-t-il fi鑽ement, ォ ne me reproche pas ce dont vous m'accusez . . . Un demi-si鐵le de vie missionnaire a sans doute amoindri mes facult駸 sans pourtant les 騁eindre, refroidi mon coeur sans le glacer, mais il laisse ? ma volont? assez d'駭ergie pour proclamer hautement que je n'ai jamais consenti et ne consentirai jamais ? un compromis qui serait une bassesse, ? des concessions qui seraient des faiblesses. サ

Quand, en 1894, au plus fort de la lutte scolaire, l'archev麭ue Tach? mourut, Dieu, pour soutenir le droit vaincu, suscita un ap?tre qui avait h駻it? de l'穃e des chevaliers, Mgr Ad駘ard Langevin. Quel admirable entra?neur d'hommes il fut, peut-黎re en pourrez-vous juger par ce simple extrait de l'un de ses discours: ォ La pers馗ution d馗ourage les races sans vigueur et les hommes sans-conviction, comme la temp黎e abat les arbres sans racines; mais elle provoque et ravive les courages des coeurs vaillants. A ceux qui veulent nous arracher ce qui nous appartient, nous devons r駱ondre avec une fiert? toute fran軋ise et une d騁ermination toute britannique: ォ Ce que nous avons, nous le gardons. サ C'est la fi鑽e r駱lique du vieux gouverneur Frontenac ? l'envoy? anglais qui lui demandait de rendre ses canons: ォ Viens les prendre . . . サ Nous ne reconnaissons ? personne le droit d'arr黎er les Canadiens fran軋is ? la fronti鑽e de Qu饕ec et de leur dire: ォ Hors de l?, vous n'黎es plus chez vous. サ Nous sommes chez nous au Canada, partout o? le drapeau britannique porte dans ses plis glorieux nos droits sacr駸 avec la trace de notre sang. Debout, libres et fiers aupr鑚 de cet 騁endard qui flotte triomphalement sur tous les oc饌ns, nous lui jurons avec joie, foi et fid駘it?; mais nous lui demandons en retour de prot馮er toujours nos libert駸, et nous clamons ? tous les 馗hos du pays la vieille devise normande: ォ Dieu et mon droit ? サ

Enfin, lors de l'agression de 1916, o? l'on ne pouvait plus vaincre et garder ses positions que par des r饌lisations audacieuses autant que pratiques, ce fut encore le quatri鑪e 騅麭ue de Saint-Boniface qui donna ? son peuple le mot d'ordre sauveur. Dans une de ces formules lapidaires dont il a le secret, il dira un jour: ォ Si nous voulons qu'il y ait du fran軋is au Canada, c'est ? nous d'en mettre. サ En 1922, au Congr鑚 de l'Association d'馘ucation des Canadiens fran軋is du Manitoba, Mgr Arthur B駘iveau 駭on軋it, en ces quelques phrases de clart?, le caract鑽e de l'oeuvre et les motifs de la r駸istance:

ォ L'Association d'馘ucation n'est pas un rouage d'attaque, mais de d馭ense nationale. Elle veut tout ce que veulent l馮itimement les autorit駸 scolaires. Elle refuse de rester inerte devant l'assassinat national et religieux de ceux qui ont droit de vivre en ce pays. En gardant ? ses enfants la culture fran軋ise et la foi catholique, elle a conscience de rendre un double service ? la nation tout enti鑽e. La culture fran軋ise est parmi les plus parfaites qui existent au monde: c'est donc un avoir national consid駻able; la foi catholique est le dernier boulevard qui r駸istera aux 駘駑ents de d駸ordre . . . Nos gouvernants ? courte vue refusent pr駸entemnt de le reconna?tre; il importe de les sauver, malgr? eux, si possible.サ

END NOTES

(1) Pour les fronti鑽es de la Terre de Rupert, voir: Actes de l'Am駻ique britannique du Nord, 1867-1907, pp. 67-75.Sir Wilfrid Laurier d馭inissait ainsi, en 1905,la Terre de Rupert et les Territoires du Nord-Ouest: ォ La Terre de Rupert est tout le territoire arros? par les eaux qui se d騅ersent dans la baie d'Hudson et les d騁roits d'Hudson. Qu'est-ce que le Nord-Ouest? C'est tout le territoire qui n'est pas compris dans la Terre de Rupert. サ (D饕ats des Communes, Ottawa, 1905, col. 8,779.)

(2) Voir, sur ce sujet, une 騁ude historique et juridique, sign馥: Lex, la Nouvelle-France, janvier 1910. Pour l'histoire du mouvement de la Rivi鑽e-Rouge, voir le document capital: Rapport du Comit? sur les causes des troubles du Territoire du Nord-Ouest en 1869-70, imprim? par ordre du Parlement, appendice No 6, A. 1874, Ottawa.

(3) Beckles Willson, The Life of Lord Strathcona and Mount Royal, (London 1915) , p. 165 .

(4) McDougall agit, en effet, de bonne foi. Quelle autorit? r馮issait alors les Territoires? On paraissait bien l'ignorer en certains quartiers. M. McTavish, gouverneur d'Assiniboia, avait dit ? Riel quelque temps auparavant: ォ Le gouvernement canadien a envoy? des arpenteurs dans la colonie sans m麥e avoir la d駘icatesse de m'en parler. Quant ? vous prot馮er, il m'est impossible de le faire, car je ne suis pas s?r d'黎re encore gouverneur. サ Au d駱art de McDougall pour l'Ouest le gouvernement canadien avait espoir de voir termin馥s, le ler d馗embre 1869, toutes les transactions entre la Couronne d'Angleterre et la Compagnie de la Baie d'Hudson. Sans nouvelle d'Ottawa, McDougall agit comme si le fait eut 騁? accompli. En somme le gouvernement canadien doit 黎re tenu responsable d'une pr馗ipitation injustifi馥. Dans l'entourage de McDougall se trouvaient aussi des subalternes d駱ourvus de tact qui se mirent trop complaisamment au service de certaines cupidit駸. Des arpentages pour le moins indiscrets et bien d'autres froissements impos駸 ? la population de la Rivi鑽e-Rouge ne trouvent leur explication que dans l'impatience d'un groupe d'exploiteurs, anglo-ontariens pour la plupart, ? se tailler de vastes domaines, ? m麥e les belles terres de la r馮ion. Ces gens 騁aient bien d騁ermin駸 ? ne tenir aucun compte des droits des anciens habitants, qu'ils traitaient avec moins d'馮ards que des sauvages. Dans ォ The Creation of Manitoba , l'historien Alexander Begg le d馗lare sans ambages: le but de ces exploiteurs 騁ait de a faire main basse sur une assez vaste quantit? de terrain pour faire de chacun de ces hommes le plus riche propri騁aire du Dominion. サ (Voir L.-A. Prud'homme, Monseigneur No?l-Joseph Ritchot (Winnipeg, 1928), pp. 60-62.)

(5) Dom Benoit, Vie de Mgr Tach?, Archev麭ue de Saint-Boniface, (Montr饌l, 1904), II, p. 13.

(6) Donatien Fr駑ont, Mgr Tach? et la naissance du Manitoba, (Winnipeg, 1930), p. 13.

(7) Mgr Tach?, Une page de l'histoire des 馗oles du Manitoba, p. 6.

(8) Donald Alex. Mac Lean, Catholic schools Legal Status, (Toronto, 1923), pp. 72-75.

[Note de l'馘iteur: La note no. 8 n'est pas ratach馥 au texte par Groulx. Nous la donnons tout de m麥e par souci d'exactitude.]

(9) Document de la Session, (No 63), 1891, p. 62.

(10) Mgr Tach?, Une page de l'histoire des 馗oles du Manitoba, pp. 14-15, MacLean, op. cit., pp. 72-74.

(11) Mgr Tach?, Esquisse sur le Nord-Ouest de l'Am駻ique, (Montr饌l, 1901), 2e 馘., p. 54.

(12) Lettre ? l'archev麭ue de Qu饕ec, 22 juin 1871, Arch. de l'Archev鹹h? de Qu饕ec.

(13) MacDonald ? George Stephen, 13 dec. 1869, Correspondence of Sir Jonn A. MacDonald, 1840-1891, by Sir Joseph Pope, pp. 112-13.

(14) Arch. de l'Archev鹹h? de Saint-Boniface.

(15) Ce gouvernement provisoire prit naissance, ? vrai dire, le 16 octobre 1869. Le soir de ce jour, les m騁is 駘irent un conseil, le e Conseil national サ dont John Bruce fut le pr駸ident et Louis Riel le secr騁aire. Le but primitif est de pourvoir ? la d馭ense commune, mais Riel voudrait constituer un gouvernement qui traiterait avec le Canada des conditions de l'entr馥 des territoires dans la Conf馘駻ation. Ce Conseil coexiste, ? ce moment, avec le Conseil d'Assiniboia, gouvernement d饕ord? et moribond, pratiquement d駑issionnaire. Le 2 nov. Riel s'empare de Fort-Garry. Le 16 nov., ? l'instigation de Riel toujours, 24 d駱ut駸, dont 12 駘us par les paroisses fran軋ises et 12 par les paroisses anglaises, se r騏nissent pour une convention de deux jours et adoptent ? l'unanimit? la premi鑽e e liste des droits サ. Apr鑚 la proclamation de McDougall (ler d馗. 1869), le gouvernement d'Assiniboia s'efface. Le 25 d馗. 1869, Riel devient, de fait, le pr駸ident du gouvernement provisoire. Le 19 janvier 1870 la population rencontre au Fort Garry, en assembl馥 publique, la commission envoy馥 par le gouvernement d'Ottawa. Riel y fait d馗ider, pour le 25 janvier suivant, la r騏nion de 40 repr駸entants, dont 20 choisis parmi les Fran軋is et 20 parmi les Anglais. Cette ォ Convention サ se r騏nit le 25 janvier 1870, adopte une nouvelle e liste des droits サ, puis, apr鑚 s'黎re assur馥 de la d駑ission en fait du gouvernement d'Assiniboia, organise effectivement, le 9 f騅. 1870, le gouvernement provisoire. Ce gouvernement se compose d'un ex馗utif de 9 membres, dont Riel est le pr駸ident, lequel ex馗utif est aid? de 24 conseillers, douze pour les centres fran軋is, autant pour les centres anglais. On notera que tous ces 騅駭ements se d駻oulent avant que le gouvernement canadien se puisse targuer, sur les territoires, d'une ombre de juridiction ou d'autorit?.

(16) Ces d駘馮u駸 騁aient l'abb? J.-N. Ritchot, Albert Scott, le juge John Black.

(17) L'on n'en 騁ait pas venu l? sans quelques incidents sensationnels. Le 11 avril, ? la descente du train ? Ottawa, MM. Ritchot et Alfred Scott se voyaient mis aux arr黎s, sous accusation de complicit? dans le meurtre de Thomas Scott. Cette insulte inflig馥 ? des d駘馮u駸 inviolables de leur personne, faillit entra?ner le gouvernement provisoire ? la rupture des n馮ociations. Le 28 avril les d駘馮u駸 conf駻aient avec le gouvernement canadien depuis 6 jours: cependant celui-ci n'avait pas encore daign? reconna?tre officiellement leur qualit?. Il fallut une menace 駭ergique de l'abb? Ritchot, qui parla de reprendre le chemin de la Rivi鑽e-Rouge pour forcer le gouvernement canadien ? s'ex馗uter. (L.-A. Prud'homme, Mgr No?l-Joseph Ritchot, pp. 92-99.) Cette reconnaissance officielle de la part du gouvernement d'Ottawa dispose de la l馮itimit? du gouvernement provisoire de la Rivi鑽e-Rouge. C'est la reconnaissance du fait accompli. Si d'ailleurs quelque autorit? pouvait, avec d馗ence, contester cette l馮itimit?, ce n'騁ait s?rement pas le gouvernement canadien, lequel, nous l'avons vu, n'avait de juridiction d'aucune sorte sur les territoires, avant le 15 juillet 1870 et n'y pouvait accomplir, avant cette date, que les actes d'un gouvernement usurpateur. L'on aura retenu, en outre, que le gouvernement canadien d駸avoua son lieutenant-gouverneur et les proclamations de celui-ci. Granville 馗rivait, le 26 janvier 1870, qu'? l'駱oque o? McDougall pr騁endait agir comme lieutenant-gouverneur du Nord-Ouest, M. McTavish 騁ait ォ en fait le seul gouverneur l馮itime (legal) du Territoire. サ (Ewart, The Manitoba School question, pp. 337-38). D'autre part, c'est l'opinion commune que le gouvernement d'Assiniboia 騁ait depuis longtemps d饕ord?, impuissant en tout cas, ? se faire respecter et ? maintenir l'ordre. Il doute lui-m麥e de sa propre l馮itimit? et, en particulier, de son pouvoir d'騁ablir des cours de justice et de punir les criminels. Bien mieux, de nombreux indices r騅鑞ent, sinon sa complicit? secr鑼e, du moins un certain flirt avec le gouvernement provisoire. (Ewart, id., p. 330). Il est connu en tout cas, et de fa輟n certaine, qu'? la fin de janvier 1870, le gouvernement de la Compagnie de la Baie d'Hudson se d駑it pratiquement devant une d駘馮ation du gouvernement provisoire. (Preliminary Investigation and trial of A.-D. L駱ine, p. 80). D鑚 lors, ou il faut soutenir que le peuple de la Rivi鑽e-Rouge n'avait aucun droit de se constituer un gouvernement; aucun droit, non plus, de d饕attre les conditions de son entr馥 dans la Conf馘駻ation, ou admettre que son gouvernement provisoire, 駘u et constitu? du consentement des habitants de la r馮ion, est bel et bien un gouvernement l馮itime, n'ayant de d駱endance qu'? l'馮ard du gouvernement britannique, d駱endance que Riel, non seulement ne nia jamais, mais ne cessa d'affirmer avec 駭ergie.

(18) La ォ Liste des droits サ apport馥 ? Ottawa par les d駘馮u駸 du gouvernement provisoire n'avait rien d'une premi鑽e r馘action. Une premi鑽e ォ Liste サ fut r馘ig馥 en 1869, puis une deuxi鑪e ? la Convention du gouvernement provisoire, en janvier-f騅rier 1870. A la suite de nouveaux troubles et apr鑚 l'arriv馥 de Mgr Tach? ? la Rivi鑽e-Rouge, cette deuxi鑪e r馘action fut mise de c?t?. Donald A. Smith en avait re輹 n饌nmoins une copie qu'il annexa ? son rapport. Une troisi鑪e ォ Liste des droits サ fut r馘ig馥 en mars 1870 par l'ex馗utif du gouvernement provisoire et remise aux d駘馮u駸, en partance pour Ottawa, avec leurs lettres de cr饌nce dat馥s du 22 mars. Comme de nombreuses pol駑iques se sont 駘ev馥s au sujet de la ォ Liste des droits サ qui aurait 騁? port馥 ? Ottawa par les d駘馮u駸 du gouvernement provisoire, on consultera avec profit: Ecoles s駱ar馥s, Partie des n馮ociations ? Ottawa en 1870, (Bro. 17 pp.) ; Monseigneur Tach?, Une page de l'histoire des 馗oles du Manitoba, Etude des cinq phases. . . p. 29; Mgr Joseph-No?l Ritchot, par L.-A. Prud'homme, pp. 83-88; M駑oire de Mgr Tach? sur la question des Ecoles en r駱onse au Rapport du Comit? de l'honorable Conseil priv? du Canada, Montr饌l, 1894, p. 33; Dom. Benoit, Vie de Mgr Tach?, II, pp. 66-69; Documents relatifs ? la cause des 馗oles du Manitoba, Session de 1895, pp. 19, 42, 111, 131, 134.

(19) Mgr Tach?: Une page de l'Histoire des 馗oles du Manitoba, p. 43.

(20) Documents de la Session, (No 63), 1891, p. 58.

(21) Voici les paragraphes 1 et 2 de l'art. XXII de l'Acte du Manitoba:

(1) Rien dans ces lois ne devra pr駛udicier ? aucun droit ou privil鑒e conf駻?, lors de l'union, par la loi ou par la coutume ? aucune classe particuli鑽e de personnes dans la province, relativement aux 馗oles confessionnelles.

(2) Il pourra 黎re interjet? appel au gouverneur g駭駻al en son conseil de tout acte ou d馗ision de la l馮islature de la province ou de toute autorit? provinciale affectant quelqu'un des droits ou privil鑒es de la minorit? protestante ou catholique romaine des sujets de Sa Majest? relativement ? l'馘ucation. (Acte de l'Am駻ique britannique da Nord, 1867-1897, p. 49, Ottawa).

(22) Ecoles s駱ar馥s, partie des n馮ociations ? Ottawa, p. 13.

(23) D饕ats de la Chambre des Commmunes, (Bill r駱arateur), Partie I, p. 398.

(24) Dominion parliamentary debates, 1870, p. 1546.

(25) 34-35 Vic., p. 398.

(26) Il est ? noter que cette promesse formelle fut r駱騁馥 aux habitants de la Rivi鑽e-Rouge en des lettres de Sir John Young ? Mgr Tach?, au grand vicaire de Saint-Boniface et ? Donald A. Smith. (M駑oire de Mgr Tach? sur la question des 馗oles en r駱onse au Rapport du Comit? de l'honorable Conseil priv? du Canada, pp. 27-28).

(27) Documents relatifs ? la cause des 馗oles du Manitoba, Session de 1895, p. 19.

(28) Donatien Fr駑ont, Mgr Tach? et la naissance du Manitoba, p. 32.

(29) Un recensement de la fin de 1870 avait r騅駘? une certaine pr駱ond駻ance num駻ique des catholiques: ils formaient plus que la moiti? des 12,228 穃es de la population manitobaine. On convint toutefois de ne tenir aucun compte de cet 馗art num駻ique entre les deux confessions. La loi scolaire accorde ? chacun des deux groupes religieux des droits 馮aux.

(30) Documents relatifs ? la cause des 馗oles du Manitoba, (session de 1895), p. 9. Jugement du Comit? judiciaire du Conseil priv? dans la cause des Ecoles da Manitoba. . . (imprim? par ordre du parlement), session de 1893, p. 7.

(31) D饕ats de la Ch. des Com. du Canada, 1890, p. 1,018.

(32) Documents de la Session, (No 63, 1891, Ottawa), p. 9.

(33) Edition compl鑼e et officielle du D饕at sur les biens des J駸uites dans la Chambre des Communes, Ottawa, mars 1889. (Montr饌l), p. 17.

(34) ノdition compl鑼e et officielle du D饕at sur les biens des J駸uites, p. 14.

(35) Edition compl鑼e et officielle du D饕at sur les biens des J駸uites, p. 3.

(36) D饕ats de la Chambre des Communes du Canada, 1890, p. 889.

(37) Cit? dansD饕ats de la Ch. des Communes du Canada, 1890, p. 591.

(38) Cit? dans les D饕ats de la Chambre des Communes du Canada, 1890, p. 591.

(39) D饕ats de la Chambre des Communes du Canada, 1890, pp. 686-87.

(40) Cit? dans D饕ats de la Chambre des Comm. du Canada, 1890, p. 969.

(41) Documents relatifs ? la cause des 馗oles du Manitoba, session de 1895, pp. 120-121.

(42) Documents relatifs ? la cause des 馗oles du Manitoba, (Session de 1895), p. 25.

(43) Cit? dans: Documents relatifs ? la cause des 馗oles da Manitoba, (Session de 1895), p. 125,

(44) Mgr Tach?: Une page d'histoire des 馗oles du Manitoba . . ., pp. 62-75.

(45) Les 馗oles dites ノcoles publiques du Manitoba sont des 馗oles protestantes, par Mgr A.-A. Tach?, archev麭ue de Saint-Boniface, avril 1893. Documents relatifs ? la cause des 馗oles du Manitoba, Session de 1895, Ottawa, pp. 347-50.

(46) Documents relatifs ? la cause des 馗oles du Manitoba, Sesssion de 1895, Ottawa, p. 129.

(47) Documents relatifs ? la cause des 馗oles du Manitoba Session de 1895, Ottawa, pp. 230-32. Documents de la Session, (No 63), 1891, Ottawa, p. 66.

(48) Hansard, 1893, p. 1,624.

(49) Documents relatifs ? la cause des 馗oles du Manitoba, Session de 1895, Ottawa, p. 23.

(50) A la v駻it? il faut dire qu'un seul 騅麭ue refusa de signer la supplique, Mgr Rogers de Chatham, N.-B.

(51) Voir le texte de toutes ces suppliques dans: Documents de la session, (No 63), Ottawa, 1891.

(52) D饕ats de la Ch. des Comm. du Canada. 1890, pp. 4,170-82.

(53) En r饌lit? une poursuite judiciaire pr馗馘a celle-ci. Un catholique de Winnipeg fut incit? ? poursuivre la Commission des 馗oles catholiques pour enseignement ill馮al du cat馗hisme. Cette poursuite, dont l'histoire est rest馥 assez obscure, fut 馗art馥 par le tribunal. Mgr Tach?. Une page de l'Histoire des 馗oles du Manitoba, ノtude des cinq phases. . ., Saint-Boniface, 1893, p. 106.

(54) Supplementary return to the House of Commons containing factum of case, Barrett vs City of Winnipeg in connection with the abolition of separate schools in the province of Manitoba. (Printed by order of Parliament, Ottawa. 1891.)

(55) Mgr Langevin au Cardinal Ledochowski, 8 oct. 1896, Arch. de l'Archev鹹h? de Saint-Boniface.

(56) Jugement du Comit? judiciaire du Conseil priv?, Doc. de la session, (Nos 33a, 33b), Ottawa, 1893, p. 92.

[Note de l'馘iteur: il n'y a pas de note No. 57 dans le texte de Groulx]

(58) Les 馗oles dites 馗oles publiques du Manitoba sont des 馗oles protestantes, p. 19. Documents relatifs ? la cause des 馗oles du Manitoba, Session de 1895, Ottawa, p. 26.

(59) Jugement du Comit? judiciaire du Conseil priv? dans la cause des 馗oles du Manitoba . . ., Session de 1893, Ottawa. Le procureur g駭駻al, Sir Richard Webster et M. Edward Blake ont occup? pour la minorit?, ce dernier assist? de M. John S. Ewart et de M. Gore. [Note de l'馘iteur: Groulx commet ici une erreur. Il y a bien eu un Blake qui a plaid? la cause de la minorit?, mais il ne s'agissait pas d'Edward Blake, ancien leader du Parti lib駻al du Canada et s?rement le plus 駑inent plaideur du pays, mais bien de A. G. Blake. On reprochera longtemps au gouvernement de n'avoir pas retenu les services d'Edward Blake, mettant ainsi en p駻il la cause de la minorit?. Edward Blake repr駸entera la minorit? dans la cause Brophy.]

(60) D饕ats du S駭at, 1897, pp. 161-62.

(61) L.-A. Prud'homme, cit? par Dom Benoit, Vie de Mgr Tach?, II, p. 690.

(62) A parler vrai, cet appel avait 騁? fait au moment o? la cause Barrett 騁ait port馥 au Conseil priv? d'Angleterre. Avant d'agir, le cabinet canadien voulut attendre la d馗ision du haut tribunal. Documents relatifs ? la cause des 馗oles du Manitoba, Sessionde 1895, pp. 207-09.

(63) D饕ats de la Chambre des Communes du Canada, 1891,pp. 2,021, 3,654-57, 5,718.

(64) 55-56 Victoria, chap. 25.

(65) L'aide p馗uniaire fut toute personnelle de la part des ministres et de quelques amis. (Voir Thomas Chapais, M駘anges de pol駑iques . . ., p. 222.

(66) Documents relatifs ? la cause des 馗oles du Manitoba, Session de 1895, p. 200.

(67) Documents relatifs ? la cause des 馗oles du Manitoba, Session de 1895, pp. 1-11.

(68) Thomas Chapais, M駘anges de pol駑iques . . ., pp. 205-06 ; Mgr Tach?, Une page de l'histoire des 馗oles du Manitoba..., p. 103; M. l'abb? C.-A. Beaudry ? Mgr Langevin, 21 mars 1908, Archives de l'archev鹹h? de Saint-Boniface.

(69) Bill r駱arateur (Manitoba), D饕ats dans la Chambre des Communes, Partie I, p. 10.

(70) Archives personnelles de M. le chanoine C.-A. Beaudry.

(71) Documents de la Session (no 63),Ottawa, 1891, pp. 3-5.

(72) Documents relatifs ? la cause des 馗oles du Manitoba, Session de 1895, pp. 342-56.

(73) Bill r駱arateur (Manitoba), D饕ats de la Chambre des Communes, 1896, Partie I, p. 54.

(74) Documents relatifs ? la cause des 馗oles du Manitoba, Session de 1895, pp. 357-58.

(75) Documents relatifs ? la cause des 馗oles du Manitoba, Session de 1895, pp. 183-94.

(76) Cit? par Thomas Chapais, M駘anges de pol駑iques …, p. 294.

(77) Doc. relatifs ? la cause des 馗oles du Man., Session de 1895, pp. 367-69.

(78) Documents relatifs ? la cause des 馗oles du Manitoba, Sesssion de 1895. pp. 373-75.

(79) Correspondance de Flavien Dupont, l'Action fran軋ise, Vol. X, pp. 168-69.

(80) Documents de fa Session, (No 39), Ottawa 1896, pp. 4-6.

(81) En marge d'une correspondance, l'Action fran軋ise, Vol. IX, p. 34.

(82) Thomas Chapais, M駘anges de pol駑iques..., p. 274.

(83) Lettre de l'abb? C.-A. Beaudry ? Mgr Langevin, 21 mars 1908, Archives de l'Archev鹹h? de Saint-Boniface.

(84) Les ministres d駑issionnaires 騁aient MM. Foster, Hibbert Tupper, Haggart, Montague, Ives, Dickey et Wood.

(85) Lorsqu'il avait plaid? en faveur de la minorit?, devant le Conseil priv? du Canada, M. Ewart avait apport? avec lui un projet de loi r駱aratrice. Beaucoup du projet de M. Ewart passa dans celui du gouvernement. (Doc. relatifs ? la cause des 馗oles du Manitoba, Session de 1895, p. 31.)

(86) Bill r駱arateur (Manitoba), D饕ats dans la Ch. des Communes, 1896, Partie 1鑽e, p. 1.

(87) Bill r駱arateur (Manitoba) 1896, partie l鑽e, p. 7.

(88) Documents pour servir ? l'intelligence de la question des 馗oles du Manitoba, (Rome, 1896), pp. 138-39.

(89) La question des 馗oles du Manitoba, La doctrine des 騅麭ues et la doctrine de Laurier, bro. p. 16.

(90) Mgr Langevin au Cardinal Ledochowski, 18 oct. 1896, Arch. de l'Archev鹹h? de Saint-Boniface. Cet駘馮ramme du 13 avril 1896, adress? ? ォ Sir Charles Tupper, Leader of the House of Commons, Ottawa サ et libell? en anglais, se lisait comme suit: ォ In the name of the Catholic minority of Manitoba that I represent officially, I ask the House of Commons to pass the whole ォ Remedial Act サ as it is now amended. It will be satisfactory to the said Catholic minority that will consider it as a substantial workable and final seulement of the school question according to the Constitution サ. (Ad. Langevin, Archbishop of St. Boniface). Voir Arch. du Can., Canada Miscellaneous, Tupper Papers, Vol. IV. No 611a.

(91) M. l'abb? Alphonse-A. Cherrier ? Mgr J.-B..Proulx, 10 mars 1896. Archives du S駑inaire de Sainte-Th駻鑚e, Correspondance de l'abb? J.-B. Proulx.

(92) A,-R. Angers ? F. Dupont, 27 juillet 1895, En marge d'une correspondance, l'Action fran軋ise, IX, p. 39.

(93) Bill r駱arateur (Manitoba), 1896, Partie IIe, p. 684.

(94) Bill r駱arateur (Manitoba), 1896, Partie IIe, p. 1,261.

(95) Bill r駱arateur (Manitoba), 1896, Partie le, p. 30.

(96) Dans l'article primitif le choix des livres 騁ait restreint aux livres en usage dans les high schools, les 馗oles publiques du Manitoba et les 馗oles s駱ar馥s de l'Ontario. L'amendement 騁endit le choix aux s駻ies en usage dans les 馗oles publiques ou s駱ar馥s de n'importe quelle province.

(97) Voir le texte de cet amendement, Bill r駱arateur (Manitoba), 1896, partie IIe, p. 1,256.

(98) Id., p. 1,259.

(99) Bill r駱arateur (Manitoba), 1896, partie IIe, p. 1,361.

(100) Bill r駱arateur (Manitoba), 1896, partie I鑽e, p. 106.

(101) Toute la correspondance priv馥 de Sir Charles Tupper, ? cette 駱oque, en particulier pendant la campagne 駘ectorale de 1896, t駑oigne de sa bonne foi. A ses partisans protestants qui 駱rouvent de la g麩e ? d馭endre devant leurs 駘ecteurs la loi r駱aratrice, il ne cesse de rappeler que son geste lui a 騁? dict? par un imp駻ieux sentiment de devoir. Ses adversaires politiques lancent dans le public maintes rumeurs compromettantes pour le premier ministre: on l'accuse, par exemple, d'avoir promis aux orangistes, pour capter leur vote, des accommodements. Chaque fois, Sir Charles proteste avec 駭ergie. Tout au plus esp駻ait-il rester au pouvoir avec une majorit? assez puissante pour en imposer ? la fin au gouvernement de Winnipeg; il se flattait de le contraindre ? r馮ler lui-m麥e l'irritante question des 馗oles et de lib駻er ainsi le gouvernement d'Ottawa des tracas d'une nouvelle loi r駱aratrice. (Voir Arch. du Can., Tupper Papers, lettre de Sir Charles ? G. B. Osler, 19 mai 1896, Vol. IV, No 622. Voir aussi dans le m麥e volume des Tupper Papers, Nos 610a, 611a, 621a.

(102) Bill r駱arateur (Manitoba), 1896, Partie II, p. 1,258.

(103) Documents de la Session, (No 39 A. A.), (No 39c), 1896, Ottawa. Bill r駱arateur (Manitoba), 1896, partie IIe, pp. 583-608. D饕ats du S駭at, 1897, pp. 108-09, 209-12.

(104) Joseph Dubuc ? Mgr J.-B. Proulx, 15 avril 1896, Arch. du S駑inaire de Sainte-Th駻鑚e, Correspondancede Mgr J.-B. Proulx. Voir aussi la Presse, 30 mars 1896: R馮lons la question.

(105) Voir le Nationaliste, oct. 1905, lettre de Mgr Ad. Langevin ? M. J.-E. Pr騅ost, directeur de l'Avenir du Nord, 13 oct. 1905.

(106) Thomas Chapais, M駘anges de pol駑ique. . ., p. 298.

(107) M. Laurier 馗rivait le 31 janvier 1896 ? M. Charles-Eug鈩e Pouliot: ォ A cette heure le parti conservateur est absolument divis? sur cette question-l?. D'o? vient que le jeu ordinaire des partis sur une semblable question soit compl鑼ement arr黎?? Toute la cause s'en trouve dans le fait que la position prise par les catholiques en mati鑽e d'馘ucation n'est pas comprise. Les protestants ne comprennent pas l'importance que l'ノglise attache ? l'enseignement dogmatique. Les protestants ne veulent pas d'馗oles ath馥s, mais il ne veulent pas, non plus, d'enseignement dogmatique; ils s'en tiennent ? l'enseignement moral et en imposant aux catholiques les m麥es restrictions qu'ils s'imposent ? eux-m麥es, ils ne se rendent pas compte qu'ils sont coupables d'un acte d'intol駻ance. サ

ォ C'est l? le premier pr駛ug? qu'il y a ? faire dispara?tre, c'est l? le premier point sur lequel il faut faire la lumi鑽e, et jusqu'? ce que ce point soit rendu lumineux, la question est insoluble. Voil? pourquoi, depuis quatre ans, je m'騅ertue ? dire qu'il faut une enqu黎e o? les deux choses principales ? prouver seraient, d'abord celle dont je viens de parler et ensuite les promesses qui furent faites ? la minorit? lors de l'entr馥 du Manitoba dans la Conf馘駻ation et r駱騁馥s depuis ? plusieurs reprises. サ (Lettre fournie ? l'auteur par M. Jean-Fran輟is Pouliot, M.P.).

(108) Documents pour servir ? l'intelligence de la question des 馗oles du Manitoba, avec quelques noies explicatives, (Rome, 1896), pp. 170-71.

(109) Bill r駱arateur (Manitoba), D饕at dans la Chambre des Communes, 1896, partie I鑽e, p. 18.

(110) Bill r駱arateur (Manitoba), 1896, partie l鑽e, pp. 10-11.

(111) Dans sa correspondance avec ses amis il persiste ? mettre toute sa confiance en son projet d'enqu黎e. Que le clerg? lui laisse coud馥s franches, et il se fait fort d'entra?ner son parti au r騁ablissement des 馗oles s駱ar馥s. ォ A tout 騅駭ement, disait-il, j'y mettrais mon orgueil, et si je ne r騏ssissais pas, je briserais volontairement ma carri鑽e.サ (Lettre ? Charles-Eug鈩e Pouliot, 31 janvier 1896).

(112) Cit? par Th. Chapais, M駘anges de pol駑iques . . ., p. 321.

(113) D饕ats du S駭at, 1897, p. 30.

(114) Lettre ? Mgr J.-B. Proulx, 15 avril 1896, Arch. du S駑inaire de Sainte-Th駻鑚e, corr. de Mgr J.-B. Proulx.

(115) Sermon de Mgr Gravel ? Sainte-Ang鑞e de Laval. (La question des 馗oles du Manitoba, la doctrine des 騅麭ues et la doctrine de M. Laurier, bro., p. 30). Si nous en croyons la lettre d'un envoy? de M. Laurier ? Rome, lettre dont nous avons lu et copi? l'original, cette fid駘it? intransigeante au droit absolu, ce serait m麥e le grand m駻ite que Mgr Merry del Val aurait reconnu aux 騅麭ues, m駻ite que le d駘馮u? pontifical ne jugeait pas, du reste, sans reproche. ォ Le pire de tout, aurait confess? le d駘馮u?, est que ces bons 騅麭ues ont parfaitement raison dans toute leur argumentation. Les catholiques du Manitoba ont 騁? d駱ouill駸 de leur droit. Le parlement central a le pouvoir, selon la constitution, de passer des lois r駱aratrices. L'Eglise n'approuve point les 馗oles mixtes quand elles constituent un danger pour la foi des enfants, mais les 騅麭ues semblent incapables de saisir la situation telle qu'elle est, ? savoir que, comme question de politique, le parlement central (et quel que soit le parti au pouvoir) ne peut passer une loi r駱aratrice et que l'Eglise ne peut pas permettre que des g駭駻ations d'enfants grandissent sans aucune 馘ucation dans l'attente de l'av鈩ement d'une majorit? catholique au Manitoba, av鈩ement d'une r饌lisation probl駑atique. サ (Document dont, par discr騁ion, nous devons taire la provenance. Notons aussi que cette opinion, Mgr Merry del Val l'駑ettait apr鑚 la promulgation du R鑒lement Laurier-Greenway).

(116) Arch. de l'archev鹹h? de Saint-Boniface, Manitoba.

(117) D饕ats des Communes, ao?t 1896, p. 49.

(118) D饕ats des Communes, ao?t 1896, p. 7.

(119) A vrai dire, M. Tarte eut avec Mgr Langevin quatre entrevues, mais d'un caract鑽e plut?t priv?. L'archev麭ue de Saint-Boniface ayant d馗lar? qu'il n'accepterait rien de moins que les 馗oles s駱ar馥s, M. Tarte arr黎a l? les conversations. (D饕ats des Communes, mars 1897, p. 206).

(120) M駑oire de Mgr Langevin ? Mgr Merry del Val, Arch. de l'Archev鹹h? de Saint-Boniface.

(121) Voir ? ce sujet la d馗laration de M. Cameron ? la l馮islature du Manitoba, D饕ats du S駭at, 1897, p. 134.

(122) D饕ats de la Chambre des Communes, 26 mars 1897.

(123) D饕ats du S駭at, 1897, pp. 142-47.

(124) Cit? par Thomas Chapais, M駘anges de pol駑iques. . ., pp. 333-34.

(125) Laurier ? Charles Russell, 24 f騅rier 1897, Arch. du Canada, Doc. Laurier.

(126) On songeait m麥e ? cet appel, d鑚 janvier 1896. Laurier 馗rivait ? Charles-Eug鈩e Pouliot, le 31 janvier 1896: c II faudrait, comme vous le dites, faire un appel; je m'en occupe activement dans ce moment-ci. Je voudrais avoir deux d駘馮u駸: un la?que et un eccl駸iastique サ.

(127) Voir cette p騁ition, D饕ats de la Chambre des Communes, 1897, pp. 200-01.

(128) Arch. de l'Archev鹹h? de Saint-Boniface.

(129) Laurier ? Charles Russell, 24 f騅. 1897, Arch. du Canada, Doc. Laurier.

(130)Pourl'historique de ces n馮ociations, voir Arch. du Can. Doc. Laurier.

(131) Lettres apostoliques ou Encycliques, brefs, etc. de S. S. L駮n X111 (ノdition de la Bonne Presse), t. V, pp. 221-31.

(132) Cit? par D饕ats du S駭at, 1897, p. 135.

(133) Mgr Langevin ? Mgr N. B馮in, 22 janvier 1898, Arch. de l'archev鹹h? de Saint-Boniface.

(134) Mgr Langevin ? M. J.-G.-H. Bergeron, M.P., 8 avril 1898, Arch. de l'archev鹹h? de Saint-Boniface.

(135) Mgr Langevin ? L駮n XIII, 31 ao?t 1898, Arch. de l'archev鹹h? de Saint-Boniface.

(136) M駑oire adress? au V駭駻able 駱iscopat canadien sur la question scolaire au Manitoba, par Mgr l'Archev麭ue de Saint-Boniface, 18 d馗. 1900. Arch. de l'archev鹹h? de Saint-Boniface.

(137) James Prendergast, cit? par Documents pour servir ? l'intelligence de la question des 馗oles du Manitoba, Rome,1896.

Source: Lionel Groulx, L'Enseignement fran軋is au Canada. Vol. 2, Les 馗oles des minorit駸, Montr饌l, Granger fr鑽es, 1933, 271p., pp. 71-137.

ゥ 2000 Claude B駘anger, Marianopolis College

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